Soins critiques : l'Igas recommande 500 lits de réa et 400 médecins réanimateurs supplémentaires d’ici à 2030

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Publié le 14/12/2021
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Crédit photo : S.Toubon

La hausse prévisible inéluctable des besoins de réanimation (liée au vieillissement de la population) n’appelle pas nécessairement une augmentation massive du nombre de lits mais suppose en revanche de « renforcer la fluidité des parcours de patients », estime l’Inspection générale des affaires sociales (Igas), saisie d’une mission sur « l’offre de soins critiques, réponse au besoin courant et aux situations sanitaires exceptionnelles ».

Son rapport, non officiel mais consulté par « Le Quotidien », préconise de lever les tensions pesant sur les ressources humaines médicales et paramédicales et d’aménager une « élasticité maximale » des capacités de soins critiques.

Hausse limitée du capacitaire

Les premières recommandations consistent à harmoniser les pratiques (sur les décisions d'admission en réa des patients très âgés), à homogénéiser les taux d'équipements entre territoires (très variables) et à favoriser la fluidification des parcours des patients (en amont et en aval) aussi bien dans le public que dans le privé. L'Igas fait en effet le constat que le taux de recours aux soins de réanimation est étroitement corrélé au taux d’équipement, très disparate en France. Les 5 080 lits de réa sont « très inégalement répartis », peut-on lire. 

En première analyse, sur la base d’une « estimation maximaliste », l'Igas estime que l’accroissement attendu des besoins (notamment de patients âgés) pourrait « rendre nécessaire la création de 1 000 lits de réanimation supplémentaires d’ici à 2030 ». Mais en réalité, l’Igas divise cette évaluation par deux en proposant de miser sur « le développement de structures d’aval » adaptées aux patients qui connaissent des séjours prolongés en réa (une réduction de 10 % des journées réalisées équivaut à 500 lits de réa, résume l'Igas). La mission recommande in fine une hausse du capacitaire de « 500 lits maximum » d’ici à 2030, en les ajustant au plus près des besoins des territoires. Il s'agit ici de privilégier l’ouverture des lits « déjà autorisés mais fermés » en raison d'un manque de personnels paramédicaux. 

Alléger les tensions très fortes sur les effectifs

Précisément, pour l'Igas, un axe stratégique majeur vise à « lever les très fortes tensions » pesant sur les effectifs médicaux et paramédicaux dans les unités de réanimation. 

Le nombre élevé de postes vacants augmente la « pénibilité structurelle » de l’exercice professionnel en réa, lit-on. Pour « conjurer le risque de perte d’attractivité du métier », l’Igas suggère, s'agissant des médecins, d’amplifier dans les dix années à venir le mouvement d’augmentation du nombre de postes ouverts à l'internat pour les deux spécialités (MIR et MAR) formant au métier de réanimateur. En tenant compte du renouvellement des générations, des besoins croissants et de la tendance à la diminution du temps de travail médical, la mission estime qu’il faudrait former a minima « 40 réanimateurs supplémentaires par an » dans les dix ans – soit au total 400 médecins supplémentaires d’ici à 2030.

Et pour les équipes paramédicales soumises à un « turn-over élevé », l’Igas recommande « une reconnaissance financière du métier d’infirmier de réanimation, sans création d’un grade spécifique », via une prime de 100 euros net par mois (26 millions d’euros brut pour les 14 000 infirmiers concernés). Autre suggestion : muscler la formation initiale et continue, à travers un module de soins critiques dans le cursus initial de formation. L’inspection milite aussi pour le renforcement de la présence dans les services de réanimation de professionnels paramédicaux « autres que les IDE et les aides-soignants » (psychologues, kinés, ergothérapeutes).

Élasticité maximale de l’offre de soins critiques

Il est enfin recommandé d'aménager une « élasticité maximale » de l’offre de soins critiques pour répondre aux fluctuations saisonnières d’activité. Or, pour armer des lits supplémentaires rapidement, la principale contrainte concerne les ressources humaines et matérielles en renfort, comme l'a rappelé la crise. Le rapport propose ici de créer une « réserve de médecins et de soignants de soins critiques, pilotée par les ARS ».

Autre levier : la transformation des unités de surveillance continue (USC) en unités de soins intensifs polyvalents (USIP). Pour construire une filière intégrée et homogène, les USIP accolées aux unités de réa et équipées à l'identique pourraient à tout moment permettre l'augmentation rapide de l'offre en réanimation.

Enfin, l’activation de ces leviers d'extension de la capacité d'accueil en soins critiques devra s’accompagner d’une refonte des plans de préparation aux crises sanitaires, « dont les soins critiques sont aujourd’hui absents », regrette l’Igas. Le rapport recommande l’élaboration de plans de montée en charge de l’offre en soins critiques « dans chaque établissement ». Objectif : « connaître avec précision les différents paliers d’augmentation capacitaire » mais aussi leur impact sur le reste de l’activité de l’établissement.


Source : lequotidiendumedecin.fr