62 % des greffons rénaux non utilisés aux États-Unis auraient été greffés avec le système français

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Publié le 27/08/2019

Crédit photo : Phanie

Alors que le 10 juillet dernier Donald Trump annonçait des mesures pour améliorer l'accès à la greffe rénale aux États-Unis, une étude franco-américaine parue dans « JAMA Internal Medicine » montre que les Américains gagneraient à suivre le modèle français en élargissant les critères de sélection des greffons issus de donneurs décédés.

3 500 greffons potentiels non utilisés

« Aux États-Unis, une part importante des reins issus de donneurs décédés ne sont pas utilisés, alors que nous sommes dans un contexte de pénurie d'organes mondiale, indique au « Quotidien » le Pr Alexandre Loupy, directeur du Paris Transplant Group et co-auteur de l'étude. Ce problème est connu depuis maintenant10 ans ». Chaque année, ce sont près de 3 500 greffons potentiels qui ne sont pas greffés aux États-Unis, car jugés de qualité insuffisante. La qualité des greffons est évaluée selon des critères très restrictifs par rapport à ceux utilisés en France.

Les données des registres nationaux français et américains ont été comparées sur la période 2004-2014. Aux États-Unis, sur les 156 089 greffons potentiels provenant de donneurs décédés, 17,9 % ont été récusés sur ces 10 ans, alors qu'en France, ils sont 9,1 % des 29 984 à ne pas avoir été greffés. En France, les critères ont été élargis et les néphrologues ont aujourd'hui davantage recours à des donneurs plus âgés et donc avec davantage de comorbidités comme une hypertension artérielle, et ce sans augmenter le risque chez les patients. Sur la période étudiée, l'âge moyen des donneurs de greffons était de 36,51 ans aux États-Unis contre 50,91 ans en France. « De plus, les Américains utilisent un système d'évaluation des greffons basé sur le Kidney Donor Risk Index (KDRI), qui est peu performant », précise le Pr Loupy.

62 % des greffons rejetés auraient été utilisés en France

En s'appuyant sur des algorithmes mathématiques et des modèles de simulation, les auteurs ont déterminé que 62 % des greffons rejetés aux États-Unis auraient été utilisés avec le système français.

En simulant la transposition du modèle de prise de décision français aux États-Unis, les auteurs ont pu également estimer la durée de vie de ces greffons s'ils avaient été transplantés. « En 10 ans, ce sont 132 445 années de vie-greffon qui auraient pu être gagnées », souligne le néphrologue, ajoutant que ces bénéfices pour les patients s'accompagnent d'économies colossales pour la société.

« Notre étude illustre l'apport de la statistique et des algorithmes en tant qu'outils d'aide à la décision. L'intelligence artificielle permet d'envisager différents scénarios et de quantifier le risque », conclut le Pr Loupy.


Source : lequotidiendumedecin.fr