Pacemaker dans l'insuffisance cardiaque

À la recherche du site optimal de stimulation

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Publié le 21/03/2019
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Lors du traitement de l'insuffisance cardiaque avec bloc de branche gauche, les cardiologues interventionnels positionnent généralement les sondes d'un pacemaker sur la paroi latérale basale du ventricule gauche, conformément aux recommandations. « Empiriquement c'est là que la sonde permettra une resynchronisation optimale » explique au « Quotidien » le Dr Serge Boveda, président du groupe rythmologie - stimulation cardiaque de la société Française de cardiologie. Contacté depuis le congrès de l'association européenne du rythme cardiaque (EHRA), à Lisbonne, le Dr Boveda, qui exerce à la clinique Pasteur de Toulouse, a assisté à la présentation de nouveaux résultats à même de remettre en question cette pratique.

Des études antérieures avaient montré qu'il était possible d'améliorer la réponse au pacemaker en guidant la pose des sondes du stimulateur cardiaque par imagerie multimodale. Cette méthode d'exploration reste toutefois trop complexe et coûteuse pour être employée en routine. « L'étude pilote ElectroCRT présentée à Lisbonne expérimente une autre approche : le positionnement des sondes des pacemakers dans les régions anatomiques où le délai électrique entre le début et la terminaison du QRS sur l'électrocardiogramme de surface est le plus important détaille le Dr Boveda. C'est la sonde du pacemaker elle-même qui sert à mesurer ce délai. »

Le délai électrique plus fiable que le délai mécanique

Les auteurs de l'étude ont recruté 122 insuffisants cardiaques, qu'ils ont aléatoirement répartis entre un groupe chez qui la sonde a été posée dans la région du myocarde qui présentait le plus gros retard de contraction mécanique (repéré par l'imagerie), et ceux chez qui la sonde a été posée dans la région où la conduction électrique présentait le délai le plus important.

Au bout de 6 mois de suivi, l'augmentation de la fraction ventriculaire gauche était significativement plus importante dans le groupe « délai électrique » (+11 %) que dans le groupe « délai de contraction » (+7 %). La différence reste significative une fois les résultats ajustés pour le sexe, l’âge et la fraction d'éjection à l'inclusion. Les auteurs rapportent que l'opération d'implantation prend 19 minutes de plus quand elle est guidée par la mesure du délai électrique, sans que cela n'ait d'effet négatif sur le risque de complication.

Un tiers de patients non répondeurs

Selon la littérature, environ 30 % des patients ne répondent pas à la pose d'un stimulateur cardiaque de ré synchronisation. Le Dr Boveda espère qu'un positionnement plus pertinent des sondes permettrait de réduire ce pourcentage. « Il restera malgré tout toujours une contrainte majeure : celle de l'anatomie du patient qui peut ne pas être adaptée au positionnement optimal de la sonde ventriculaire gauche. »

Selon la société européenne de cardiologie, ces nouvelles données pourraient modifier les pratiques. Toutefois, les résultats d'Electro-CRT ne sont pas encore suffisants pour justifier une modification des recommandations. Une nouvelle étude randomisée, DANISH-CRT, enrôle en ce moment un millier de patients. « Elle a été spécifiquement conçue pour fournir des éléments pouvant aboutir à faire évoluer les recommandations », précise le Dr Boveda.

Damien Coulomb

Source : Le Quotidien du médecin: 9734