Apnées du sommeil et fibrose

Une association méconnue

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Publié le 05/04/2018
apnee du sommeil

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Crédit photo : GARO/PHANIE

Si le syndrome d’apnées obstructives du sommeil (SAOS) est très fréquent, la fibrose pulmonaire idiopathique (FPI) est une maladie rare, avec une prévalence estimée à 8-11/100 000 en Île-de-France (y penser devant une toux sèche, un essoufflement progressif, des râles crépitants secs bilatéraux des bases pulmonaires chez un sujet de plus de 60 ans). La FPI est cependant la plus fréquente des pneumopathies interstitielles diffuses idiopathiques, et son incidence est en augmentation, peut-être en raison du vieillissement de la population. Souvent sévère, avec une médiane de survie de seulement trois ans à l’annonce du diagnostic, sa physiopathologie reste mal connue.

Pourrait-elle être à l’origine d’un SAOS ou, à l’inverse, le SAOS pourrait-il favoriser ou aggraver la fibrose ? Étant donné que ces deux pathologies ont des facteurs prédisposants communs – sexe masculin, tabac, âge – et sont toutes les deux associées à des taux élevés de comorbidités cardiovasculaires ou métaboliques, la question mérite d’être posée.

Un surrisque important de SAOS

Une étude américaine de 2009, menée chez des patients de plus de 60 ans présentant une FPI (tous stades de sévérité confondus), a montré que 68 % d’entre eux présentaient un SAOS modéré à sévère (défini par un index d’apnées/hypopnées supérieur à 15/h). Pour mémoire, dans la population générale des plus de 60 ans, ce taux est d’environ 20 %. D’autres études ayant confirmé ces données, cette forte association entre fibrose et SAOS a suscité des questions.

Première hypothèse évoquée : la réduction des volumes pulmonaires (comme celle observée dans la fibrose évoluée) pourrait favoriser une réduction du calibre des voies aériennes supérieures et donc conduire à un risque accru de fermeture de ces voies pendant la nuit, d’où l’induction d’un SAOS.

Un facteur favorisant ou aggravant ?

Pourtant, la cohorte Cofi, menée en France à l’initiative du Pr Dominique Valeyre (CHU Avicenne, Bobigny) de façon prospective, va plutôt dans le sens du SAOS à l’origine de la fibrose (1). Ont été inclus 244 patients avec une fibrose récente (diagnostiquée depuis moins de 9 mois), suivis pendant cinq ans. Une polysomnographie systématique a été réalisée dans un sous-groupe de 45 patients (pris en charge dans les cinq sites d’Avicenne, Bichat, Georges-Pompidou, Angers et Lyon). Elle a permis de montrer que 62 % des patients avaient déjà un SAOS modéré à sévère.

Puis, en 2017, dans une cohorte américaine de patients, apnéiques ou non (2), des signes d’atteinte pulmonaire interstitielle ont été recherchés de façon systématique (au scanner thoracique). Alors que ces patients n’avaient aucun symptôme pulmonaire, des anomalies interstitielles discrètes au scanner ont été retrouvées plus fréquemment chez les sujets apnéiques, suggérant que le SAOS pourrait peut-être favoriser certaines pathologies interstitielles pulmonaires. 

 

(1) Gille T, Didier M, Boubaya M, Moya L, Sutton A, Carton Z, Baran-Marszak F, Sadoun-Danino D, Israël-Biet D, Cottin V, Gagnadoux F, Crestani B, d’Ortho MP, Brillet P-Y, Valeyre D, Nunes H, Planès C. Obstructive sleep apnoea and related comorbidities in incident idiopathic pulmonary fibrosis. Eur Respir J. 2017 Jun 8;49(6). pii: 1601934. doi: 10.1183/13993003.01934-2016. Print 2017 Jun. PMID: 28596432 

(2) Kim JS et al. Obstructive Sleep Apnea and Subclinical Interstitial Lung Disease in the Multi-Ethnic Study of Atherosclerosis (MESA). Vol. 14, No. 12 | Dec 01, 2017  Annals of the American Thoracic Society

N. S.

Source : Bilan Spécialiste