« Les salles de naissance sont devenues des déserts médicaux » : le SOS des obstétriciens, anesthésistes et pédiatres hospitaliers

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Publié le 23/11/2022

Crédit photo : S.Toubon

Déjà à l’origine de nombreuses fermetures et restrictions d’accès des services d’urgence ces derniers mois, la pénurie de médecins – et d'autres professionnels de santé – provoque également de très fortes tensions dans les maternités.

Trois organisations du secteur – le Syndicat national des gynécologues et obstétriciens de France (Syngof), le Syndicat national des pédiatres des établissements hospitaliers (SNPEH) et le Syndicat national des praticiens hospitaliers anesthésistes-réanimateurs élargi aux autres spécialités (Snphare) – tirent ce mercredi la sonnette d’alarme : les salles de naissance seraient devenues de véritables « déserts médicaux ».

Ces syndicats de PH partagent le constat du Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF), qui dénonçait le 18 novembre le manque d’attractivité du travail en salle de naissance. Selon le rapport de sa commission démographie, les tensions s’aggravent au sein des structures : praticiens en nombre insuffisant, pénibilité accrue en raison des gardes, etc. Ces tensions toucheraient 91 % des maternités de moins de 1 000 naissances et 48 % des maternités de 1 000 à 2 000 naissances.

Dangerosité de l’exercice

Comme le Collège national des gynécos, le Syngof, le SNPEH et le Snphare observent que ces pénuries soignantes – obstétriciens, anesthésistes-réanimateurs, pédiatres mais aussi sages-femmes, infirmières et auxiliaires en puériculture – sont liées à la fois à la pénibilité intrinsèque de l'exercice (jour et nuit) et à sa « dangerosité » (avec risque médico-légal). Sur ce dernier point, l’exigence d’une réaction immédiate et adaptée en salle de naissance nécessite  des « moyens humains suffisants », soulignent les trois organisations.

Conséquence, les professionnels de la périnatalité « fuient » les salles de naissance, tandis que les évolutions du métier de sage-femme « visent à leur faire quitter leur cœur de métier ». Quant aux anesthésistes-réanimateurs, ils seraient parfois pressés « sans en avoir ni la compétence ni les moyens humains, de jouer le rôle du pédiatre-réanimateur dans les maternités »…

Réviser le décret de périnatalité, une urgence 

Les trois syndicats réclament la révision urgente du décret de périnatalité de 1998 qui a permis le développement de très grosses maternités sans que les ressources humaines progressent au même rythme.

Or, les travaux de refonte de ce décret se sont arrêtés en chemin en janvier 2020 en raison de l’épidémie de Covid, mais aussi parce que les discussions sur les ratios (nombre minimum de professionnels de santé nécessaires pour la sécurité en salle de naissance) avaient échoué, analysent les trois organisations. Selon les syndicats de PH, la DGOS (ministère de la Santé) « refuse de comprendre que les conditions de sécurité maximale sont la première condition pour l’attractivité des salles de naissance ».

Décès évitables

Réclamant l’actualisation du décret périnatalité, avec des ratios de professionnels de santé médicaux (sages-femmes, obstétriciens, anesthésistes-réanimateurs, pédiatres) adaptés aux besoins, ils redoutent à défaut une « spirale infernale » : « moins de professionnels – moins de sécurité et moins de sécurité – moins de professionnels », et donc « davantage de risques, d’accidents, voire de décès évitables ».

Enfin, les trois syndicats exigent un « réel travail » sur l’attractivité de la salle de naissance, priorité à intégrer dans le chantier de la permanence des soins. Le Syngof, le SNPEH et le Snphare refusent que la qualité et la sécurité des soins « soient bradées pour des raisons économiques et/ou électoralistes ».


Source : lequotidiendumedecin.fr