Accompagner les femmes atteintes de cancer

Des ateliers pour aider à restaurer l'image de soi

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Publié le 05/03/2018
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Crédit photo : PHANIE

« Quand on est hospitalisée on ne pense pas trop à soigner son apparence… Cet atelier m’a fait beaucoup de bien et m’a redonné le moral. Or, avoir le moral fait partie de la guérison ! » Mélanie, atteinte d’un cancer, est hospitalisée pour quelques semaines à l’hôpital Saint-Louis (Assistance Publique – Hôpitaux de Paris, AP-HP).

Avec 9 autres patientes, elle vient de participer à un atelier « belle & bien », organisé par l’association éponyme dans une ambiance chaleureuse et bienveillante. La jeune femme a pu souffler durant deux bonnes heures, prendre un peu de distance avec un quotidien difficile… Et découvrir quelques bons gestes pour prendre soin d’elle.

Engagement bénévole

« On dit que l’apparence ne compte pas, que c’est superficiel… Mais c’est quand on la perd, quand on ne se reconnaît plus dans le miroir que l’on réalise à quel point cela fait partie de soi ». Christine, esthéticienne professionnelle, est bénévole pour « belle & bien » depuis 6 ans et co-anime avec enthousiasme ces ateliers. Ce mardi après-midi, elle est en équipe avec Suzanne, esthéticienne également, et Isabelle, coordinatrice, troisième actrice de ce trio qui fait en sorte que tout se déroule dans les meilleures conditions. « Préparer la salle, accueillir les patientes, les mettre en confiance ou les aider pour les gestes compliqués… Depuis 10 ans, je ne me lasse pas de prendre part à ces sessions. » Il faut dire que ceux-ci semblent apporter un réel bien-être aux participantes, avec, à la clef, un sentiment d’utilité – et de « faire quelque chose qui a du sens » – pour les bénévoles.

Image intérieure

En effet, les ateliers ont largement fait la preuve de leur utilité. Intégrée au programme international « look good feel better », créé aux États-Unis en 1989, l’association se déploie en France depuis 2002. En 15 ans, près de 24 000 femmes ont bénéficié de ce programme grâce à l’implication des bénévoles – 160 aujourd’hui – et des établissements hospitaliers. En 2002, 2 établissements étaient partenaires : ils sont désormais 30. « C’est bien mais nous devons continuer à développer nos actions, souhaite la directrice de l’association, Róisín Dockery. Si je pouvais formuler un vœu, c’est que cette formule puisse faire partie intégrante du parcours de soins. » Car aider les femmes à retrouver estime et confiance en soi, à un moment difficile de leur existence, n’est pas anodin, loin de là. « Perdre ses cheveux, ses sourcils, ses cils, transforme complètement le visage, témoigne une patiente. Apprendre une technique pour redessiner un sourcil et illuminer ainsi le regard est alors loin d’être anecdotique. » « Quand on est malade, il ne s’agit pas de répondre aux diktats de la mode par coquetterie, mais juste de se "remettre à niveau" », complète Michèle Ancelin, psychothérapeute.

Élégance, fraîcheur, plaisir, rêve… Pour accompagner les patientes dans cette parenthèse de bien-être, la méthode est rodée : une séance de deux bonnes heures, qui se découpe en plusieurs étapes indispensables pour une mise en beauté. Nettoyage et préparation de la peau, conseils pour se doter d’un teint unifié, explications pour le maquillage des cils, des paupières, des lèvres… Jusqu’à la touche de blush, à estomper sur les pommettes : expertes, les esthéticiennes partagent leurs bonnes recettes, tout en accompagnant chaque patiente avec une grande attention. À mesure que l’après-midi avance, celles-ci osent se détendre, se faire une beauté et partager leur ressenti avec leurs voisines, en riant. Les conseils sont professionnels ; les produits - donnés à chacune dans une trousse individuelle -, de qualité ; les effets, remarquables.

Partage

L’équipe de « belle & bien » est aux petits soins, tout en respectant les liens qui se tissent entre les participantes. « Se retrouver entre malades, dans un cadre convivial et "léger", est très appréciable, témoigne Sylvie. Quel que soit notre cancer, on partage beaucoup de choses et c’est réconfortant de réaliser que l’on n’est pas seule. » S’éloigner un peu des couloirs de l’hôpital, rencontrer des « alter-ego » – ce qui n’arrive pas tant que ça quand on est suivi en ambulatoire – et vivre un moment de détente se révèle revigorant. À l’hôpital Saint-Louis, l'atelier peut être conseillé par une infirmière ou une psychologue, et l’inscription se fait à la Maison d’information en santé. « Ce lieu d’écoute et d’information nous permet de proposer des soins de support, en complément des soins onco-hématologiques, précise Nathalie André, accompagnatrice en santé au sein de cette Maison. Le bien-être en fait partie, et les ateliers comme celui-ci "reboostent" les patientes. » À la sortie, les visages sont rayonnants. Mais ce qui s’est joué, incontestablement, va bien au-delà du maquillage.

Pour en savoir plus sur l’association « belle & bien » : http://www.bellebien.fr/

Anne-Lucie Acar

Source : Le Quotidien du médecin: 9645