Tabac, alcool, aliments ultra-transformés : l’Union internationale contre le cancer dénonce les intérêts commerciaux

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Publié le 31/01/2023
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Crédit photo : Burger/Phanie

« Les intérêts commerciaux sont à l'origine de millions de décès évitables par cancer », tacle l’Union internationale contre le cancer (UICC). À l’approche de la Journée mondiale contre le cancer le 4 février, l’organisation appelle les gouvernements à prendre des mesures pour contrer l’influence de certains industriels et « limiter l'exposition des populations au tabac, à l'alcool et aux produits alimentaires ultra-transformés », encourage Cary Adams, directeur général de l'UICC, dans un communiqué.

Près de la moitié des décès mondiaux dus au cancer (4,45 millions sur plus de 9 millions en 2019) sont causés par des facteurs de risque modifiables connus, dont les principaux sont le tabagisme, la consommation d’alcool et un IMC élevé, notamment lié à une consommation d’aliments ultra-transformés et de boissons sucrées. Les produits en cause sont « vendus par des entreprises sans scrupule qui interfèrent dans les débats politiques et abusent de la science pour s’assurer un environnement commercial favorable », poursuit-il.

Plus de taxes et moins de pub

Pour réduire la disponibilité et la consommation de ces produits « malsains », et prévenir des millions de décès, quatre actions politiques se sont « avérées efficaces », insiste l’UICC : une augmentation des taxes, des restrictions sur la publicité, un meilleur étiquetage et une sensibilisation du public.

Le levier de la fiscalité a déjà fait ses preuves. « Des études aux États-Unis montrent qu'une augmentation de 10 % du prix des cigarettes réduit la consommation des adultes de 3 à 5 % et que les jeunes sont jusqu'à trois fois plus réactifs que les adultes », cite l’UICC. Concernant la publicité sur la malbouffe, une analyse britannique a estimé que son interdiction à la télévision avant 21 heures représenterait des bénéfices sanitaires associés à une baisse de l’obésité chiffrés à 1,9 milliard de livres sterling.

Autre exemple, en Australie, l’interdiction de la publicité sur le tabac et l’instauration d’un emballage neutre pour les cigarettes « ont conduit à une moindre identification de la marque, à une moindre acceptation du tabagisme, à une meilleure perception des risques pour la santé, à une diminution de la consommation chez les jeunes et à un plus grand nombre d'adultes qui arrêtent de fumer », liste Jeff Dunn, président de l’UICC, appelant à des politiques similaires pour l'alcool et les aliments ultra-transformés. Ces mesures « permettront d’atténuer les stratégies de marketing sans scrupule de certaines entreprises qui ciblent les jeunes et d’autres populations vulnérables avec leurs produits malsains », prédit-il.

Mais les ambitions des États en la matière « se heurtent souvent à la résistance des acteurs de l'industrie, y compris des contestations juridiques de mesures politiques et législatives efficaces », ajoute Ulrike Årehed Kågström, présidente élue de l'UICC et secrétaire générale de la Société suédoise du cancer. En France, si des augmentations de taxes sur le tabac sont régulièrement adoptées, l’absence de soutien officiel à des initiatives comme le Dry January illustre les tensions entre préoccupation de santé publique et poids d’une industrie.

Les aliments ultra-transformés, angle mort de la prévention

Quant aux aliments ultra-transformés, même si des recherches sur les impacts restent nécessaires, l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst) affirme dans une note du 26 janvier que « l'état actuel des connaissances appelle à la mise en place de premières actions préventives de santé publique ». Alors que des associations sont observées avec le surpoids, l'obésité, le diabète de type 2, les maladies cardiovasculaires, l'hypertension, la dépression, le cancer ou encore les maladies intestinales inflammatoires, entre 30 et 35 % des calories ingérées par les Français proviennent de ce type d'aliments.

Le 4e Programme national nutrition santé (PNNS) qui court jusqu'en 2023 affiche l’objectif de réduire la consommation des produits ultra‑transformés. Une ambition qui devrait se traduire par des « programmes de promotion de la santé et de marketing social », mais aussi des « politiques publiques qui ciblent les facteurs systémiques et environnementaux de cette problématique », préconise l’Opecst.


Source : lequotidiendumedecin.fr