Le risque cardio-vasculaire d'un patient atteint de rhumatisme inflammatoire, polyarthrite rhumatoïde (PR) ou spondylarthropathie, correspondrait à celui d'un diabétique, et le risque d'infarctus du myocarde est équivalent à celui d'une personne de 10 ans plus âgé. Le cerveau n'est pas épargné, et le registre allemand RABBIT montre une augmentation des AVC proportionnelle à l'activité de la maladie. La surmortalité CV serait de 50% par rapport à la population générale, ce qui a conduit les diverses sociétés savantes à émettre des recommandations sur le bilan et la prise en charge du risque cardiovasculaire. « La morbi-mortalité reste toujours plus élevée, en partie probablement du fait de l'insuffisance de la prise en charge des comorbidités?», déplore le Pr Martin Soubrier (Clermont-Ferrand). Cela est prouvé pour la PR comme pour le rhumatisme psoriasique (RPs), un peu moins bien établi pour la spondylarthrite ankylosante (SPA). » Une étude internationale portant sur les comorbidités, COMORA montre leur fréquence : dépression (15%), pathologies cardio et cérébro-vasculaires (6%), ulcérations gastro-intestinales (11%), tumeurs (4.5%), infections…
Des facteurs de risque multiples et intriqués
Les facteurs de risque classiques sont plus fréquents dans les rhumatismes inflammatoires, et généralement corrélés à l'activité de la maladie. Dans l'étude COMORA figurent dans le peloton de tête l'hypertension?artérielle (40%), l'hypercholestérolémie (32%), le tabagisme.
Le registre américain CORRONA montre une augmentation du LDL et des TG ainsi qu’une diminution du HDL dans la PR et le rhumatisme psoriasique, mais souligne aussi que la majorité de ces patients ne reçoivent pas le traitement adéquat ! Interviendrait aussi dans ce sur-risque le déclin de la fonction rénale, observé dans la PR, la variabilité inter-consultations de la PA, le diabète, lui aussi plus fréquent dans la PR (OR=1,74), lié à l'obésité, à la sédentarité, mais aussi à l'activité de la maladie et à la corticothérapie. « Un rhumatisme inflammatoire est un facteur de risque additionnel à prendre en compte par exemple pour la prescription de statines, mais 25% des patients ne sont pas dans la cible du LDL », poursuit le rhumatologue.
Ces facteurs de risque traditionnels n’expliquent pas à eux seuls l’augmentation du risque cardio-vasculaire. L'inflammation est bien sûr impliquée et on retrouve volontiers dans les pathologies rhumatismales inflammatoires des infiltrations cellulaires inflammatoires au niveau des parois artérielles, de l'épicarde – en particulier au niveau de l'oreillette gauche -, et du myocarde. Aussi le risque cardiaque ne serait pas uniquement vasculaire puisqu'il existe aussi une prévalence plus importante de l'allongement de l'espace QT même en dehors de toute autre pathologie cardiaque dans la PR.
L’os, un organe plus fonctionnel qu’on ne le pense
« Les relations entre maladies rhumatismales et obésité illustrent parfaitement la complexité des interactions en jeu », souligne Marian T. Hannan (Harvard, états-Unis). Les personnes obèses ou en surpoids ont des pathologies rhumatismales plus fréquentes et plus sévères, qu'il s'agisse des rhumatismes inflammatoires, de l'arthrose, de la goutte ou du lupus. Leur association relève de différents facteurs : sédentarité, adipokines dont le rôle est bien mis en évidence dans l'arthrose, inflammation qui modifie la composition corporelle, insulinorésistance qui module la répartition des graisses, au niveau musculaire en particulier. Mais l'os n'est pas « passif » et son activité pourrait aussi interagir avec les facteurs de risque.
« L'os dévoile toujours plus de fonctionnalités, explique Gérard Karsenty (Columbia), un des pionniers de la physiologie osseuse. Il interviendrait dans différents processus, métabolisme énergétique, reproduction, fonction cérébrales, l'ostéocalcine, une hormone qui régulerait l'insulino-secretion, le métabolisme énergétique, la fertilité masculine, les fonctions cognitives, etc. »
Quid de la cardiotoxicité des traitements ?
Le rôle délétère des anti-inflammatoires non stéroïdiens et des corticoïdes est connu, mais la balance bénéfice/risque de ces derniers pourrait ne pas être forcément défavorable dans la mesure où ils diminuent l'inflammation. Le méthotrexate est associé à un risque plus bas d'évènements cardio-vasculaires dans la PR. Diverses études présentées durant le congrès de l'ACR montrent des résultats en faveur des biothérapies sur le risque cardio-vasculaire y compris avec les plus récentes. Elles pourraient réduire la dysfonction du VG et améliorer sa structure, et diminuer le risque d'infarctus du myocarde dans la PR.
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