Intérim médical, régulation à l’installation et transfert de tâches : François Braun détaille sa feuille de route devant les députés

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Publié le 03/08/2022

Crédit photo : S. Toubon

Baptême du feu pour François Braun, auditionné le 2 août au soir par la commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale. Devant une quarantaine de députés, le ministre a reçu une salve de questions sur la crise des urgences et la pénurie de médecins.

Concédant que la situation des urgences « n’était que la partie emergée de l’iceberg, révélatrice d’une crise plus profonde des difficultés de la ville », le ministre de la Santé a souhaité vanter sa méthode. La mission flash d’abord, dont il a, une fois de plus, détaillé les contours devant la commission des Affaires sociales, mais surtout son « œuvre de refondation » : la conférence des parties prenantes, qui sera entamée à la rentrée.

« Mon ambition sera de fonder un nouveau modèle pour répondre mieux aux besoins de santé, ce sera un travail collectif, qui demandera un certain courage », a lancé l’urgentiste, qui souhaite « sortir d’une vision corporatiste ».

« La régulation à l’installation, pas un sujet tabou »

Interrogé par plusieurs députés sur la question brûlante de la liberté d’installation des libéraux, François Braun a répété que « la régulation à l’installation n’était pas un sujet tabou et qu'il ne sera pas tabou dans le cadre des discussions ».

Le locataire du Ségur a toutefois appelé les députés à « éviter les décisions précipitées » sur le sujet, « qui mettraient en difficulté les discussions à venir lors de la conférence des parties prenantes ». Un pied de nez discret aux diverses propositions de loi dans ce sens déposées depuis l’été au Sénat et à l’Assemblée. « Méfions-nous des solutions faciles », avertit François Braun, qui préfère à la place réfléchir « à la réalisation de stages en périphérie, et probablement moins dans les CHU ». Pour discuter du sujet, le ministre compte s’appuyer sur le tout nouveau groupe de travail sur l’accès aux soins - transpartisan - créé par la commission des Affaires sociales.

Délégation dans les règles de la science

Mesuré, François Braun l’est également lorsqu’il est interrogé par les députés sur la délégation de tâches. « Oui ce sera un sujet qui sera traité lors de la conférence des parties prenantes », répond-il mais « il faudra que ça se fasse en respectant les règles de la science, pour être certain qu’il n’y ait pas de perte de chance pour les patients ».

L’urgentiste compte surtout porter des propositions pour libérer du temps médical, citant par exemple les assistants médicaux « qui permettent au médecin d’augmenter sa clientèle de 10 % ». À l’hôpital, le ministre de la Santé « compte aussi diminuer les tâches administratives ».

Il souhaite par ailleurs que la permanence des soins soit davantage partagée entre public et privé. « La pénibilité du travail de nuit, le week-end, ne peut plus reposer que sur le service public », lance-t-il, sans pour autant répondre clairement sur le retour de l'obligation de garde pour les libéraux.

L'intérim médical : de la morphine !

« Comment comptez-vous réguler l’intérim médical ? », a questionné le député de Charente Thomas Mesnier, urgentiste lui aussi, rappelant qu’un plafonnement avait été voté il y a près d’un an dans le cadre de la loi Rist, sans application à l’heure actuelle. « Il n’y a pas d’application de ce texte sur pression des hospitaliers, qu’ils soient directeurs ou médecins », a regretté François Braun, qui là encore, souhaite apporter aux députés « une vision un peu différente » sur le sujet.

« L’intérim, c’est comme de la morphine ! Lorsque l’on en prend, ça va mieux, mais ça ne règle pas la pathologie, et ensuite on devient complétèrent dépendant… Il ne faut pas jeter la pierre à l’intérim : c’est un traitement symptomatique », illustre-t-il.

« Je réfute le terme de tri »

À quelques semaines de la mise en musique de la mission flash, le ministre de la Santé a d’ailleurs été pris à partie sur la régulation à l’entrée des urgences. « Votre solution sur les urgences se résume facilement : "merci de ne pas vous y rendre ! " », a par exemple regretté la députée insoumise Caroline Fiat. « C’est un fonctionnement en mode dégradé », pense pour sa part le parlementaire communiste Pierre Dharréville.

Des accusations qu’a balayées François Braun : « l’accès aux urgences pour ceux qui en ont besoin est garanti, je réfute le terme de tri ». Le ministre a, à nouveau, vanté une meilleure « orientation en fonction des besoins ». « 30 à 40 % des patients se présentant aux urgences pourraient entre pris en charge autrement, en immense majorité par la médecine de ville, avance-t-il. Si, demain, on diminue de 40 % les entrées aux urgences, croyez-moi que ça va faire du bien aux urgentistes ! ».


Source : lequotidiendumedecin.fr