Richard Ramos, député Modem du Loiret

« J’ai très vite réalisé que nous ne mangions pas tous pareil »

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Publié le 17/02/2023
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Le 24 novembre 2022, une journée parlementaire était consacrée à l’éducation à l’alimentation à l’école, à l’initiative du député Richard Ramos (Loiret). Comment apprendre aux enfants à mieux manger ? Comment faire du repas à la cantine un temps d’éducation ? Autant de questions cruciales dont il a été question.
Richard Ramos

Richard Ramos
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Encourager l’enfant à se questionner sur ce qu’il mange

Encourager l’enfant à se questionner sur ce qu’il mange
Crédit photo : ANNA HYMAS/SPL/PHANIE

L’alimentation contribue à la prévention des maladies. Donner du temps scolaire et périscolaire pour éduquer au « mieux manger » a donc du sens, pour le député Richard Ramos (6e circonscription du Loiret), impliqué sur plusieurs dossiers concernant l’alimentation.

LE QUOTIDIEN : Pourquoi êtes-vous impliqué pour l’éducation alimentaire ?

RICHARD RAMOS : J’ai toujours été naturellement intéressé par ce que l’on mange et d’ailleurs, plus jeune, je voulais être cuisinier. Venant d’une cité ouvrière, j’ai très vite réalisé que nous ne mangions pas tous pareil et que les inégalités sociales se reflétaient dans les inégalités alimentaires. D’ailleurs, la courbe de l’obésité suit de près celle de la pauvreté. Il suffit enfin de regarder les étiquettes alimentaires pour se rendre compte qu’il y a davantage d’ingrédients non souhaitables dans les aliments premier prix.

Quel peut-être le poids de la cantine scolaire dans l’éducation au bien manger ?

À la cantine scolaire, tous les enfants sont sur un pied d’égalité. Or, la cantine scolaire, c’est 144 repas annuels : ce n’est pas rien ! De plus, l’école, qui contribue à forger la pensée de l’enfant, peut l’encourager à se questionner sur ce qu’il mange.

Expliquer est important, mais l’information ne suffit pas pour s’approprier un concept, aussi, que proposez-vous ?

Il faut que l’école permette à l’enfant de faire lui-même, par exemple en intégrant la cantine au temps scolaire. On pourrait imaginer qu’une classe différente aille tous les jours aider à la préparation des repas et à débarrasser les tables. C’est une question de bon sens : les adultes qui aiment manger et font le choix de la qualité, le doivent toujours à un proche qui leur a montré comment faire. On n’apprend pas en se faisant servir ! Autre piste : lorsqu’il y a besoin de (re)bâtir un espace de restauration, il faut arrêter de cacher la cuisine et au contraire, la placer au milieu des enfants qui mangent.

Quelles autres mesures utiles pourraient être mises en place ?

J’ai discuté avec le ministre de l’Éducation nationale, Pap Ndiaye, de l’opportunité d’avoir un temps scolaire dédié au déchiffrage des étiquettes alimentaires (au collège), et cette mesure semblait l’intéresser. Mais il y a d’autres pistes : pourquoi ne pas enlever un repas de la cantine pour le remplacer par un repas dans un restaurant local où les élèves participeraient à sa préparation ? Cela dépend du Maire pour la restauration dans les écoles élémentaires, du Président du Conseil Départemental pour les collèges et du Président de Région pour les lycées. C’est d’ailleurs aussi envisageable durant le reste du temps périscolaire et pas seulement au moment du repas.

Et comment agir sur la qualité des repas ?

Plutôt que de donner de la viande tous les jours – ce qui est coûteux et injustifié – autant avoir un repas végétarien hebdomadaire et utiliser l’argent qui n’a pas été dépensé pour la viande, dans des aliments plus qualitatifs. C’est une des raisons pour lesquelles j’ai porté le repas végétarien et les produits locaux, via la loi Egalim : il est maintenant obligatoire d’avoir des repas intégrant 50 % de local dont 20 % de bio. La loi Egalim 2 a plutôt porté sur l’amélioration des rapports des producteurs avec la grande distribution, mais cela a aussi son importance car il n’y a pas de bonne alimentation sans une agriculture saine, durable et accessible à tous.

Pensez-vous à d’autres mesures ?

Lorsque la restauration collective est concédée – une entreprise externe vient livrer, il y a juste à réchauffer – et non faite en régie (cuisson sur place, souvent meilleure), il est judicieux d’imposer encore plus de produits locaux dans la rédaction du cahier des charges d’appel d’offres. Je propose aussi d’interdire que le diététicien qui planifie les repas soit celui de la société qui livre les repas. Il me semble enfin urgent de retirer les produits ultra-transformés et d’interdire les additifs alimentaires, sur lesquels pèse un doute en matière de santé publique.

Exergue : « L’école peut encourager l’enfant à se questionner sur ce qu’il mange »

Propos recueillis par la Dr Nathalie Szapiro

Source : Nutrition