Les manifestations neurologiques lors d’un Covid sévère et d’un Pims, un facteur de risque de morbidité chez les enfants à prendre en charge au plus tôt

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Publié le 10/06/2024
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Une étude montre que les patients pédiatriques hospitalisés pour un Covid grave ou un Pims avec manifestations neurologiques sévères nécessitent une évaluation et une prise en charge précoces pour prévenir les séquelles au long cours.

Crédit photo : BURGER/PHANIE

Une étude multicentrique internationale publiée dans le Jama Network Open montre que les enfants et les adolescents de moins de 18 ans hospitalisés pour Covid grave ou syndrome inflammatoire multisystémique de l'enfant (Pims) avec des manifestations neurologiques sévères sont à risque de morbidité à long terme. Les auteurs insistent sur l’importance d’une évaluation et d’une prise en charge précoces afin que de faciliter au mieux leur rétablissement.

Au sein de leur cohorte, les auteurs ont retrouvé 18 % de cas de manifestations neurologiques sévères pendant l’hospitalisation pour un Covid grave, et 24 % de cas pendant l’hospitalisation pour un Pims. Ces patients avaient tous un risque plus élevé de morbidité neurocognitive et/ou fonctionnelle à la sortie de l’hôpital comparés aux patients sans manifestations neurologiques graves pendant l’hospitalisation.

En France, s’il reste « complexe d’évaluer la prévalence de la présentation neurologique parmi ces formes graves de Covid, des chiffres de l’observatoire Pandor (environ 3 500 patients sur une soixantaine de centres) l’estiment aux alentours de 10 % », indique au Quotidien le Pr Naïm Ouldali, pédiatre à l’hôpital Robert-Debré (AP-HP) spécialisé en infectiologie. Une pathologie qui reste ainsi « non négligeable ».

Chez les adultes avec un Covid sévère, la prévalence de l’atteinte neurologique serait également de 10 % avec généralement des syndromes confusionnels, des convulsions, des dysautonomies… « La grande majorité des patients ont plutôt des manifestations de type encéphalopathie avec un syndrome confusionnel, un état réversible avec la guérison du Covid en phase aiguë. Une minorité de patients ont des atteintes du système nerveux central avec des manifestations vasculaires et inflammatoires, et cela peut aussi potentiellement avoir des conséquences sur le long terme », détaille le Pr Romain Sonneville spécialisé en médecine intensive et réanimation à l’hôpital Bichat (AP-HP) au Quotidien. Pour lui, ce travail montre donc que « si le risque de morbidité était montré chez l’adulte, il semble que cela est aussi vrai en pédiatrie ».

Encéphalopathies aiguës, crises d’épilepsie, dysautonomies, comas, AVC…

L’étude a inclus 3 568 patients pédiatriques de moins de 18 ans (46 centres de 10 pays) hospitalisés pour un Covid grave (83,5 %) ou un Pims (16,5 %) entre janvier 2020 et juillet 2021 (âge médian de 8 ans et 54,3 % d’enfants de sexe masculin). Ces patients ont présenté, durant leur hospitalisation, des manifestations neurologiques sévères telles que des encéphalopathies aiguës, des crises d’épilepsie, des méningites ou encéphalites, des dysautonomies, des comas, des deliriums ou encore des accidents vasculaires cérébraux (AVC). Les auteurs retrouvent, pendant l’hospitalisation, 18 % de manifestations neurologiques graves parmi les patients atteints d’un Covid grave, et 24,8 % parmi ceux atteints d’un Pims.

À la sortie de l’hôpital, 27,7 % des patients ayant eu un Covid grave avec manifestations neurologiques ont présenté une morbidité neurocognitive et/ou fonctionnelle (contre 14,6 % dans le groupe des patients Covid grave seul), et cela concernait 28 % des patients Pims (contre 15,5 % dans le groupe des patients Pims seul). Parmi les patients aux manifestations neurologiques sévères, les patients ayant eu un Covid grave étaient moins susceptibles d'être hispaniques ou latinos (26,7 et 30,4 %), plus susceptibles d'avoir plus d'une comorbidité préexistante (46,6 versus 32,5 %) et d'avoir une affection neurologique préexistante (45,7 versus 16,3 %) que ceux qui n’avaient pas présenté pas de manifestations neurologiques sévères lors de l’hospitalisation. Quant aux patients Pims avec manifestations neurologiques, ils étaient aussi plus susceptibles de souffrir d'une affection neurologique préexistante (11,6 versus 5,9 %) que ceux qui n’en avaient pas présentées.

Nécessité d’une prise en charge précoce

Afin de prévenir au mieux les séquelles sur le long terme, les auteurs proposent que les patients à risque élevé soient évalués au plus tôt et orientés vers les soins de suivi nécessaires pour favoriser leur rétablissement et leur adaptation. Par exemple, grâce à des marqueurs comme une baisse des plaquettes, retrouvée chez les patients avec des manifestations neurologiques sévères. Cependant, à ce jour, les auteurs précisent qu’il existe peu de programmes systématiques et multidisciplinaires de suivi après les soins intensifs pédiatriques.

« Chez les adultes, le challenge en médecine intensive/réanimation devant un patient Covid avec des manifestations neurologiques graves, c’est une évaluation multimodale afin de leur faire bénéficier des prises en charge spécifiques qui existent », explique le Pr Romain Sonneville. Mais chez l’enfant, « devant ces pathologies nouvelles, il n’y a pas de prise en charge protocolisée, tant sur le plan thérapeutique immédiat que sur celui de la surveillance et du suivi à long terme », détaille le Pr Naïm Ouldali. « Ces tableaux restant rares, les expériences individuelles ou de collègues ne suffisaient pas et cette étude, avec son volume important de patients, a donc tout son sens. Elle nous alerte sur la surveillance et le suivi rapproché de ces patients avec des formes neurologiques marquées et peut nous sensibiliser sur cet aspect et corriger un sous-diagnostic éventuel », analyse-t-il.

Ainsi, les recherches futures sur des cohortes de patients présentant un risque élevé de séquelles après la sortie pourraient démontrer la valeur de ces programmes. « Il est dur de savoir s’il y a des conséquences sur les aspects neuro-développementaux, mais il est sûr que quand un enfant est touché, sa prise en charge est un point majeur pour améliorer son pronostic. Est-ce que dans cette situation cela change significativement le pronostic de l’enfant ? Nous ne le savons pas encore, c’est pour cela qu’il faut des études », conclut le Pr Ouldali.


Source : lequotidiendumedecin.fr