Hypophosphatémie liée à l’X

Preuve de concept de thérapie génique

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Publié le 08/04/2022
La Pr Claire Bardet (Paris), qui dirige le groupe de recherche « maladies génétiques et métabolisme minéral », a mené en collaboration avec le Dr Giuseppe Ronzitti et son équipe de chercheurs du Généthon, une étude de preuve de concept (1) de l’efficacité de la thérapie génique pour l’hypophosphatémie liée à l’X (XLH). Que révèle-t-elle ?

Crédit photo : phanie

L’XLH est une maladie génétique rare (une naissance sur 20 000) due à une mutation perte de fonction du gène PHEX, conduisant à une fuite de phosphate dans les urines et une atteinte de la minéralisation du squelette et des dents. Sans traitement, la maladie se manifeste chez l’enfant par des déformations osseuses des membres inférieurs qui apparaissent à l’âge de la marche, des douleurs osseuses, un retard de croissance, des abcès dentaires spontanés conduisant à une perte prématurée des dents, et/ou une craniosténose.

« La forme active du facteur de croissance des fibroblastes 23 (FGF23), régulateur clé de l’homéostasie du phosphate, est augmentée chez les patients atteints de l’XLH. Ceci engendre une anomalie de la réabsorption du phosphate au niveau rénal et donc une fuite de celui-ci. L’hypophosphatémie conséquente est associée à une altération de la synthèse de calcitriol et d’absorption intestinale de phosphate, et conduit à un trouble de la minéralisation des os et des dents », explique la Pr Bardet.

L’avantage d’une thérapie génique

Le traitement conventionnel consiste en une supplémentation orale quotidienne en phosphate, visant à compenser la fuite rénale, et en analogues actifs de la vitamine D, pour contrecarrer la carence en 1,25(OH)2 vitamine D. Les multiples doses quotidiennes de phosphate sont souvent associées à des effets secondaires et à une mauvaise observance.

Plus récemment, un anticorps monoclonal anti-FGF23 (burosumab) a été approuvé pour une utilisation dans le traitement de l’XLH (une injection tous les 15 jours), améliorant la réabsorption du phosphate, la phosphatémie et la synthèse endogène de la 1,25(OH)2 vitamine D. Mais cela reste un traitement à vie et très coûteux. « L’avantage d’une thérapie génique serait que les patients bénéficient d’un traitement avec une injection unique pour toute la vie, ce qui contribuerait à l’amélioration de leur qualité de vie », précise la Pr Bardet.

Un vecteur ciblant le foie

Les virus adéno-associés (AAV) sont des vecteurs prometteurs concernant les approches de transfert de gènes, dans le cadre de thérapies géniques de maladies rares. Un certain nombre d’essais cliniques confirment l’innocuité et l’efficacité de cette technologie. Néanmoins, certains tissus comme l’os restent réfractaires à l’AAV, alors que le foie représente un tissu cible idéal. « C’est ainsi que nous avons développé comme alternative au ciblage direct des cellules osseuses, une stratégie innovante utilisant un vecteur AAV ciblant le foie servant alors de plateforme de production d’un facteur pour inhiber la signalisation FGF23. Nous avons montré que l’expression hépatique d’un fragment C-terminale du FGF23 corrigeait les manifestations squelettiques dans un modèle murin de XLH portant une délétion de PHEX et mimant la pathologie humaine », révèle la Pr Bardet.

Ces données fournissent une preuve de concept pour le transfert de gène AAV dans le traitement de l’XLH, élargissant encore l’utilisation thérapeutique de cette technique dans les troubles squelettiques. Il s’agit d’une toute première mais importante étape, les stratégies de transfert de gènes pour les maladies du squelette restant encore rares.

D’après un entretien avec la Pr Claire Bardet, URP2496, UFR d’odontologie de l’Université de Paris 
(1) Zhukouskaya et al. Sci Adv. 2021 Oct 29;7(44):eabj5018

Christine Fallet

Source : lequotidiendumedecin.fr