La levée progressive des plans blancs, signe de la baisse de tension épidémique, soulage les médecins hospitaliers

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Publié le 04/03/2022
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Crédit photo : S.Toubon

Le gouvernement a annoncé hier la suspension du passe vaccinal et la fin du masque obligatoire dans les lieux publics sauf les transports, en raison de la diminution de la pression hospitalière. Or celle-ci se traduit également par le levée progressive des plans blancs qui avaient été activés sur tout le territoire en novembre et décembre derniers.

Ainsi, ce vendredi après-midi, l'ARS des Hauts-de-France a annoncé avoir informé les établissements de santé de la région, publics et privés, de la fin de l’activation généralisée des plans blancs à l’échelle régionale. « L’amélioration très significative de la situation épidémiologique – avec un taux d’incidence régional divisé par 8 en un mois de près de 4 000 à un peu plus de 500 – et la baisse continue du nombre de patients hospitalisés ne justifient plus la mise en place de ce plan à l’échelle régionale, explique l'ARS. Chaque établissement peut ainsi dès à présent prendre la décision de lever ou maintenir son plan blanc en fonction de la situation qui lui est propre. »

Décrue épidémique

En Île-de-France, où la décrue épidémique avait commencé un peu plus tôt, l'ARS avait, dès le 15 février dernier, autorisé les hôpitaux à lever les plans blancs. Les établissements de la région ont donc pu revenir au niveau 1 de leur plan de gestion de crise (plan de mobilisation interne), à condition de remplir certaines conditions, comme être en dessous du palier 1 en soins critiques (531 lits occupés par des malades Covid-19). C’est notamment le cas de tous les hôpitaux de l’AP-HP qui ont annoncé la levée du plan blanc le 28 février dernier, par la voix de leur directeur Martin Hirsch.

À cette date, il y avait 150 patients Covid en soins critiques à l’Assistance publique (contre 400 dans l’ensemble des établissements franciliens) et 639 hospitalisés (contre 1 771 à l’échelle de la région). Enfin, le flux d’entrées s’était « très nettement ralenti », selon l’AP-HP. Précisons également que la fin du plan blanc coïncide avec la fin du dispositif de majoration Covid des heures supplémentaires qui sera remplacé par des « heures supplémentaires majorées contractualisées » dès le 1er mars, a fait savoir le patron de l'AP-HP.

Concertation

Les méthodes utilisées par les ARS varient en fonction des régions. Contactée par « Le Quotidien », la FHF (Fédération hospitalière de France) explique, par exemple, que l’ARS PACA fait un suivi hebdomadaire par département des soins critiques et des hospitalisations conventionnelles, avec l’appui de médecins référents. « Quand ils voient un ralentissement dans la durée, ils prennent la décision de descendre d’un palier », précise la FHF qui ajoute que l’ARS tient compte des indicateurs suivants : taux d’incidence, positivité, taux d’occupation des lits, taux de patients Covid en réanimation, séquençage de variants, etc. Enfin, les établissements de la région suivent les consignes de l’ARS et ne baissent pas le niveau de plan blanc sans concertation. Ainsi, si cette ARS n’a pour le moment pas donné de consignes concernant la levée du plan blanc, « les reprogrammations ont repris depuis quelques semaines dans la région, surtout en chirurgie et en oncologie », indique la FHF.

D’autres ARS ont également encouragé les établissements de leurs territoires à lever leur plan blanc ces dernières semaines, à l’image de celle de Normandie, de La Réunion, de la Guyane ou des Pays de la Loire. Conséquence directe : les CHU d’Angers, le CH du Mans ou de Saint-Nazaire ou l’hôpital de Guérande ont appliqué la consigne la semaine dernière, mais aussi des établissements privés comme la polyclinique de l’Europe.

Contacté par « Le Quotidien », Florent Pouget, directeur de l’offre de santé de l’ARS des Pays de la Loire confirme que son agence a donné son feu vert le 1er mars en raison de « l'amélioration des indicateurs » de la circulation du Sars-CoV-2 et du taux d’occupation des lits des patients Covid. Au 1er mars, l’ARS faisait état de « 51 patients Covid + en réanimation, ce qui représente 20 % de nos capacités. En l’espace d’une semaine, le nombre de patients hospitalisés Covid dans la région a aussi baissé d’environ 10 % », poursuit Florent Pouget.

Tensions RH prégnantes

Les consignes régionales données par l’ARS Pays de la Loire lors de la réactivation du plan blanc, le 8 décembre dernier, n’ont plus vocation à être suivies par les établissements. L’agence avait par exemple recommandé de « déprogrammer 20 % des activités médicales et chirurgicales des établissements, en préservant les interventions urgentes et semi-urgentes pour éviter tout risque de perte de chances », indique Florent Pouget.

Si la tension a diminué sur le volet épidémique dans la région, « les tensions RH restent très prégnantes », poursuit cependant le directeur de l’offre de santé. C’est la raison pour laquelle le plan de mobilisation interne (niveau 1) n’a pas encore été levé dans la plupart des établissements de la région. Les établissements doivent donc « a minima mettre en place des cellules de veille à échéance régulière pour suivre au plus près l’activité médicale et chirurgicale et analyser les niveaux de tension en termes de RH », précise Florent Pouget. Et d’ajouter que la direction peut demander au personnel de faire des heures supplémentaires pour que les lits restent ouverts.

Moins de pression pour les soignants

Contacté par « Le Quotidien », le Pr Sadek Beloucif, président du Syndicat national des médecins, chirurgiens, spécialistes, biologistes et pharmaciens des hôpitaux publics (SNAM-HP), se réjouit de la levée du plan blanc à l’AP-HP, car « on revient à une situation normale puisqu’il n’y a plus de déprogrammations ». Les conditions de travail devraient également s’améliorer puisque « le plan blanc entraîne des astreintes et des sujétions particulières », poursuit le chef du service d’anesthésie-réanimation à l'hôpital Avicenne de Bobigny (93).

Présidente de l'Intersyndicat national des praticiens hospitaliers (INPH), la Dr Rachel Bocher se félicite également des levées progressives des plans blancs car ils « mettaient une pression extrême aux soignants ». Désormais, ceux-ci n’auront « plus besoin d’être présents et opérationnels 24h/24 », poursuit la psychiatre du CHU de Nantes qui rappelle que « les déprogrammations nous obligeaient à changer notre organisation hospitalière, c’était devenu intenable ». L’évolution de la situation entraîne donc « un répit, et non pas un soulagement, car cela ne résout pas les problèmes de fond de l’hôpital public qui est confronté à des difficultés de recrutement et d’attractivité », conclut la Dr Bocher.


Source : lequotidiendumedecin.fr