Une majorité d'hospitaliers subissent un niveau de stress au travail « inacceptable »

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Publié le 17/05/2022

Crédit photo : Phanie

Leurs applaudissements nourris aux fenêtres et aux balcons, il y a deux ans, venaient du fond du cœur. Selon le nouveau baromètre* santé réalisé par Odoxa pour la Mutuelle nationale des hospitaliers (MNH) paru ce mardi, les Français conservent une « image exceptionnelle » de leurs soignants — avec plus de 90 % de bonnes opinions — notamment parce qu'ils les jugent « humains » et « à l'écoute ». Cette perception depuis toujours très favorable, « s’est encore nettement renforcée depuis la crise sanitaire », relève Odoxa, et ce notamment vis-à-vis des médecins.

C'est peut-être la raison pour laquelle, aussi, les Français s'inquiètent pour leurs blouses blanches : les deux tiers des sondés sont persuadés que « notre système de santé va se dégrader à l'avenir », un diagnostic pessimiste partagé par 93 % des soignants eux-mêmes.

Faut-il y voir un signe de désillusion après la campagne présidentielle ? Les Français, comme les professionnels de santé, jugent que les politiques n'ont pas perçu l'importance capitale de la santé et ils espèrent massivement que Macron II fera de la santé et de l'hôpital l'un des domaines prioritaires de son nouveau quinquennat. Beaucoup seraient prêts à se mobiliser pour les conditions de travail des soignants.

Vocation forte mais difficulté à se projeter

Certes, les soignants adorent leur métier, beaucoup plus que la moyenne des autres Français actifs (63 %). Ils sont 95 % à avoir le sentiment « de faire un travail utile » et 93 % d'exercer un job « intéressant ». Mais cette vocation s'accompagne d'une désillusion bien installée en raison d'un manque de reconnaissance et de difficultés majeures au quotidien. 

Ainsi, un quart des blouses blanches seulement jugent que leur travail est reconnu à sa juste valeur (contre 46 % des Français) et, surtout, la quasi-totalité a le sentiment que leur métier est moins valorisé qu'auparavant. Plus préoccupant, un quart d'entre eux seulement sont motivés par leurs perspectives d'évolution. Et deux tiers des actifs hospitaliers confient qu'ils ont déjà envisagé de changer de voie professionnelle depuis deux ans.

L'enquête traduit à cet égard une très grande difficulté à se projeter positivement pour une écrasante majorité de soignants : seuls 17 % des professionnels conseilleraient à leurs enfants de devenir aide-soignant, 19 % des infirmiers, 31 % agent administratif et 29 % médecin hospitalier (mais 51 % médecin en cabinet de ville).

Pas assez de temps pour leurs missions

In fine, un soignant hospitalier sur deux seulement (mais 70 % des médecins) affiche sa satisfaction au travail (contre 77 % des autres actifs) et le mécontentement concerne même 60% des infirmiers et des aides-soignants.

Parmi les principaux motifs d'insatisfaction testés, les blouses blanches citent la mauvaise prise en compte des risques professionnels physiques ou psychosociaux (trois quarts de mécontents), l'absence d'équilibre entre travail et vie personnelle (pour la moitié des sondés) et le manque de temps pour accomplir ses missions (deux tiers du panel) alors que c'est exactement l'inverse pour la moyenne des autres actifs. Signe du niveau très élevé de malaise du secteur, une majorité de professionnels de santé (52 %) déclarent que leur travail « leur génère un niveau de stress inacceptable », là où, là encore, deux tiers des autres actifs disent le contraire.  

Revendications singulières 

Selon Odoxa, les soignants subissent bien davantage que la moyenne des autres catégories d'actifs insultes, menaces, incivilités et même agressions physiques (puisque 55 % des infirmiers et aides-soignants ont subi cette dernière situation). Au terme de ce baromètre, 92 % des professionnels de santé estiment que les métiers du soin sont plus difficiles que les autres (et la même proportion considère qu'ils sont moins attractifs qu'auparavant).   

À côté des préoccupations salariales (sujet majeur mais proportionnellement moins souvent cité que par les autres actifs), les hospitaliers affichent des revendications « singulières », insiste Odoxa, qui portent sur l'équilibre entre vie professionnelle et personnelle (deuxième priorité pour eux), les conditions d'exercice et la quête de sens au travail. De quoi nourrir la feuille de route du futur ministre de la Santé ?  

* Enquête menée du 21 avril au 9 mai auprès de 465 professionnels de santé (dont 298 infirmiers et aides-soignantes) et 3013 Français. Méthode des quotas. 


Source : lequotidiendumedecin.fr