Télémédecine

L’URPS Île-de-France pointe les dérives des plateformes de téléconsultation

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Publié le 07/04/2023
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Marketing trompeur, détournement du parcours de soins : une étude de l'URPS ML francilienne souligne les abus de certaines sociétés commerciales de téléconsultations.

Crédit photo : S.Toubon

« Consultez un médecin en ligne aujourd'hui », « renouvellement d’ordonnance », « évitez les déplacements et la salle d’attente »… La majorité des plateformes de téléconsultations tricolores déploient des « techniques publicitaires incitatives », dénonce l’URPS médecins libéraux d’Île-de-France. Un marketing qui a pour conséquence de « détourner le patient du parcours de soins habituel » en promettant « souvent un accès facile et rapide à une ordonnance ou à un arrêt de travail », regrette l’URPS, qui a mené une étude avec le cabinet Caron Avocat. D’août à septembre 2022, ont été passées en revue les activités des principales plateformes qui proposent des téléconsultations sans rendez-vous – Qare, Feeli, Livi, Medadom, Tessan, Urgence Docteur, MédecinDirect, Hello Care… Des sites qui offrent des « médecins en ligne ».

Logique de confort 

Premier enseignement, ces sociétés déploient des techniques marketing qui « vulgarisent l’acte de téléconsultation » et pourraient « inciter les personnes à y recourir dans une logique de confort en dehors du parcours de soins ». Aussi, ces plateformes n'hésitent-elles pas à afficher en vitrine la simplicité mais surtout l'efficacité de la téléconsultation. « L’obtention ou le renouvellement d’une ordonnance est tout particulièrement mis en avant comme pouvant être facilitée par la conduite d’une téléconsultation, voire l’obtention d’un arrêt de travail », détaille l’étude.

L’accès rapide à un généraliste se transforme souvent en produit d’appel. « L’ensemble des contenus éditoriaux sont orientés vers une mise en relation avec ce dernier », note l’étude. Le praticien est régulièrement présenté comme « intervenant en quelque sorte sous l’égide des équipes de direction de plateformes », pointe l'analyse. Pire, certaines sociétés invitent les patients au démarchage. « Vous aimeriez pouvoir consulter votre médecin en vidéo, mais il ne propose pas encore la téléconsultation ? Invitez-le ! », peut-on lire sur l’un des sites.

Flou sur le remboursement

Au fil des pages web, le marketing offensif se mêle à un « manque de clarté », regrette l’URPS, d'autant que certaines plateformes entretiennent le flou quant au remboursement. « Rappelons que toute téléconsultation ne donne pas droit au remboursement du patient, qui obéit à des critères conventionnels précis », martèle l'Union. Or, les praticiens de ces plateformes ont souvent la possibilité « d’exercer en dehors du cadre conventionnel de la téléconsultation : principes et exceptions du parcours de soins coordonné, logique territoriale », souligne l’étude. D'où une confusion qui s'installe. Dans une conclusion sévère, l’URPS francilienne considère que les conditions actuelles de téléconsultation « ne permettent pas de garantir l’application de bonnes pratiques médicales et ne garantissent pas la sécurité de la prise en charge des patients ».

L’URPS réclame la mise en place d’un cahier des charges précis pour combattre ces dérives. Elle souhaite par exemple que chaque confrère ait l'obligation « de déclarer une activité clinique présentielle majoritaire et un lieu de consultation ». En décembre dernier, les parlementaires ont adopté, via la loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS), l’introduction d’un « agrément » obligatoire pour certaines plateformes de téléconsultation.

Léa Galanopoulo

Source : Le Quotidien du médecin