Les généralistes ne s'estiment pas suffisamment valorisés dans le dépistage des cancers

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Publié le 27/11/2018
Médecin expliquant l'usage du test Hémoccult à un patient.

Médecin expliquant l'usage du test Hémoccult à un patient.
Crédit photo : VOISIN/PHANIE

Les trois quarts des médecins de famille se sentent responsabilisés par les pouvoirs publics dans le dépistage et la prévention des cancers. En revanche, 90 % d'entre eux considèrent que leur rôle dans la prévention des cancers n’est pas suffisamment valorisé. Tels sont les principaux enseignements de l'enquête* réalisée par Le Généraliste en partenariat avec le Collège de la médecine générale pour les Rencontres de la cancérologie française (RCFR 2018), organisées mardi 27 et mercredi 28 novembre au pavillon Cambon à Paris.

Plus de 60 % des répondants ont déploré un « manque de mission clairement dédiée » aux médecins traitants et une insuffisance de rémunération des actions de dépistage et de prévention. Le manque de temps constitue un frein pour près d'un généraliste sur deux.

 

Notre enquête permet de mesurer la pratique des dépistages par pathologie réalisés par les médecins de famille. 4 généralistes sur cinq se disent favorables à la vaccination contre les infections à papillomavirus humain et 61% estiment qu'il faut la proposer à tous les garçons – une expérimentation devrait être menée dans les régions Grand-Est et Auvergne-Rhône-Alpes. Une petite majorité (53 %) est en revanche opposée à ce que cette vaccination contre le HPV devienne obligatoire.

Autre enseignement intéressant, 79 % des généralistes suggèrent l'auto-examen des femmes et trois omnipraticiens sur quatre réalisent la palpation mammaire pour dépister un cancer du sein. Sept médecins sur 10 affirment que la polémique autour d’un risque de sur-diagnostic n'a pas fait évoluer leur pratique. La palpation mammaire est recommandée en France chez les jeunes femmes de plus de 25 ans mais elle ne l’est plus aux Etats-Unis et au Canada. Dans ces pays, « il n’y a plus de recommandation de dépistage du cancer du sein par la palpation mammaire effectuée par des médecins car il n’y a pas de preuve suffisante », nous expliquait récemment en vidéo le Dr Alexandre Malmartel, chef de clinique à Paris V.

Pour dépister le cancer du col de l'utérus, 58 % des généralistes disent réaliser des frottis. Sur ce sujet, les praticiens sont divisés sur l'impact du dépistage organisé, une petite majorité estimant qu'il modifiera leur pratique si le dispositif les implique d'avantage. 

52 % pensent que la nouvelle consultation de prévention des femmes à 25 ans permettra de faire progresser la participation aux dépistages (sein, col de l'utérus) tandis que 31% ne se prononcent pas. 

Les généralistes sont en revanche unanimes (95 %) à encourager leurs patients à réaliser le test immunologique de dépistage du cancer du côlon, huit médecins de famille sur dix disposent d'ailleurs de tests dans leur cabinet.

Le statut sérologique des patients vis-à-vis de l’hépatite B est également une préoccupation d'une grande majorité d'omnipraticiens, surtout pour les patients qu'ils estiment à risques.

Les résultats de l'enquête confirment l'ambiguïté de la situation des généralistes dans le dépistage du cancer de la prostate. En effet, une majorité dit dépister le cancer de la prostate par dosage du PSA (78 % dont 31 % selon les cas) alors que 68 % considèrent qu'ils ne faut pas aller vers un dépistage systématique du PSA.

Les généralistes se déclarent attentifs à plusieurs déterminants professionnels et environnementaux. Le tabagisme, la consommation d'alcool et le surpoids sont les trois éléments sur lesquels ils sont le plus vigilants bien devant l'alimentation et la pratique d'un sport.

La nutrition semble demeurer un sujet délicat et qui n'est pas abordé systématiquement en consultation. La moitié des généralistes ne connaissent pas le logo Nutri-score. Seuls 22 % des médecins de famille recommandent à leurs patients en surpoids de se référer à au nouveau système d'étiquetage basé sur un code de 5 couleurs allant du vert au rouge en fonction de la valeur nutritionnelle des produits alimentaires.

Enfin, les généralistes sont circonspects concernant l'impact des avancées en génomique sur l’approche de la prévention. Ils sont 57 % à ne pas se prononcer sur cette question, un tiers des répondants étant en revanche persuadés que cette évolution aura des conséquences sur les dépistages à l'avenir (relire notre dossier sur la médecine prédictive).

* Enquête menée sur legeneraliste.fr du 2 octobre au 12 novembre qui a recueilli 108 réponses de généralistes.


Source : lequotidiendumedecin.fr