À Steenvoorde, la maison de santé se mobilise contre l'obésité infantile

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Publié le 15/07/2022
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Entretiens individuels et ateliers collectifs ludiques avec les enfants et parents volontaires : pour prévenir l'obésité infantile, les professionnels de la maison de santé pluridisciplinaire (MSP) de Steenvoorde, dans le Nord, se mobilisent autour d'un programme d'éducation thérapeutique du patient, une expérience qui a soudé l'équipe.
L'approche transversale entre médecin, infirmier et kiné a permis de déceler des blocages plus profonds chez plusieurs enfants

L'approche transversale entre médecin, infirmier et kiné a permis de déceler des blocages plus profonds chez plusieurs enfants
Crédit photo : DR

À la maison de santé « La Bergerie » de Steenvoorde (Nord), on prend très au sérieux l’obésité infantile, particulièrement répandue dans le département. L’équipe, composée de deux médecins généralistes, deux kinés, une infirmière et une pharmacienne s’est embarquée dans un programme d'éducation thérapeutique ambitieux : « Moi, mon corps, mes envies », destiné aux 7-11 ans.

Intervenir tôt pour éviter les complications

La genèse du projet date de 2019 mais les fondations sont plus anciennes. La MSP, regroupant en tout 17 professionnels de santé, dont six généralistes, a fait de l'éducation thérapeutique du patient (ETP) sa priorité depuis dix ans. Des soignants volontaires y avaient déjà été formés dans le domaine du diabète et de l'arrêt du tabac. Une autre formation sur l'obésité infantile a été proposée en 2019.

Remplaçant en 2015 puis intégré à la structure en 2019, Jérémy Bachetti, masseur-kinésithérapeute, a été l'un des six volontaires. « Ce sujet me tient à cœur », témoigne-t-il. Dans ce département, la prévalence du surpoids et de l’obésité est plus élevée que dans le reste de la France, selon la dernière enquête ObÉpi-Ligue contre l’obésité publiée en juin 2021. Selon le kiné, cette maladie chronique concernerait 25 à 30 % de la patientèle de la maison de santé. « Je vois les difficultés au quotidien de ces personnes et une souffrance, témoigne Jérémy Bachetti. C'est plus difficile de faire changer les habitudes lorsqu'on a déjà 55-60 ans. Alors, en intervenant dès le plus jeune âge, cela permet d'éviter les complications comme le diabète ou les problèmes cardiaques à l'âge d'adulte ».

Six ateliers ludiques

Le programme « Moi, mon corps, mes envies » a été concocté par toute l'équipe. Au menu, six ateliers de deux heures chacun ont été organisés chaque samedi et proposés à six enfants sélectionnés par les médecins traitants de la MSP, selon des critères précis (IMC, courbe de croissance, poids, rebond d'adiposité).

Animé à chaque fois par un binôme, le premier atelier permettait de faire connaissance avec l'enfant en présence des parents. Dans les quatre ateliers suivants, chaque binôme, seul avec l'enfant, abordait l'activité physique, l'alimentation et les famille d'aliments, les cinq sens et l'estime de soi. Enfin, le dernier atelier commun avec les parents visait à expliquer comment accompagner leur enfant face à l'obésité. Sous la forme de jeux, de pièces de théâtre, les ateliers étaient conçus de façon ludique. Un mois après la fin de cette étape, des entretiens individuels ont été organisés « pour voir si les conseils ont été intégrés ».

Forfait de 300 euros par enfant

Ce travail collégial a permis de souder davantage encore l'équipe pluriprofessionnelle. La « vision transversale » entre un médecin, un infirmier, un kiné a permis par exemple de déceler « certains blocages plus profonds » pour trois enfants sur six. « Pour un enfant de 11 ans qui avait un mal-être, rapporte Jérémy Bachetti, le médecin traitant a été informé et a pu proposer des consultations plus approfondies ». Pour Aurélie Declerck, pharmacienne de la MSP, « cette collaboration a permis de renforcer notre discours commun, de montrer aux familles qu'il y a des professionnels de santé accessibles vers qui ils peuvent se tourner ».

Pour participer à ce programme, chaque professionnel volontaire a touché un forfait de 300 euros par enfant, versé par l'agence régionale de santé (ARS). Cela représentait au total 1 800 euros pour 42 heures de travail minimum, « soit 43 euros de l'heure », calcule Jérémy Bachetti. « Ce n'est pas assez rémunérateur pour un médecin qui touche 100 euros de l'heure, reconnaît la pharmacienne. Mais on ne fait pas cela pour l'argent. L'important est d'avoir planté une petite graine pour permettre aux enfants d'avoir des réflexes sur l'activité physique ou l'alimentation ». Interrompue pendant la plus forte vague du Covid, cette opération de sensibilisation des enfants devrait reprendre en 2023. 

Loan Tranthimy

Source : Le Quotidien du médecin