En pleine épidémie de grippe, le service des urgences de l’Hôpital privé des Pays de Savoie (HPPS) à Annemasse est contraint de fermer ses portes jusqu’à lundi 13 janvier au matin. La raison ? Deux hommes, dont un patient, ont violemment agressé le personnel soignant, causant six blessés, une forme de record.
« Les personnels du service sont dans un véritable état de choc psychologique », a souligné auprès de l'AFP une porte-parole de l'établissement. Les deux hommes ont été interpellés jeudi dans la journée, a indiqué pour sa part la préfecture de Haute-Savoie. Leur garde à vue a été prolongée.
Côte fêlée, fracture à la main, tuméfactions au visage…
D’après l’hôpital, les faits se sont produits mercredi 8 janvier dans la soirée, vers 23 heures, alors que l'un des deux mis en cause - tous deux « âgés d'une trentaine d'années » – attendait sur un brancard dans la zone de soins en tant que patient après sa prise en charge administrative. Venant de l'extérieur, son accompagnant est parvenu à se faufiler dans le service dont les portes étaient fermées avant de s'en prendre « verbalement et physiquement » à une infirmière, « mécontent » après une « dizaine de minutes d'attente » dans le cadre de la prise charge. « Il l'a poussée, l'a traînée par les cheveux » avant d'être rejoint par son complice qui était sur le brancard.
Une quinzaine de membres des urgences dont un médecin « est venu au secours de leur collègue », recevant des coups des deux hommes qui ont « ensuite pris la fuite » en voiture, selon la même source. Parmi les quatorze personnels impliqués, « tous en état de choc psychologique », six souffrent de « tuméfactions au visage » et pour certains d'entre eux « d'une côte fêlée, d'un traumatisme à une cheville ou d'une fracture à une main ». Ils devaient tous déposer plainte jeudi soir au commissariat de police d'Annemasse.
Série de violences envers les soignants
« Lundi matin, on réévaluera la situation pour potentiellement une réouverture » du service, a annoncé la direction de l'hôpital privé, qui compte 250 lits et dont les urgences enregistrent une centaine de consultations journalières.
Dans un communiqué conjoint, la préfecture de Haute-Savoie et l’agence régionale de santé (ARS) Auvergne Rhône-Alpes ont condamné « fermement » ces « actes d'agression » envers les personnels de santé comme ceux qui se sont déroulés en outre « entre le mois de décembre (dernier) et début janvier » sur le département.
« Début décembre, à l’Hôpital de Sallanches, deux personnels soignants avaient été violemment agressés (...) Le 6 janvier, un véhicule du SMUR appartenant au Centre hospitalier Annecy-Genevois a été caillassé lors d’une intervention », rappellent-elles aussi, en soulignant leur « soutien indéfectible » aux personnels soignants. Chaque jour, en moyenne, en France, ce sont 65 professionnels de santé qui sont victimes d’agressions physiques ou verbales, selon la même source.
Le ministre de la Santé Yannick Neuder, qui se rendra ce samedi à Annemasse, a exprimé sur X son effroi et apporté lui aussi son soutien indéfectible aux équipes soignantes, jugeant cet acte « inadmissible ».
Invité lors de la cérémonie des vœux de l’Ordre des médecins (Cnom), jeudi 9 janvier dans la soirée, le ministre de la Santé et de l’Accès aux soins n’a pas manqué de prononcer quelques mots au sujet de cette agression survenue à Annemasse, face à un parterre d’invités. Il a évoqué la nécessaire politique de « tolérance zéro » et affiché sa fermeté. « Ce n’est plus possible pour les soignants, les gendarmes, les policiers. J’aimerais que l’on puisse avoir de la protection vis-à-vis de nos soignants », a-t-il lancé, sans préciser s’il souhaitait légiférer très rapidement sur ce sujet. L’an passé, à l’occasion de la niche parlementaire réservée au groupe Horizons, l’Assemblée nationale avait adopté en mars, à l’unanimité, une proposition de loi (PPL) visant à renforcer la sécurité des soignants, notamment en prenant des dispositions favorisant le dépôt de plainte.
Dans un communiqué jeudi, l’institution ordinale a dénoncé avec vigueur ces actes de violence « inqualifiables qui compromettent la sécurité des professionnels de santé et nuisent gravement à la qualité des soins dispensés aux patients ». L’Ordre appelle le gouvernement à une protection renforcée des soignants.
Ce vendredi 10 janvier enfin, Samu-Urgences de France « condamne fermement les agressions commises à l’encontre du personnel soignant des urgences de l’Hôpital privé des Pays de Savoie à Annemasse ». Le syndicat juge que « ces violences verbales comme physiques sont devenues trop fréquentes et quasi quotidiennes. Elles mettent en danger non seulement la santé et la sécurité des équipes, mais également la qualité des soins prodigués aux patients ». Il appelle les pouvoirs publics à « réaffirmer une tolérance zéro », mais aussi à relancer concrètement les réunions interministérielles, en n’oubliant pas les praticiens hospitaliers, afin de bâtir des solutions de protection « pérennes ».
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