Malgré cinq appels au 15, le Samu conclut à une angine pour un jeune psychiatre en train de faire un AVC

Par
Publié le 15/12/2022

Crédit photo : S.Toubon

« Je ne vais pas porter plainte contre le Samu », confirme ce jeudi matin au « Quotidien » le Dr Anthony Armando. Le jeune psychiatre niçois tient toutefois à témoigner pour que son histoire édifiante soit relayée dans la presse et les réseaux sociaux. 

Dans la soirée du 19 septembre, pris par de violents maux de tête et une impossibilité de déglutir et de parler, le médecin – qui faisait un début d'AVC – a passé un premier appel au 15, où le régulateur ne comprenait pas ses propos ; c'est ensuite la voisine du psychiatre qui a décrit son cas à un médecin, ce dernier concluant à une angine.

Soins intensifs, IRM et thrombolyse

Inquiète, la compagne du Dr Armando, qui suivait l'histoire par messages, a rappelé le Centre 15 pour la troisième fois. L'assistant de régulation reste sur le diagnostic d'angine du médecin. Une amie du couple, étudiante en médecine, qui tente aussi de faire comprendre la gravité de la situation reçoit la même réponse. La voisine retente à son tour du côté des pompiers qui ont renvoyé au 15. Un cinquième appel aboutira à un cinquième refus du service.

Paralysé sur une partie du visage, le jeune psychiatre décide d'aller lui-même aux urgences par Uber. Trois heures après ses premiers symptômes, il sera enfin pris en charge aux urgences, puis traité par thrombolyse « qui ne pouvait être effectuée que jusqu’à 4 h 30 après le début des symptômes », dit-il. « Là, tout s’est accéléré, a-t-il expliqué à Nice Matin. On a compris que je faisais un AVC. Un neurologue m’a pris en charge, j’ai été transféré en unité de soins intensifs en neurologie, on m’a fait passer une IRM, puis traité par thrombolyse. » Grâce à une rééducation intensive, deux mois plus tard, Anthony a presque récupéré sa voix. 

Tensions sur le personnel

Interrogé par Nice matin, le Dr Pierre-Marie Tardieux, chef de pôle des urgences du CHU de Nice, a expliqué au journal local que « la régulation médicale n’était pas infaillible ». Son équipe – composée de cinq assistants de régulation médicale – répond à environ 1 200 appels par jour en moyenne, voire 2 000 appels en période de tension. Quatre médecins régulateurs (libéraux et hospitaliers) prennent les appels passés par les ARM. Touché par l'histoire du jeune psychiatre, l'urgentiste appelle la population à garder confiance en la régulation « qui essaie de faire au mieux » pour les patients. « Il est vrai que nous sommes confrontés à des tensions en personnel, explique-t-il. Nous avons besoin de plus d’ARM et de médecins régulateurs. »

Quant au jeune psychiatre, il souhaite surtout alerter sur le sort des patients victimes d'AVC dans le contexte actuel de tension sur les effectifs aux urgences. « Mon histoire n’est pas unique, j’ai pu échanger depuis avec d’autres personnes victimes d’AVC et qui ont rencontré des difficultés similaires à se faire entendre, a-t-il déclaré à Nice Matin. Je ne peux m'empêcher d’être irrité en me remémorant le texte sur la pancarte accrochée dans le service de neurologie où j’ai été hospitalisé : "Si vous avez des difficultés à parler, des céphalées, n’hésitez pas à appeler le 15". »


Source : lequotidiendumedecin.fr