Prise en charge de la leucémie lymphoïde chronique

Une situation complexe en pleine crise sanitaire

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Publié le 25/09/2020

Si la circulation du SARS-CoV-2 continue de placer les patients à risque en état d’alerte, c’est particulièrement le cas des personnes atteintes de leucémie lymphoïde chronique (LLC). De plus, alors que leur prise en charge évolue grâce à l’arrivée de nouvelles options thérapeutiques, elle tend aussi à se complexifier…

Crédit photo : phanie

Le mois de septembre, dédié aux cancers du sang, est l’occasion de lever le voile sur la situation des 45 000 patients atteints de LLC en France. Avec 4 500 nouveaux cas par an, la LLC touche souvent des sujets âgés de72 ans d’âge médian. « Deux tiers de ces patients, atteints de LLC de stade A (asymptomatique) n’ont pas besoin de traitement mais uniquement d’un suivi particulier », explique la Dr Anne-Sophie Michallet, hématologue au Centre Léon Bérard. Néanmoins, la moitié d’entre eux seront ensuite traités lors de l’évolution de la maladie. Ainsi, seul un tiers des patients atteints de formes évoluées (stade B et C) et symptomatiques (présence de ganglions, insuffisance médullaire…) reçoit un traitement au diagnostic.

Vigilance face au Covid-19

« Les patients avec une LLC de stade A ont un réel déficit immunitaire, même si la maladie n’est pas active », explique la Dr Michallet. Pour ces patients ne devant pas sortir et venir à l’hôpital en pleine période de circulation du Covid-19, 300 téléconsultations (débutant peu après le début du confinement) ont été spécifiquement réalisées. Ce dispositif est toujours appliqué, en alternance avec des consultations physiques. De plus, « les patients ont une culture de la vigilance virale, de par leur fragilité. Nous avons ainsi eu très peu de cas gravissimes », constate la Dr Michallet.

Les associations de patients (Soutien et information à la leucémie lymphoïde chronique [SILLC], Association française des malades du myélome multiple [AF3M], France Lymphome Espoir) ont également réagi. « L’environnement très perturbant de cette période — multiples injonctions, fake news, avis évolutifs et parfois contradictoires des autorités — a créé des comportements inadaptés auprès des patients, explique Christian Puppinck, président de l’association SILLC. Tant au plan médical que psychologique, nous avons dû les apaiser et leur donner des explications ». Ainsi, quatre webinars explicatifs ont été créés, qui ont rassemblé plus de 800 personnes. Un éclairage sur le droit du travail, au gré des dispositifs successivement annoncés (chômage partiel, éviction du lieu de travail), a également été nécessaire.

Une stratégie thérapeutique individuelle et ambulatoire

Pour établir la stratégie thérapeutique à adopter en fonction du type de LLC, la connaissance des facteurs pronostiques est essentielle. « On doit identifier le statut mutationnel et les anomalies cytogénétiques du patient, afin de pouvoir le classer en risque favorable (délétion d’un fragment du chromosome 13q), intermédiaire (délétion 11q ou trisomie 12) ou élevé (délétion 17p ou mutation TP53) ».

Sur le plan thérapeutique, les thérapies ciblées orales ont bouleversé dès 2014 la prise en charge des patients à haut risque, répondant mal à l’immunochimiothérapie utilisée depuis 2008. « Actuellement, la stratégie thérapeutique en première ligne de traitement est complexe puisque s’affrontent les thérapies ciblées, administrées en continu et à vie, et l’immunochimiothérapie », explique la Dr Michallet. Récemment, l’association d’une thérapie ciblée à un anticorps anti-CD20 a également été homologuée en Europe.

L’objectif est donc de mettre le plus possible de malades en essais thérapeutiques. D’ailleurs, « 77 % des patients sont prêts à s’y engager pour faire progresser la science », rapporte Christian Puppinck dans une récente enquête réalisée par son association.

Quant aux rechutes, elles sont presque toutes traitées par thérapies ciblées, avec une prise en charge ambulatoire. Néanmoins, celles-ci présentent des toxicités (hématologiques, cardiologiques, saignements, HTA, rénales…) qui peuvent nécessiter des adaptations ou des réductions de doses, voire parfois des arrêts. « On a dû modifier le parcours de soins et sécuriser les patients hors des murs de l’hôpital afin d’anticiper les effets secondaires, à travers différents programmes. C’est essentiel pour l’observance », précise la Dr Michallet. À l’avenir, le défi des thérapies et associations innovantes sera de retarder la rechute tout en améliorant la tolérance.

D’après la conférence de presse du laboratoire Astra Zeneca, le 10 septembre 2020

Karelle Goutorbe

Source : lequotidiendumedecin.fr