Cardiopathie congénitale

Tétralogie de Fallot : mieux identifier les patients à risque d'arythmie

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Publié le 25/06/2021
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Grâce aux données issues du registre DAI-T4F regroupant tous les patients français atteints de tétralogie de Fallot et porteurs d'un défibrillateur, les patients à haut risque de troubles du rythme pourraient être mieux identifiés.
La tétralogie de Fallot représente environ 10 % des cardiopathies congénitales

La tétralogie de Fallot représente environ 10 % des cardiopathies congénitales
Crédit photo : ZEPHYR/SPL/PHANIE

Le registre DAI-T4F est la plus grande cohorte mondiale de patients atteints de tétralogie de Fallot (TF) et porteurs de défibrillateur automatique implantable (DAI). Deux études issues de ce registre devraient permettre de mieux définir les patients qui ont besoin d’un tel dispositif et d’identifier ceux qui pourraient bénéficier d’un remplacement valvulaire pulmonaire.

La TF, qui représente environ 10 % des cardiopathies congénitales et la plus fréquente de celles cyanogènes, se caractérise par une communication interventriculaire, une dextroposition de l’aorte, une sténose pulmonaire et une hypertrophie ventriculaire droite. Opérés dans la majorité des cas dans les premiers mois de vie, les enfants une fois adultes peuvent développer une régurgitation valvulaire pulmonaire ou des troubles du rythme. « Nous avons estimé que, sur la période 2000-2019, 9 692 patients avaient une TF en France, parmi lesquels la prévalence des porteurs d’un défibrillateur est de 1,7 % », indique au « Quotidien » le Dr Victor Waldmann, coordinateur du
registre et rythmologue*.

La fragmentation des QRS, un marqueur majeur

« Ce registre a été lancé en 2010. Il inclut tous les nouveaux patients et rétrospectivement tous les cas implantés de 2000 à 2010 », précise le Dr Waldmann. Les deux études ont ainsi inclus, entre 2000 et 2019, 165 patients de 40 centres (âge médian de 42,2 ans). Parmi eux, 63 % ont été implantés en prévention secondaire (après arrêt cardiaque ou trouble du rythme grave) et 37 % en prévention primaire.

Dans l'étude parue dans « Circulation » (1), l’objectif principal était d’évaluer la proportion de patients implantés qui recevaient des traitements appropriés par le DAI au cours d’un suivi de 6,8 ans en médiane. « Le traitement approprié, c’est le bon traitement au bon moment, explique le Dr Waldmann. Le DAI peut délivrer deux types de traitement : un choc électrique ou une stimulation antitachycardique ». Par an, 10,5 % des patients recevaient un traitement approprié (7,1 % en prévention primaire et 12,5 % en prévention secondaire). Cependant, 43 % des patients ont présenté au moins une complication associée au DAI au cours du suivi, « la plus fréquente étant la survenue de chocs inappropriés », note le Dr Waldmann.

Les critères pour la pose du dispositif sont définis par des recommandations (cf. encadré), « mais sont imparfaits », selon le rythmologue. Actuellement, certains patients sont implantés en excès et exposés ainsi inutilement aux complications, quand d’autres ne le sont pas et présentent des troubles du rythme.

Les auteurs ont identifié un nouveau marqueur associé aux arythmies : la fragmentation des QRS observée à l’ECG. « Nous avons démontré qu’il s’agissait d’un marqueur fort des événements rythmiques, qui devrait être utilisé en complément des critères classiques pour mieux sélectionner les patients », souligne le Dr Waldmann.

Un bénéfice de la valvulation sur les arythmies

Dans une autre étude parue dans le « JACC » (2), le Dr Waldmann et son équipe ont cherché à savoir si une valvulation pulmonaire permet de réduire la survenue de troubles du rythme chez les 26 patients de la cohorte concernés. « L’opération initiale dans l’enfance consiste à lever la sténose au niveau de la voie pulmonaire, indique le coordinateur du registre. Mais cela crée le plus souvent une fuite pulmonaire, qui plus tard peut entraîner une dilatation du ventricule droit et des symptômes, comme de l’essoufflement ». Une intervention peut ainsi être préconisée chez certains patients.

« Dans notre cohorte, tous les patients disposent d’un enregistrement continu du rythme grâce au DAI », détaille le Dr Waldmann. Les résultats ont montré une nette diminution des troubles du rythme après le remplacement valvulaire. « La valvulation pourrait ainsi éventuellement être proposée à des patients asymptomatiques mais qui présentent des troubles du rythme », estime le Dr Waldmann.


Exergue : Actuellement, certains patients sont implantés en excès et exposés ainsi inutilement aux complications

*hôpital européen Georges-Pompidou et hôpial Necker-Enfants malades (AP-HP)
(1) V. Waldmann et al., Circulation, 2020. doi: 10.1161/CIRCULATIONAHA.120.046745
(2) F. Bessière et al., JACC Clin Electrophysiol, 2021. doi: 10.1016/j.jacep.2021.02.022

Charlène Catalifaud

Source : Le Quotidien du médecin