Les chemins de Joe Chambers et Esaïe Cid

De New York à Saint-Ouen

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Publié le 03/03/2023
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Le vétéran Joe Chambers et Esaïe Cid nous offrent un voyage de la ville emblématique du jazz à celle, tout aussi emblématique, des Puces parisiennes.

* En 1963, pour un enregistrement avec le multi-instrumentiste Éric Dolphy, le batteur et vibraphoniste Joe Chambers, âgé aujourd'hui de 80 ans, intègre l'écurie du célèbre label Blue Note. Six décennies plus tard, et après avoir prêté ses fûts et ses cymbales à la quasi totalité des têtes d'affiche de la maison de disques fondée en 1939, Wayne Shorter, Bobby Hutcherson, Joe Henderson et Freddie Hubbard notamment, avant de rejoindre le M'Boom Re Percussion de Max Roach, Charles Mingus ou Archie Shepp (la période free jazz principalement), le vétéran vient de reprendre ses baguettes magiques pour graver « Dance Kobina » (Blue Note/Universal). Enregistré à New York et à Montréal avec deux groupes différents, l'album résonne de musique afro-cubaine, enrichie de toutes les influences du leader en soixante de carrière. Se croisent ainsi des percussions multiples, colorées, appuyées et groovy, avec des envolées post-bop. Le tout avec la maîtrise rythmique et particulièrement jazzy d'un authentique sorcier des tambours.

* Après deux albums consacrés à l'auteure-compositrice américaine Kay Swift, accessoirement muse de George Gershwin, le saxophoniste-alto/clarinettiste, compositeur et arrangeur Esaïe Cid, originaire de Barcelone et installé en France depuis une vingtaine d'années, a décidé de rendre hommage à sa ville d'adoption, Saint-Ouen-sur-Seine, mondialement réputée pour son Marché aux Puces. À travers « La Suite audonienne » (Swing Alley/Fresh Sound Records), accompagné de Benjamin Dousteyssier (saxe baryton & soprano), Alex Gilson (contrebasse) et Paul Morvan (batterie), le leader évoque, avec notamment neuf compositions originales, des personnalités qui ont marqué l'histoire de cette commune de Seine-Saint-Denis, comme le grand-père de Molière, et des lieux symboliques, la bibliothèque du Marquis de Sade ou un hippodrome aujourd'hui disparu. Autre originalité, la présence de deux saxophones (sans piano), qui n'est pas sans rappeler une tentative identique de Gerry Mulligan et Paul Desmond voici une soixantaine d'années. Mais loin de seulement regarder dans le rétroviseur ou rendre des hommages (très à la mode actuellement), Esaïe Cid ouvre de nouvelles portes, sur une musique qui trouve toute son éloquence à travers des chorus aux intonations de la West Coast. Du pur jazz cool ! Esaïe Cid sera en concert le 9 mars au Sunset à Paris.

 

 

      

 

 

Didier Pennequin

Source : Le Quotidien du médecin