Sténose carotidienne asymptomatique

La place de la chirurgie rediscutée

Publié le 21/01/2016
Il faut réévaluer la valeur ajoutée de la chirurgie carotidienne chez le patient asymptomatique

Il faut réévaluer la valeur ajoutée de la chirurgie carotidienne chez le patient asymptomatique
Crédit photo : PHANIE

Les sténoses carotidiennes sont une cause majeure d’accident vasculaire cérébral (AVC), ce qui a conduit à recommander une prise en charge chirurgicale (endartériectomie carotidienne) y compris, sous certaines conditions, en cas de sténose asymptomatique. Or, les recommandations actuelles se fondent sur les études ACS et ACST, menées dans les années 1990 et donc sur des chiffres qui ont nettement évolué avec les progrès des traitements médicaux. De ce fait, de nombreuses procédures sont aujourd’hui réalisées inutilement, avec des conséquences médico-économiques très importantes, estimées à quelque 2 milliards d’euros par an aux États-Unis. Les pratiques sont toutefois très variables d’une région à une autre. Ainsi, la proportion de patients opérés est faible dans les pays du nord de l’Europe, mais très élevée aux États-Unis (taux d’intervention de 90 %). « En France, nous ne disposons pas de données épidémiologiques, mais nous estimons à partir du Programme de médicalisation des systèmes d’information (PMSI) que 90 % des sténoses serrées sont opérées », a indiqué le Dr Calvet.

Mieux identifier les patients à risque

Concrètement, c’est le risque d’infarctus cérébral ipsilatéral pour le patient traité médicalement qui a changé : il était de 2 % par an dans les années 1990, il est désormais estimé à 0,7 % par an. Une baisse qui est principalement attribuée au recours aux hypolipémiants, en particulier aux statines. « Si on fait une extrapolation en se fondant sur ces chiffres, il faut aujourd’hui opérer 1 000 patients pour éviter 5 événements à 5 ans, alors qu’auparavant on évitait 6 accidents à 5 ans pour 100 patients opérés », a précisé le Dr Calvet.

L’enjeu désormais est de mieux identifier les patients les plus à risque, qui bénéficieront le plus du geste chirurgical. Différents critères peuvent ainsi être pris en compte, au premier plan desquels l’espérance de vie. Les patients ayant une espérance de vie inférieure à 5 ans ne doivent pas être revascularisés. La vasoréactivité cérébrale est également importante, car une baisse de la réserve circulatoire est associée à un risque accru d’infarctus cérébral. De même, la présence de microsignaux emboliques à l’écho-Doppler expose à un surrisque d’accident cérébral, tout comme celle d’hémorragies intraplaques, visualisée en IRM par un hypersignal. Enfin la progression rapide et marquée de la sténose est aussi un facteur de risque.

Un choix thérapeutique individualisé

« Le risque d’infarctus cérébral a diminué au cours des 20 dernières années, ce qui impose de réévaluer la valeur ajoutée de la chirurgie carotidienne chez le patient asymptomatique, a conclu le Dr Calvet. En attendant les résultats des études en cours, tels que l’essai ACTRIS (endarterectomy combined with optimal medical therapy versus optimal medical therapy alone in patients with asymptomatic severe atherosclerotic carotid artery stenosis at high risk of ipsilateral stroke), prospectif multicentrique, le choix thérapeutique doit se faire de manière individualisée, en tenant compte des critères cités, du risque d’accident vasculaire cérébral périprocédural et des préférences du patient ».

D’après la communication du Dr David Calvet (Paris)
Dr Isabelle Hoppenot

Source : Le Quotidien du Médecin: 9464