Congrès de l’American College of Cardiology

Le café est bon pour le cœur !

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Publié le 21/04/2022

D’après les résultats présentés récemment au dernier congrès de l’American College of Cardiology (ACC), le café serait bon pour le cœur, quelle que soit la forme sous laquelle il est consommé (moulu, instantané ou même décaféiné). La morbimortalité cardiovasculaire est réduite chez les buveurs de café, qu’ils soient cardiaques ou non.

Crédit photo : phanie

En 2017, deux grandes études observationnelles, sur les liens entre consommation de café et santé cardiovasculaire, avaient déjà défrayé la chronique : EPIC, menée sur près d'un demi-million d'Européens dont 300 000 femmes, et MEC, réalisée auprès d’environ 200 000 Américains de diverses ethnies (sauf blanche). Après 16 ans de suivi, elles montraient que les buveurs de café avaient une mortalité totale plus basse que ceux n’en consommant pas. Dans l'étude européenne EPIC, le risque de décès était réduit de 12 % dès trois tasses de café par jour (de 7 % seulement chez les femmes). Plus surprenant, cet effet ne semblait pas lié à la présence de caféine. L'impact du café décaféiné semblait comparable. Publiée simultanément, l'étude américaine MEC mettait en évidence une relation dose réponse possiblement inverse, entre le nombre de tasses consommées et le bénéfice en termes de mortalité. Celui-ci semblait maximal pour une tasse par jour (RRa de décès = 0,88), avant de décroître sensiblement dès deux tasses quotidiennes (RRa = 0,82).

Cinq ans plus tard, une vaste étude menée sur une banque de données européennes (UK Biobank) par une équipe de chercheurs australiens, sous la houlette du Pr David Chieng (Melbourne, Australie), remet à nouveau le café sous les projecteurs. Toute une session d'abstracts (1,2,3) lui était consacrée au congrès de l’ACC. Le message à retenir des trois communications orales présentées est sans équivoque : quelle que soit la forme sous laquelle il est consommé (moulu, instantané ou même décaféiné), le café est bon pour le cœur !

Près de 400 000 sujets suivis sur 10 ans

Historiquement, le café a longtemps été tenu par les médecins pour ennemi du cœur. Sa consommation était largement déconseillée aux patients cardiaques, surtout lors de troubles du rythme et en particulier de fibrillations atriales (FA). Aujourd'hui, après 10 ans de suivi, ce travail mené sur une vaste cohorte britannique de plus de 380 000 sujets de 57 ans d'âge moyen (52 % de femmes) vient contredire cette croyance. « Le café n'est pas associé à un risque de FA même chez des "cardiaques", c’est-à-dire les sujets présentant une maladie coronaire et/ou un antécédent d'infarctus du myocarde (IDM) ou d'accident vasculaire cérébral (AVC). Même lors de FA, le café est associé à une réduction des décès. Il n'y a pas pour autant d'effet dose linéaire. On est plus sur une courbe en U. C'est donc autour d’une à trois tasses par jour que les bénéfices sont généralement les plus importants, résume les auteurs (1). Le café est associé, en particulier à la dose de deux à trois tasses quotidiennes, à une réduction significative des FA, évènements cardiovasculaires (CV) et décès de toutes causes en population générale. Il devrait donc à l'avenir faire partie des "traitements" préventifs chez les sujets à risque ou déjà cardiaques ». 

Une réduction de la mortalité

Contrairement aux idées reçues, nombre de patients « cardiaques » boivent régulièrement du café. Cette consommation n'engendre pas de surmorbimortalité cardiaque. A contrario, deux à trois tasses par jour sont associées à une réduction relative de 9 % des évènements CV majeurs (IDM, AVC, insuffisance cardiaque), de 10 % des maladies coronaires, et de 14 % de la mortalité toutes causes. En revanche, moins la consommation de café est importante, moins le risque d'AVC est élevé. Quant à la FA, il faut plutôt privilégier deux à trois tasses par jour. D'ailleurs, on ne retrouve aucun lien entre consommation de café et arythmies, FA ou flutter, chez les cardiaques. Si on restreint l'analyse aux FA, à nouveau la consommation de café est associée à une réduction de la mortalité. Mais nul besoin de forcer la dose. Consommer une tasse de café quotidiennement offre aux patients atteints de FA la meilleure espérance de vie (2), augmentée de 17 % par rapport aux non-buveurs de café ayant une FA (RR = 0,82, 0,73-0,93 ; p < 0,01). Pour les auteurs, boire régulièrement du café, même quand on est cardiaque, ne pose pas problème. Cette consommation n'augmente pas le risque de FA. L'amélioration de survie associée au café est d'ailleurs retrouvée même en cas de FA (2). « Arrêtez d'encourager vos patients, même cardiaques et avec une FA, à stopper le café », sermonne le Pr Chieng. 

Café moulu, instantané, décaféiné : tout est bon à boire !

Une dernière analyse s'est penchée sur l'impact différentiel de diverses sortes de cafés. Elle montre que tout café est bon à boire, même si le café moulu non décaféiné est probablement associé au bénéfice le plus important. Ce travail suggère également que la caféine n'est pas seule à porter le bénéfice lié au café.

(1) Chieng D et al. ACC 2022, abstract 1455
(2) Kistler PM et al. ACC 2022, abstract 1490
(3) Chieng D et al. ACC 2022, abstract 26

Pascale Solere

Source : lequotidiendumedecin.fr