Majorations, recrutements, transports, unités mobiles : l'ARS Île-de-France décline déjà les mesures pour éviter le crash estival aux urgences

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Publié le 06/07/2022

Crédit photo : S.Toubon

Comment la « boîte à outils » de la mission Braun sur les urgences sera-t-elle déployée en Île-de-France ? Dans un contexte de pénurie de personnels de santé, l’agence régionale de santé (ARS) francilienne a présenté mardi les premières mesures qui seront mises en place dès cet été pour éviter la catastrophe. 

Compte tenu du contexte de tensions sur les ressources humaines, les hôpitaux auront-ils la capacité de prendre en charge toutes les urgences vitales ? « Sur ce point, nous ne sommes pas inquiets », a toutefois rassuré Amélie Verdier, directrice générale de l’ARS, qui confirme néanmoins que les difficultés concernent « globalement l’ensemble du territoire francilien ». Les spécialités les plus en tension sont les urgences, la maternité, la pédiatrie, la psychiatrie, la gériatrie et le neurovasculaire.

D'où la déclinaison immédiate de plusieurs mesures concrètes. Le premier volet concerne la mise en place de parcours de soins « alternatifs » pour éviter les passages inutiles aux urgences. Côté patients, la campagne de communication nationale sur le bon usage des services d'urgences (« réflexe » 15) devrait démarrer dans les prochains jours. Elle sera relayée territorialement en Île-de-France, « notamment pour les populations précaires qui ont plus de difficultés pour appeler le 15 », précise Pierre Ouanhnon, directeur par intérim de l’offre de soins de l’ARS Île-de-France.

+15 euros par consultation non programmée régulée

Comme le recommandait la mission Braun, l'ARS prévoit de recruter des assistants de régulation médicale (ARM) supplémentaires mais aussi des médecins régulateurs afin de renforcer ce poste-clé dans les Centres 15 et les services d'accès aux soins (SAS), qui ont vocation à devenir la porte d'entrée pour les soins non programmés.

Plusieurs mesures financières de la mission Braun vont trouver une traduction rapide. Pour inciter les généralistes libéraux à accueillir dans leur cabinet des patients (hors patientèle habituelle) pour des consultations imprévues – à la demande de la régulation Samu/SAS – chaque consultation non programmée bénéficiera bien d'un supplément de 15 euros, une proposition forte de la mission flash. Quant aux gardes à l'hôpital, elles seront revalorisées de « 50 % pour susciter l'intérêt des médecins », une façon de reconnaître les contraintes attachées au travail de nuit. 

Tri des admissions

La régulation médicale préalable des admissions aux urgences par le Samu ou le SAS sera expérimentée dans plusieurs départements franciliens, où les consultations non programmées peuvent être réalisées dans des maisons médicales existantes ou d’autres structures pluripro (centres de santé, maisons de santé, CPTS). Mais l’ARS ne compte pas pour le moment « généraliser » cette régulation systématique, qui limiterait de facto l'accès aux urgences. La logique sera plutôt de « territorialiser cette décision », en se concentrant sur les territoires les plus complexes, après accord de l’ensemble des acteurs territoriaux, et en fonction des ressources médicales disponibles.

D’autres dispositifs seront renforcés, à l’instar des unités mobiles de télémédecine qui « permettront de déployer, à la demande du Samu, une infirmière avec du matériel de télémédecine », précise Pierre Ouanhnon. Quand un patient aura du mal à se déplacer, il appellera le 15 et « le Samu pourra envoyer cette unité pour que l’infirmière s'assure, par les constantes et un examen clinique, qu’il n’y a pas de grosses difficultés ». Autre mesure arbitrée, là aussi issue de la mission Braun : transporter les patients du Samu, non plus obligatoirement vers les services d’urgences, mais vers des structures d’exercice collectif ou de ville (MSP, cabinets libéraux, maisons médicales de garde).

Protocoles de coopération simplifiés

L’ARS prévoit aussi de simplifier l'application des protocoles de coopération entre professions de santé, sous coordination médicale. Depuis mars 2020, six protocoles de coopération ciblant des pathologies courantes simples de l’enfant et de l’adulte sont autorisés pour permettre aux professionnels délégués de prescrire traitements et examens. L'agence travaille sur ce projet avec les URPS infirmiers et kinés.

En aval des urgences, il s’agit de développer « l’hébergement temporaire » en sortie d’hospitalisation dans les Ehpad pour faire sortir plus tôt les patients des urgences, et libérer des lits. Le dispositif, également recommandé par la mission Braun, s’appliquera à des personnes « qui ne nécessitent plus d’hospitalisation mais qui, parfois, restent hospitalisées car on n’a pas analysé leur situation sociale et leur capacité à faire face au reste à charge en Ehpad. L’ARS les prendra en charge 30 jours en Ehpad », explique la DG de l'ARS francilienne Amélie Verdier.

Priorité aux maternités et aux Ehpad

L’ARS va enfin concentrer ses efforts sur les Ehpad et les maternités. Ces dernières bénéficient depuis lundi du soutien d’une cellule régionale d’appui pour faciliter l’orientation des parturientes et « sécuriser » la recherche d’une maternité. Objectif : leur trouver une place et « permettre un suivi médical et un accompagnement durant les grossesses des femmes en situation de grande vulnérabilité, souvent éloignées du soin », souligne Pierre Ouanhnon. Des médiateurs et des personnels administratifs seront recrutés pour libérer les sages-femmes de tâches qui ne relèvent pas du soin.

Des infirmiers et des aides-soignants seront recrutés plus tôt que prévu (entre 15 jours et un mois) pour renforcer les effectifs dans le secteur médico-social, grâce à la « diplômation anticipée » (le 20 juillet et non plus le 10 août) et un décret sur l'autorisation provisoire d’exercice. Recrutés comme titulaires, ils seront « mobilisables immédiatement » et seront « en situation de prendre des responsabilités », assure Amélie Verdier, qui a comptabilisé 387 infirmiers volontaires en l'espace de trois jours.


Source : lequotidiendumedecin.fr