Démembrement du diabète de type 2

L’espoir d’une médecine personnalisée

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Publié le 24/03/2023
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Lors du congrès de la SFD cette année, une session sera consacrée aux « Mille visages du diabète de type 2 ». De nombreux travaux sont menés pour tenter d’établir une stratification de la pathologie avec à clé, peut-être dans quelques années, des propositions individualisées de traitement.
Stratifier pour cibler l’étiologie spécifique

Stratifier pour cibler l’étiologie spécifique
Crédit photo : GARO/PHANIE

Sera-t-il un jour possible de proposer une médecine personnalisée aux patients ayant un diabète de type 2 (DT2) ? « C’est une perspective encore un peu éloignée. Mais on voit qu’il y a de plus en plus d’études visant à proposer une stratification de cette pathologie et peut-être, d’ici quelques années, sera-t-il possible d’individualiser les traitements en fonction de l’endotype du DT2 », indique le Pr Jean-François Gautier, le président de la Société francophone du diabète (SFD).

Dans les diabètes autres que le type 2, il existe des marqueurs biologiques étiologiques. « Dans le diabète de l’enfant, on retrouve les anticorps qui signent l’auto-immunité. Si le diabète est secondaire à un désordre endocrinien, on peut doser une sécrétion excessive d’hormones antagonistes de l’insuline. Le diagnostic étiologique du diabète dans une pancréatopathie se fait par l’imagerie pancréatique. Il existe également des diabètes monogéniques (comme les diabètes Mody) dont le diagnostic se fait par le génotypage qui en retrouve l’origine », détaille le Pr Gauthier (lire aussi p. 5).

Pas de marqueur identifié

Mais il n’existe pas de marqueurs biologiques d’identification dans le DT2, dont sont pourtant porteurs 90 % des patients diabétiques. « Il s’agit en réalité d’une maladie très hétérogène qui peut toucher des patients aux profils très divers : on voit par exemple des patients de 30 ans qui doivent être mis sous insuline de façon très précoce, des diabétiques âgés qui ne posent pas de problèmes particuliers et des patients ayant une insulinorésistance très sévère », souligne le Pr Gautier.

C’est dans ce contexte que des recherches ont été lancées, afin de déterminer une possible stratification du DT2 en différents sous-types à partir de critères cliniques simples. « Des chercheurs scandinaves ont été les premiers à tenter une stratification en s’appuyant sur six variables disponibles au moment du diagnostic : l’âge, le poids (IMC), le niveau de l’HbA1c, les anticorps anti-GAD (glutamate acide décarboxylase), l’estimation de la fonction des cellules β (insulinosécrétion) et l’évaluation de la résistance à l’insuline à partir de la glycémie et du C-peptide à jeun », explique le Pr Gautier.

Cinq clusters

À partir de l’analyse bio-informatique de ces données, il a été possible d’établir cinq clusters de DT2 :

- Le cluster 1 regroupe les patients présentant une maladie détectable par la présence d’auto-anticorps, et donc se comportant comme un diabète de type 1.

- Le cluster 2, qui pèse pour 20 % des patients, comprend ceux qui ont le risque le plus élevé de rétinopathie et de neuropathie. Un pourcentage élevé d’entre eux doit passer précocement sous insuline (plus de 30 % à 5 ans).

- Le cluster 3, est constitué de patients présentant une insulinorésistance sévère et un risque significativement plus élevé de néphropathie diabétique et de complications cardiovasculaires.

- Le cluster 4 regroupe les patients diabétiques dont le risque est lié à l’obésité.

- Le cluster 5 est marqué par une apparition tardive de la maladie ; il représente le diabète du sujet âgé.

Ces cinq sous-types de DT2 ont également été retrouvés par une équipe de recherche allemande. « Les chercheurs ont pu montrer que le cluster 3, caractérisé par l’insulinorésistance élevée, était associé à un syndrome inflammatoire particulier, et à une stéatose hépatique non alcoolique (Nash). D’autres équipes, en Europe comme en France, mènent des études sur la stratification des patients diabétiques », poursuit le Pr Gautier, en estimant que cette voie de recherche « est cruciale dans l’espoir de mettre au point une médecine personnalisée de précision. »

Exergue : « Il s’agit en réalité d’une maladie très hétérogène »

Entretien avec le Pr Jean-François Gautier, médecin endocrinologue-diabétologue à l’Hôpital Lariboisière (AP-HP) à Paris et président de la SFD

Antoine Dalat

Source : Bilan Spécialiste