Santé publique France alerte sur les risques des « répétitions rapprochées de vagues de chaleur »

Publié le 10/08/2022

Crédit photo : GARO/PHANIE

Le troisième épisode caniculaire de l’été, qui a commencé le 31 juillet au niveau national, et a principalement concerné les régions méditerranéennes ces derniers jours, s’étend désormais sur le sud-ouest en remontant le long de la façade atlantique, a averti Météo France dans un bulletin mardi soir. Contrairement à l'été 2003, 2022 est marquée par une succession d'épisodes caniculaires. Or ces « répétitions rapprochées de vagues de chaleur » enregistrées depuis mai ne sont pas sans conséquences sur l'organisme, alerte Santé publique France (SPF), même si celles-ci sont encore mal connues.

« Les gens sont fatigués », rapporte également le Dr Jean-Paul Hamon, médecin généraliste à Clamart (Ile-de-France), ancien président de la FMF. En raison de la chaleur, « ils dorment mal » et ne parviennent pas à récupérer des efforts fournis par leur organisme pour maintenir le corps à une température interne fonctionnelle. Cette fatigue peut même relever de « l'épuisement chez les personnes âgées ou celles qui prennent des diurétiques ou des neuroleptiques, car leur système de thermorégulation fonctionne mal », explique-t-il.

Pour autant, difficile de déterminer les risques d'une telle situation, tant elle est inédite, relève Isabelle Bonmarin, médecin en charge de la prévention canicule chez SPF. « C'est la première fois que ça survient en France, note-t-elle. En 2003, ça a duré longtemps mais ce n’était qu’une vague. Puis on a eu des années avec plusieurs vagues, mais espacées. »

Oreiller au congélateur

Les données de SPF font état d'une légère augmentation des recours aux urgences, notamment pour les personnes de plus de 75 ans. Les chiffres sur une mortalité éventuelle ne sont pas encore connus. Les professionnels de santé observent une diminution des coups de chaleur, liés selon eux à une entrée dans les usages des recommandations sanitaires, à savoir s'hydrater et rester au frais. « J'ai même un patient qui met son oreiller au congélateur », sourit Jean-Paul Hamon.

À l’échelle du CHU de Nice, « on n’a pas vu une surmortalité massive », indique le Pr Olivier Guérin, chef du pôle gériatrie, qui appelle toutefois à rester prudent. « On sait que l'intensité de la chaleur et la durée de la vague jouent. Mais pour la succession des épisodes, on ne sait pas vraiment ».

Les personnes très âgées pourraient souffrir ensuite d'une perte d’autonomie, avance le Pr Pierre Hausfater, chef de service des urgences de la Pitié Salpêtrière à Paris, qui rapporte par exemple une augmentation ces dernières semaines de prises en charge pour chute à domicile.

Toutefois, l'urgentiste veut croire à « une acclimatation » possible des corps pour les moins âgés. « Quand vous débarquez dans un pays très chaud, vous allez énormément transpirer les premiers jours, et au bout de quelques semaines moins, parce que vos cellules vont s'adapter », dit-il.

Angoisse qui monte

Mais au-delà de la fragilisation physique, des médecins observent un accroissement de la fatigue mentale. Claude Bronner, médecin généraliste à Strasbourg, l'assure : « le problème principal est psychologique ».

« Il y a une angoisse qui monte face à une situation qui s’aggrave de plus en plus », précise le Dr Bronner, vice-président de l'Union Généraliste, une branche de la fédération des médecins de France. Il pointe l'effet anxiogène du traitement médiatique de la canicule. « On est sur un mode très catastrophique », estime-t-il.

Benoît Maydat, psychologue à Montélimar (Drôme), où des records de température ont été battus ces dernières semaines, observe lui aussi la place centrale qu'a pris la météo hors norme dans ses consultations. Ces phénomènes météo affectent plus particulièrement les personnes souffrants de troubles anxieux et dépressifs, note-t-il.

« Un patient disait en consultation : ça tape sur le système, rapporte-t-il. Après le covid et la guerre en Ukraine, cela met l’appareil psychique dans le rouge ». Les incendies, nombreux dans sa région, et la sécheresse qui a causé des pénuries d'eau dans des villages ont « ravivé de peurs primaires comme la peur de manquer », explique le psychologue.

Avec AFP


Source : lequotidiendumedecin.fr