La vente d'antibiotiques à l'unité permettrait de réduire de 10% les volumes délivrés

Publié le 03/10/2017
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Crédit photo : GARO/PHANIE

La vente d'antibiotiques à l'unité aurait un intérêt sanitaire, selon les résultats d'une expérimentation commandée par le ministère de la Santé. Ses résultats ont été dévoilés fin septembre par la revue scientifique américaine PLOS ONE et rapportés vendredi par le Quotidien du pharmacien sur son site internet, confirment les avantages économiques, environnementaux et sanitaires de la dispensation à l'unité, en tout cas pour cette catégorie de médicaments, selon les auteurs de l'étude.

Cette expérimentation conduite en France entre novembre 2014 et 2015, a porté sur la dispensation de quatorze antibiotiques différents dans 100 pharmacies. 75 d'entre elles délivraient les médicaments à l’unité pour la durée de prescription prévue, 25 autres les délivraient de façon habituelle via des boîtes. Toutes ces pharmacies se situaient en Ile-de-France, Limousin, Lorraine, Provence-Alpes-Côte-d’Azur (selon l’ancien partage des régions). Au total, 1 185 patients ont été inclus dans cette étude. Dans un second temps, ces malades ont été contactés par téléphone pour connaître l’usage qu’ils faisaient des antibiotiques délivrés.

Contre l'antibiorésistance

Ce n’est pas par hasard si cette expérimentation a porté sur les antibiotiques, « la progression récente et importante de la résistance bactériologique aux antibiotiques constitue un enjeu majeur de santé publique dans beaucoup de pays européens », indiquent les auteurs de cette étude. Un mésusage de ces médicaments, une automédication, un surplus de comprimés diffusés dans l’environnement… sont autant d’éléments impliqués dans ce grave problème.

Des résultats très instructifs !

Les résultats de cette étude se révèlent intéressants à plus d'un titre. Tout d’abord, une dispensation des médicaments à l’unité permet de réduire de 9,9% les volumes délivrés. Le nombre moyen de comprimés était de 23 quand les antibiotiques étaient délivrés en boîte, contre 20 comprimés quand ils l’étaient à l’unité. Concernant les restants d’antibiotiques non consommés, 17,6% des patients ont dit leur intention de garder les comprimés non utilisés, 10,7% ont admis qu’ils pourraient les prendre sans sans avis médical préalable, et 13,1% admettaient habituellement jeter le reste des comprimés une fois le traitement fini, sans penser au recyclage des médicaments.

Pour les auteurs, « la dispensation à l’unité semble avoir amélioré l’adhérence au traitement antibiotique : l’observance a été de 91,4% dans le groupe d’intervention contre 65,6 % dans le groupe contrôle ».

A noter que les auteurs de cette étude indiquent que la dispensation à l’unité de médicaments a un coût (comme la surcharge de travail pour les pharmaciens) qui n’a pas été évalué dans cette enquête. Mais cette disposition devrait permettre assez d'économies pour financer des compensations aux parties prenantes, font-ils valoir. 

Le débat est relancé

Cette étude pourrait relancer l'idée de la délivrance des médicaments à l'unité, annoncée pendant la campagne par Emmanuel Macron, mais sur laquelle les autorités sanitaires sont pour l'heure discrètes. Ce serait "en fait assez complexe", a expliqué la ministre de la Santé Agnès Buzyn, la semaine dernière sur BFM TV.  "Quand vous vendez les médicaments à l'unité vous perdez en fait la traçabilité de la boîte et donc il y a des risques pour les malades", a ainsi argué la ministre de la Santé.

En juin 2015, un rapport du Dr Jean Carlet et de Pierre Le Coz avait détaillé l'usage abusif que l'on fait des antibiotiques, insistant entre autres sur les durées souvent trop longues des antibiothérapies. En novembre 2016, suite à ces propositions, une commission interministérielle se mobilisait pour lutter contre l'antiobiorésistance et proposait « une modification des conditionnements de ces médicaments afin (...) de mieux les adapter aux durées de traitement.» 

D’autres expérimentations devront-elles être conduites avant d’appliquer ce qui se fait couramment en Grande-Bretagne, en République Tchèque, ou aux Pays-Bas par la dispensation de médicaments à l’unité ? Affaire à suivre


Source : lequotidiendumedecin.fr