Le ministère dévoile sa liste de près de 450 médicaments « essentiels », la Société de pharmacologie suggère déjà des évolutions

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Publié le 14/06/2023
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Crédit photo : S.Toubon

En parallèle de l’annonce par Emmanuel Macron de la relocalisation de la production d’une cinquantaine de médicaments prioritaires, le ministre de la Santé a présenté une liste « évolutive » de près de 450 médicaments jugés « essentiels ». « Pour ces molécules, les industriels devront avoir quatre mois de stocks », a indiqué François Braun au « Parisien ».

Conçue en collaboration avec plusieurs sociétés savantes et sur la base d’une méthodologie utilisée par la Société française d’anesthésie-réanimation (Sfar), cette liste prend en compte la « pratique clinique », la « criticité du besoin » et le « caractère d’urgence de la spécialité médicale (infectiologie, endocrinologie, anesthésie-réanimation…) », est-il détaillé. Elle « comprend plus de 40 % des médicaments qui ont eu des déclarations de rupture dans les deux dernières années », est-il souligné.

La démarche est jugée « essentielle » par le Pr Dominique Deplanque, président de la Société française de pharmacologie et de thérapeutique (SFPT), alors que « ces dernières années, des difficultés d’approvisionnement sur certains médicaments soulèvent des enjeux de santé publique ». Mais il reste circonspect sur l’approche adoptée. « La SFPT n’a pas été invitée à participer à ces travaux, alors qu’elle rassemble un grand nombre des spécialistes français du médicament, de leur développement à leur utilisation », s’étonne-t-il.

ASMR et balance bénéfice/risque à prendre en compte

Aussi, « ni l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) ni la Haute Autorité de santé (HAS) ne semblent avoir été sollicitées, alors même que certains médicaments ne mériteraient pas nécessairement de figurer dans cette liste et que d’autres, avec une meilleure évaluation par la HAS, n’y sont pas », regrette-t-il.

Il s'interroge également : « A priori, la liste ne comprend pas de corticoïdes inhalés alors qu’ils sont essentiels dans le traitement de l’asthme. À l’inverse, plusieurs inhibiteurs de la pompe à protons y sont mentionnés. Est-ce bien nécessaire ? »

Alors que cette liste est « amenée à s’enrichir, être complétée, modifiée, en fonction des pratiques ou du contexte sanitaire », précise le ministère, le président de la SFPT suggère de prendre en compte, dans le cadre d’un réexamen, les évaluations d’amélioration du service médical rendu (ASMR) de la HAS. Et, au sein d’une même classe de médicaments, « il faudrait peut-être prioriser les différents candidats selon l’état de l’art et le rapport bénéfice/risque de chaque médicament selon l’indication », préconise-t-il.

Sur la base de cette liste, le ministère prévoit d’établir une feuille de route « dans les semaines à venir » visant « le renforcement des efforts de prévention » et à « éviter au maximum de futures pénuries ». Plusieurs pistes sont déjà lancées, explique le ministère. À côté de la relocalisation de la production annoncée par le président de la République, sont évoquées des actions « pour mieux garantir la disponibilité des médicaments (suivi des capacités d’approvisionnement, analyse des pratiques des prescriptions et des tendances d’achat, etc.) », une « cartographie et renforcement des chaînes de production », la mise en œuvre de « solutions de production de secours », mais aussi des actions de prévention, dès le plus jeune âge (gestes barrières, vaccination, bon usage des antibiotiques).

L’objectif affiché est, in fine, d’« assurer la disponibilité d’au moins un médicament essentiel dans chaque classe de médicament pour une pathologie donnée », avance le ministère.


Source : lequotidiendumedecin.fr