Parkinson : les pompes à apomorphine efficaces à long terme en vie réelle

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Publié le 14/06/2021
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Crédit photo : DR

Chez les patients à un stade avancé de la maladie de Parkinson, un traitement par une pompe à apomorphine réduit les fluctuations motrices − c’est-à-dire les périodes de la journée au cours desquelles les symptômes moteurs reviennent − selon les données en vie réelle d'une étude de cohorte rétrospective menée au service de neurologie de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière (AP-HP).

À l’instar des pompes à Duodopa ou de la stimulation cérébrale profonde, les pompes à apomorphine sont destinées à fournir un traitement en continu aux patients dont les symptômes réapparaissent malgré un traitement par lévodopa.

Quels patients candidats ?

« Au stade avancé de la maladie, il existe deux catégories de patients, explique le Pr Emmanuel Flamand-Roze qui a co-dirigé l'étude avec la Dr Élodie Hainque, également du service de neurologie de la Pitié-Salpêtrière. Il y a ceux qui développent des signes qui ne répondent plus au traitement et pour lesquels il n'existe pas à l'heure actuelle de solution, et il y a ceux qui répondent de manière fluctuante à cause de la stimulation pulsatile induite par le traitement oral. Pour cette seconde catégorie de patient, il y a un intérêt à proposer une stimulation continue », résume-t-il.

Des études cliniques avaient déjà indiqué l'intérêt des pompes à apomorphine. La particularité de cette nouvelle étude française, publiée dans la revue « NPJ Parkinson's Disease », est qu'elle porte sur des patients recrutés « en vie réelle » qu'on ne retrouve pas dans les essais cliniques randomisés car porteurs de comorbidités ou trop âgés. L'autre avantage de cette étude est la longueur inédite de son suivi sur deux ans.

Des patients suivis de près en pratique

Les chercheurs se sont appuyés sur un certain nombre de scores d'évaluation fréquemment employés dans les centres experts Parkinson. « C'est une technique encore jeune sur laquelle il y a encore des choses à comprendre. Nous suivons donc de près tous les patients que nous traitons », explique le Pr Flamand-Roze.

Une cohorte a été constituée à partir d'une série de 110 participants, 55 hommes et 55 femmes, d'un âge moyen de 62,9 ans. Il s'agissait de patients dont la pathologie était déjà relativement ancienne (12 ans en moyenne), avec un score moyen de 19 à la section III (examen moteur) de l'échelle UPDRS et de 8,6 en ce qui concerne la section IV (complications du traitement dans la semaine précédant l’examen). Trente-huit patients avaient des antécédents de troubles du contrôle des impulsions, et 55 des antécédents de dépression.

Le traitement a pu être poursuivi sans discontinuation pendant 2 ans chez 65 % des patients, avec une stabilisation de la qualité de vie (score PDQ-39 inchangé), une amélioration persistante des fluctuations motrices et une embellie des scores d'évaluation de la santé mentale.

Un traitement bien toléré

L'effet secondaire le plus fréquemment cité est l'apparition de nodules peu ou pas douloureux au niveau du site d'injection (53 à 57 % des patients). Des troubles digestifs et de l'hypotension orthostatique étaient aussi fréquents dans les premières semaines du traitement.

« Il y a deux enseignements importants à tirer de cette étude, explique le Pr Flamand-Roze. D'une part, le traitement est bien toléré par des patients plus comorbides que ceux recrutés habituellement dans les essais cliniques. Et d'autre part, la pompe à apomorphine est capable d'améliorer pendant deux ans la motricité de patients dont la pathologie est très avancée, ce qui est un résultat très impressionnant », se réjouit-il.

Les patients les plus à risque d'arrêter le traitement étaient ceux dont la sévérité motrice était la plus élevée et/ou chez qui la pathologie était la plus récente, ainsi que ceux dont la qualité de vie était plus mauvaise avant l'initiation du traitement.

Trois solutions à peser

Le choix de la technique à employer chez les patients qui répondent périodiquement au traitement oral dépend actuellement de plusieurs facteurs que nous détaille le Pr Flamand-Roze : « Pour les patients qui ont des épisodes de “freezing”, avec les pieds qui restent collés au sol, la stimulation cérébrale profonde est déconseillée, précise-t-il. En revanche, elle sera très efficace chez les patients qui souffrent de tremblements. Les patients somnolents ne doivent pas être traités par une pompe à apomorphine qui accroît la somnolence. Enfin, les patients de plus de 70 ans seront plus volontiers orientés vers une des deux pompes. » Le souhait du patient et la culture du neurologue sont aussi à prendre en compte.


Source : lequotidiendumedecin.fr