Le bouleversement des usages se poursuit

Les femmes en quête de naturel pour leur contraception

Par
Publié le 25/06/2021
Article réservé aux abonnés
Le recours aux pilules progestatives seules s’accroît, à l’inverse des estroprogestatives combinées. L’arrivée d’une association d’un nouvel estrogène naturel (E4) et de drospirénone est attendue cette année.
La perte de confiance tend à s’aggraver

La perte de confiance tend à s’aggraver
Crédit photo : phanie

« Le désamour pour la pilule contraceptive, qui est apparu au début des années 2000 et s’est accentué en 2012, se poursuit, la perte de confiance tend même à s’aggraver », constate la Dr Brigitte Letombe (Lille). Les femmes sont aujourd’hui en quête de « naturel » et préfèrent une « micropilule » à une pilule estroprogestative. En témoignent les chiffres du Gers, le groupement pour l’élaboration et la réalisation de statistiques, sur l’évolution de la contraception en France entre 2011 et 2018. Au cours de cette période, la proportion de femmes prenant une contraception orale combinée est passée de 54,6 % à 38,9 %, soit une baisse de 29 %. Le recours aux patchs et aux anneaux vaginaux a lui aussi fortement baissé, respectivement de 47,8 % et 56,2 %, alors qu’à l’inverse, les pilules progestatives seules ont connu une forte hausse, de plus de 70 % (8 % en 2011, 13,7 % en 2018). De même, la plus large utilisation des DIU, « qui ne constituent pas toujours le meilleur choix chez les nullipares ayant notamment des cycles irréguliers ou des dysménorrhées », souligne la gynécologue, ne concerne que ceux au cuivre (plus 50 %), mais pas ceux au lévonorgestrel. De façon étonnante, la pose d’implants, hormonaux eux aussi, a augmenté de 28 %.

« Parallèlement, l’interruption volontaire de grossesse s’est banalisée et est devenue pour de nombreuses femmes une méthode de contraception », explique la Dr Letombe. Selon les données de la Drees, quelque 232 000 IVG ont été rapportées en 2019 (les derniers chiffres disponibles), niveau le plus élevé depuis 1990, après des années de croissance continue. Ce chiffre global masque de fortes disparités géographiques. Le taux moyen en métropole est de 15,6 IVG/1 000 femmes, variant de 11,8/1 000 dans les Pays de Loire à 22,9/1 000 dans la région Paca et de 28,2/1 000 dans les départements et régions d’outre-mer. « Les chiffres pour 2020 ne seront consolidés qu’à l’automne, mais les premières remontées font logiquement état d’une baisse, secondaire au contexte sanitaire avec baisse du nombre de grossesses », indique la Dr Letombe.

Pilules progestatives seules

Après le lévonorgestrel, dénué d’effet antigonadotrope, les génériques de Cérazette (désogestrel), qui n’a jamais été remboursée, ont été largement adoptés. Depuis 2020, Slinda, une nouvelle pilule progestative à base de drospirénone est disponible en schéma 24/4. Selon les études cliniques, elle présenterait l’intérêt de réduire le risque de spotting, mais cela reste à confirmer en pratique clinique. Autre atout : une action anti-androgénique et minéralocorticoïde, et donc a priori moins d’effets indésirables cutanés. À l’instar des autres pilules progestatives, quelle que soit la « génération » du progestatif, lorsque celui-ci est isolé, il n’y a pas d’augmentation du risque thromboembolique. Mais, point négatif, comme toutes les nouvelles contraceptions, elle n’est pas remboursée par la sécurité sociale ; toutefois son coût, de moins de 10 euros par mois, est souvent couvert par les forfaits des mutuelles.

De nouvelles commercialisations prévues

Une autre évolution attendue cette année, l’arrivée d’une pilule estroprogestative combinée, associant l’estétrol et la drospirénone, également en schéma 24/4, qui devrait être commercialisée sous le nom de Drovelis.

L’estétrol (E4) est un estrogène naturel fœtal ayant une action tissulaire sélective, variant selon le tissu (antagoniste du récepteur membranaire ER-alpha et agoniste du récepteur nucléaire ER-alpha). Cela lui confère notamment un profil d’hémostase plus favorable que celui des pilules de 2e génération et un impact mammaire et métabolique limité. Il a par ailleurs une empreinte neutre sur l’environnement.

On attend aussi, dans les prochains mois, l’arrivée d’un nouveau DIU au lévonorgestrel, Donasert, efficace pendant 6 ans.

Exergue : Aucune des nouvelles pilules contraceptives n’est remboursée par la Sécurité sociale

Entretien avec la Dr Brigitte Letombe, Lille

Dr Isabelle Hoppenot

Source : lequotidiendumedecin.fr