Industrie : une page se tourne avec la mort de Jacques Servier

Publié le 17/04/2014

Jacques Servier est mort mercredi à 92 ans à son domicile après 60 ans à la tête du premier groupe pharmaceutique Français. Docteur en médecine, ce fils d'industriel avait racheté en 1954 un petit laboratoire à Orléans, qui fabriquait un sirop contre la toux. En 1955, il lance ses deux premières molécules et n'a dès lors de cesse de développer son entreprise. En 2013, avec un chiffre d'affaires de 4,2 milliards d'euros, la société Servier s'est hissée au rang de deuxième laboratoire pharmaceutique français en termes de ventes, derrière Sanofi.

Cinq axes thérapeutiques stratégiques

Jusqu'au bout, Jacques Servier avait gardé la main sur un groupe qu’il a toujours refusé de faire entrer en bourse et qui emploie aujourd’hui quelque 21.000 salariés, dont 3.000 chercheurs. Plus de 60% des médicaments du groupe sont produits en France, en particulier sur le site historique de Gidy près d’Orléans et 92% sont prescrits à l’international. Parmi les axes phares du laboratoire figurent les maladies cardio-vasculaires, le diabète de type 2, les neurosciences, la rhumatologie et l’oncologie. Le laboratoire Servier renvoie aussi à des médicaments aux marques bien connues des prescripteurs comme Coversyl, Diamicron, Stablon ou Procoralan. Le groupe produit aussi de plus en plus de génériques. A ce jour, un quart du marché Français est assuré par Servier, via sa filiale Biogaran, créée par Jacques Servier en 1996.

Le groupe et son fondateur ont longtemps entretenu d’excellentes relations avec les responsables politiques français et notamment le ministère de la Santé. En 2009, Jacques Servier fut décoré de la grand-croix de la Légion d'honneur par Nicolas Sarkozy, alors président de la République. L’affaire Mediator dont le procès est prévu l’an prochain a mis un terme brutal à cette bonne entente. A partir de 2010, les ministres Xavier Bertrand, puis Marisol Touraine mettront en effet sévèrement et régulièrement en cause le laboratoire. «Jacques Servier a créé un grand groupe industriel mais ce qui restera de lui, c'est ce scandale sanitaire gigantesque du Mediator», a commenté la ministre des Affaires Sociales et de la Santé jeudi matin sur France Inter.

Neuf mois après la disparition de Pierre Fabre

Jacques Servier, père de quatre filles, avait prévu de longue date sa succession en créant une fondation qui possède désormais 100% de l'ensemble du groupe pharmaceutique. Le groupe doit maintenant lui désigner un successeur pour reprendre le flambeau. Depuis février, la présidence du comité de direction chargé de gérer cette période de transition est désormais assurée par le directeur financier du groupe Olivier Laureau.

Ce processus sucessoral ressemble un peu à celui mis en place il y a tout juste neuf mois lors de la mort de Pierre Fabre, qui n’avait pas d’enfant. Le parallèle entre les deux personnalités est d’ailleurs tentant : ce sont deux professionnels de santé qui ont bifurqué vers l’industrie et ont fondé les deux plus grands groupes pharmaceutiques indépendants français. Avec leur disparition, c’est une page qui se tourne dans l’histoire de l’industrie pharmaceutique française.



Source : lequotidiendumedecin.fr