En 2021, la France comptait 15 millions de personnes âgées de plus de 60 ans et plus de 1,5 million de plus de 80 ans. Les projections de l’Insee prévoient qu’en 2060, ces chiffres s’élèveront respectivement à 24 et 5 millions. Une population en augmentation qui nécessite des prises en charge particulières. Avec l’âge, les affections deviennent de plus en plus nombreuses et de différentes sortes. D’où un besoin croissant en gériatres pour soigner mais aussi pour améliorer la prévention et maintenir l’autonomie des seniors.
Spécialité encore jeune, reconnue officiellement comme telle en 2004, la formation en gériatrie est sanctionnée par l’obtention d’un diplôme d’études spécialisées (DES) depuis 2017. Cette branche de la gérontologie connaît une croissance constante depuis 2012. À cette date, on comptait 1 249 gériatres en exercice alors qu’on en dénombre 2 645 en 2023. Ces spécialistes sont majoritairement salariés dans des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) ou dans les hôpitaux que ce soit dans les unités de gériatries, les unités de soins de longue durée, les services de soins palliatifs ou encore les soins de suite et de réadaptation.
Une spécialité transversale
Tout comme la médecine générale, la gériatrie adopte une approche globale des pathologies des seniors. En tant que médecins spécialistes de la vieillesse, les gériatres sont formés pour prendre en charge et traiter les maladies liées à l’âge. « Il s’agit de faire attention notamment aux fragilités gériatriques comme des troubles de la marche, la dénutrition ou encore des troubles cognitifs », explique la Dr Agathe Lissajoux, gériatre à Lorient. Cette spécialité implique donc pour ces médecins d’avoir des connaissances de base dans l’ensemble des spécialités médicales, « mais dès que ça devient plus compliqué, on fait appel aux spécialistes », précise la médecin. La pratique de la gériatrie balaye un large spectre de pathologies : les affections physiques, mentales fonctionnelles et sociales, les maladies chroniques, les soins de réhabilitation, de prévention et de fin de vie.
Du fait de leurs fragilités et de la complexité de leurs pathologies, les patients suivis en gériatrie requièrent souvent une offre sanitaire et médico-sociale évolutive qui doit s’adapter à leurs besoins. D’où la nécessité pour les gériatres de coordonner les soins et de s’appuyer sur une équipe pluriprofessionnelle organisée dans le cadre d’un réseau de soins. Cette organisation en réseau fait alors appel à des professionnels paramédicaux comme des infirmiers, des kinésithérapeutes, des ergothérapeutes et des psychomotriciens pour rétablir la mobilité après une chute par exemple.
Les soins en gériatrie ne se limitent pas à la prise en charge des patients âgés, il faut aussi conseiller et accompagner les familles
« Nous sommes aussi en contact systématique avec les proches et les aidants pour notamment compléter les interrogatoires et avoir une meilleure idée des besoins des patients », ajoute la Dr Lissajoux. Les soins en gériatrie ne se limitent pas à la prise en charge des patients âgés, il faut aussi conseiller et accompagner les familles. Conscients de l’environnement du patient, les proches fournissent des informations complémentaires aux médecins et peuvent aider à la prise de décision quand le cas est compliqué. À la sortie de l’hôpital, ces aidants gèrent le quotidien, les démarches administratives et la mise en place des aides. Le gériatre intervient alors comme un conseiller sur les solutions à mettre en place pour prendre en compte les besoins du patient et de sa famille.
Une pratique en évolution
Pour répondre aux besoins grandissant de soins en gériatrie, de nouvelles mesures sont mises en place pour améliorer les modes de prise en charge. Des métiers émergent comme les infirmiers en pratique avancée en gériatrie. Ils permettent de réduire la charge des praticiens avec comme mission le dépistage des fragilités, l’adaptation des soins et la gestion du suivi qui ne nécessitent pas l’intervention d’un médecin. D’autres initiatives sont prises comme la généralisation des équipes mobiles en gériatrie. Ces équipes formées de gériatres, d’infirmier(e)s et d’une ou plusieurs secrétaires médicales sont formées pour des évaluations gériatriques et des interventions dans et hors de l’hôpital, en Ehpad ou dans le cadre de l’hospitalisation à domicile.
Malgré ces volontés d’amélioration, des problèmes persistent. Une enquête de la Société française de gériatrie et de gérontologie en 2023 montrait que 35 % des unités gériatriques étaient touchées par des fermetures de lits en France et dénonçait une dégradation des soins. D’autres problèmes spécifiques sont aussi posés par les soignants : « Il y a parfois un manque de formation des soignants autour des questions liées à la gestion de la fin de vie, regrette Agathe Lissajoux. Nous sommes souvent confrontés à des problématiques sur l’acharnement thérapeutique ou encore aux demandes des familles et nous n’avons pas toujours les bons outils pour y répondre ».
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