« Pas de frontières dans les technologies de reproduction assistée » : le thème du 22e congrès mondial sur la fécondation in vitro (FIV), colloque biannuel organisé pour la première fois au Maroc du 7 au 9 novembre 2024, revendique un partage de connaissances international en matière d’assistance médicale à la procréation (AMP). Près d’une cinquantaine de sessions scientifiques se sont tenues pour débattre de toutes les recherches en matière de fertilité : prévention, médecine de reproduction, chirurgie, génétique, biologie, etc.
« Presque 4 % d’enfants nés en France sont issus de techniques d’AMP, avance le Pr Samir Hamamah, président de la Fédération française d’études de la reproduction (FFER) et professeur de médecine de la reproduction au CHU de Montpellier, présent au Congrès. Ce qui nous intéresse, c’est l’amélioration des parcours de prise en charge dans les phases diagnostique et thérapeutique ».
L’IA pour choisir les traitements
L’utilisation de l’intelligence artificielle (IA) constitue un sujet de recherche majeur : « Des études sont en cours pour évaluer si l’IA peut nous aider à sélectionner les meilleurs spermatozoïdes, à analyser les embryons pour ne replacer que les embryons euploïdes dans l’utérus. Bien que des embryoscopes soient déjà utilisés, ceux-ci n’ont pas démontré leur supériorité par rapport à d’autres études élaborées actuellement », expose le Pr Omar Sefrioui, gynécologue-obstétricien, président du congrès et de la Société méditerranéenne de médecine de la reproduction (MSRM). L’IA permettrait, idéalement, de choisir un embryon plutôt qu’un autre à partir de critères plus sensibles, tels que des critères cinétiques ou de morphologie.
Dans le cas d’une FIV, l’IA pourrait permettre de déterminer précisément le dosage le plus approprié de traitement à administrer à une femme en fonction de son âge, de son IMC, de son taux d’hormones ou de ses antécédents. Le recours à ces logiciels viserait alors à obtenir des récoltes d’ovocytes optimales. La possibilité d’une ponction folliculaire robotisée est également à l’étude. « Le recours à l’IA est une discipline récente mais si les études sont concluantes, elle pourrait nous permettre de limiter la subjectivité avec laquelle l’humain procède », estime le Pr Samir Hamamah. « Veillons à ne pas en parler comme de la prochaine révolution, car rien ne permet de l’affirmer à ce jour, nuance toutefois le Pr Sefrioui. Les logiciels restent à l’étude ».
Préparation de l’endomètre et transfert d’embryons congelés
Les techniques de préparation de l’endomètre ont aussi été débattues durant le congrès, ainsi que la santé des enfants issus d’embryons congelés. « Il a été constaté une macrosomie fœtale chez des enfants issus de protocoles de congélation, alors qu’en cas de FIV effectuées avec des transferts d’embryons frais, le poids reste plus faible », indique le Pr Sefrioui. Un constat appuyé par le Pr Hamamah, qui précise que « les enfants issus d’embryons congelés présentent un poids de naissance de plus de 250 g supérieur aux enfants nés d’embryons frais, ce qui peut davantage les prédisposer à des risques d’obésité ou de maladies cardiovasculaires. Sur ce sujet, il convient d’étudier la composition des milieux de culture dans lesquels sont fabriqués les embryons ». « On observe également de petites complications avec notamment une hypertension artérielle, rapporte de son côté le Pr Sefrioui. Mais ces problèmes sont davantage dus au traitement donné pour préparer l’endomètre plutôt qu’à la congélation elle-même. Rien ne sert d’être alarmiste ».
Pour une politique de prévention
À Marrakech, le Pr Samir Hamamah a aussi abordé le test de réceptivité endométriale (ERA), qui vise à connaître le moment où l’endomètre est prêt pour l’implantation d’un embryon, ainsi que les stratégies internationales de prévention à instaurer pour lutter contre l’infertilité. Auteur d’un rapport sur le sujet remis à la présidence française en 2022, il milite pour l’instauration d’un label reprotoxique et pour l’ouverture d’un « Institut national de la fertilité » afin de promouvoir la recherche et l’innovation, « le taux de succès en matière de PMA restant insatisfaisant ».
Le Pr Hamamah revendique par ailleurs la mise en place d’une politique de prévention dès le plus jeune âge, la santé reproductive n’étant « jamais abordée au collège ». « C’est pourtant un indicateur de santé plus global, relève-t-il. Il faut donc informer, actualiser les connaissances des professionnels de santé et du corps médical et faire participer tout le monde : infirmiers en pratique avancée, sage-femmes, médecins, etc. ». Sommeil, activité physique, lutte contre le tabac et l’alcool mais aussi les perturbateurs endocriniens préservent la fertilité. En France, plus de 3,3 millions de personnes seraient concernées par des difficultés à concevoir.
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024
La myologie, vers une nouvelle spécialité transversale ?