« Madame, le radium et ses congénères ont des applications thérapeutiques et votre nom est attaché à cette façon de soigner les malades. Aussi votre place était-elle marquée dans notre compagnie », déclarait le Pr Auguste Béhal alors président de l’Académie de médecine lors de son discours de réception de Marie Curie, le 14 février 1922.
« Première femme élue à l’Académie, elle a ouvert une voie royale à toutes les femmes qui y siègent ou siégeront », a souligné son actuel président, le Pr Claude Jaffiol, lors d’une séance d’hommage « solennel » à la physicienne et chimiste, à l’occasion du 150e anniversaire de sa naissance. Née le 7 novembre 1867 à Varsovie, Maria Sklodowska quitte la Pologne à l’âge de 24 ans pour venir à Paris étudier les sciences à la Sorbonne. En 1895, elle devient Marie Curie en se mariant au physicien Pierre Curie. Leurs recherches conjointes sur les phénomènes de rayonnement du polonium et du radium sont consacrées du prix Nobel de physique de 1903, « l’année où Marie Curie passe sa thèse », fait remarquer Marie Dutreix, biologiste et directrice de recherche au CNRS et à l’Institut Curie. Elle devient au passage la première femme docteur ès sciences physiques. À la suite du décès accidentel de son mari en 1906, Marie Curie lui succède en tant que directrice de laboratoire universitaire de recherche et professeure en chaire à la Sorbonne. Elle devient la première femme à y enseigner.
Synergie transdisciplinaire
En 1909, elle participe à la création de l’Institut du radium. « L’une des notions les plus remarquablement défendues par Marie Curie est la multidisciplinarité », souligne André Aurengo, membre de l’Académie nationale de médecine. « C’est la synergie entre plusieurs disciplines - la physique, la chimie, la biologie et la médecine - qui va permette de vraiment faire progresser l’utilisation médicale des rayonnements », avec l’invention de la radiothérapie et la curiethérapie, souligne-t-il. En 1910, elle est la première femme à porter sa candidature à l’Académie des sciences après la mort du physicien et chimiste Désiré Gernez qui occupait alors le fauteuil de Pierre Curie. « Elle n’y sera pas élue de deux voix au premier tour et d’une voix au deuxième », note Nathalie Pigeart-Micault, docteure en histoire des sciences et responsable des ressources historiques du musée Curie. En 1911, Marie Curie obtient son second prix Nobel, celui de chimie, pour la découverte du polonium et du radium, l’isolation du radium métallique et l’étude de cet élément. Seule femme à obtenir deux Nobel, elle demeure aussi la seule (les deux sexes confondus) à avoir obtenu cette distinction dans deux disciplines scientifiques différentes.
Médecine de guerre
« Loin de vivre en vase clos dans son laboratoire, convaincue de l’utilité des rayons X dans la chirurgie de guerre, elle crée une véritable entreprise de 20 voitures radiologiques, allant sur le terrain et formant 150 infirmières radiologues et installant 200 salles de radiologie entre 1916 et 1918 », rappelle le Pr Claude Huriet, membre honoris causa de l’Académie de médecine. En 1920, elle crée avec le Dr Claudius Regaud la Fondation Curie qui servira de modèle pour les centres anticancéreux du monde entier. Pour ce 150e anniversaire, un médaillon à l’effigie de Marie Curie est désormais apposé à l’entrée de la salle de séance de l’Académie. « Nous souhaitons que sa présence soit le signe permanent de notre volonté d’ouverture pour tous ceux et celles qui oseront briser le cadre des conventions dans l’intérêt universel de la science et de la santé », déclare le Pr Jaffiol.
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