L'efficacité de l'hydroxychloroquine contre le coronavirus soumise à une nouvelle étude

Par
Publié le 23/03/2020
Chloroquine

Chloroquine
Crédit photo : SPL/PHANIE

L’hydroxychloroquine est-elle ou non une arme efficace pour lutter contre le Covid-19 ? C’est en partie pour répondre à cette question qu’a été lancé ce dimanche un essai randomisé européen qui évaluera plusieurs options thérapeutiques chez des patients atteints de Covid-19.

Alors que le nombre de malades et de décès augmente considérablement, la quête d’un traitement efficace est de plus en plus cruciale.

En février, des données chinoises avaient déjà attiré l’attention sur ce type de traitement en montrant une efficacité in vitro de la chloroquine et de l’hydroxychloroquine sur le SARS-CoV-2 et en rapportant plusieurs observations cliniques d'amélioration de patients.

La semaine dernière le Pr Didier Raoult, infectiologue à Marseille, a relancé l’espoir, mais aussi la controverse, en présentant les résultats d’une étude ayant testé l’effet de l’hydroxychloroquine, chez 20 patients COVID-19 pris en charge dans la cité phocéenne. 

Ces patients, dont l’infection avait été confirmée biologiquement, pouvaient être cliniquement peu symptomatiques ou présenter des symptômes respiratoires hauts ou bas. Ils ont reçu 200 mg d’hydroxychloroquine trois fois par jour. Six patients ont bénéficié en sus, d’un traitement antibiotique par azithromycine instauré sur des critères cliniques pour prévenir une éventuelle surinfection. Tous ont subi des prélèvements nasaux pharyngés répétés avec mesure de la charge virale. Les résultats ont été comparés aux données recueillies auprès de 16 patients également infectés mais non traités par hydroxychloroquine.

Critiques sur la méthodologie

À j6, 70 % des patients traités par hydroxychloroquine étaient guéris virologiquement, comparativement à 12,5 % dans le groupe témoin (p = 0,001). « Malgré la petite taille de l’échantillon, notre enquête montre que le traitement à l'hydroxychloroquine est significativement associé à une réduction/disparition de la charge virale chez les patients Covid-19 et son effet est renforcé par l'azithromycine », résument les auteurs.

Une conclusion loin de faire l’unanimité parmi la communauté scientifique souvent critique sur la méthodologie de l’étude. Les reproches portent notamment sur les disparités entre les patients traités et les patients contrôles ou encore la sortie du protocole des malades admis en réanimation ou décédés chez qui l’hydroxychloroquine a été arrêtée.

Même si la toxicité de l’hydroxychloroquine est moindre que celle de la chloroquine notamment au niveau cardiaque, ses effets secondaires potentiels suscitent aussi des questions.

Malgré ces réserves, les autorités françaises semblent vouloir y croire. « J'ai demandé que l'étude du Pr Raoult puisse être reproduite à plus large échelle dans d'autres centres hospitaliers par d'autres équipes indépendantes. Aujourd'hui, je n'ai aucune donnée suffisamment validée scientifiquement pour tendre vers une recommandation, a déclaré samedi soir Olivier Véran. Mais j'ai donné toutes les impulsions nécessaires pour que nous ayons ces données dans les 15 jours. Si les résultats étaient positifs, nous pourrions aller vers une thérapeutique. À l’inverse, s'ils étaient décevants, nous aurions essayé. »

D’autres pistes thérapeutiques à l’étude

L’hydrochloroquine sera en fait testée dans l’un des bras de l’essai européen randomisé Discovery lancé ce week-end. Cette étude randomisée devrait inclure 3 200 patients européens dont 800 français. Elle évaluera l’efficacité de 4 stratégies thérapeutiques qui pourraient s’avérer efficaces contre le Covid-19, selon des données scientifiques préliminaires (remdesivir, lopinavir + ritonavir, lopinavir + ritonavir +interféron et l’hydroxychloroquine) 

« La grande force de cet essai est son caractère « adaptatif ». Cela signifie que très rapidement les traitements expérimentaux inefficaces pourront être abandonnés et remplacés par d’autres molécules qui émergeront de la recherche. Nous pourrons donc réagir en temps réel, en cohérence avec les données scientifiques les plus récentes, afin de mettre en évidence le meilleur traitement pour nos malades », souligne le Dr Florence Ader qui pilote l’essai en France. L’analyse de l’efficacité et de la sécurité du traitement sera évaluée 15 jours après l’inclusion de chaque patient.

Sans attendre jusque-là, plusieurs médecins de l'institut Méditerranée Infection, dont le Pr Raoult, viennent de publier un communiqué dans lequel ils annoncent avoir décidé de « proposer pour tous les patients infectés au plus tôt de la maladie, dès le diagnostic un traitement par l’association hydroxychloroquine Azithromycine dans le cadre des précautions d’usage de cette association (avec notamment un électrocardiogramme à J0 et J2), et hors AMM ».

Ce lundi soir*, Olivier Véran a par ailleurs demandé, s'appuyant sur un avis du Haut conseil de la santé publique (HCSP), d'inclure le plus de patients possibles dans les différents essais cliniques. Concernant spécifiquement l'hydroxychloroquine, l'avis du HCSP recommande de « ne pas utiliser ce traitement en l’absence de recommandations à l’exception de formes graves hospitalières, sur décision collégiale des médecins et sous surveillance médicale stricte », a rapporté le ministre de la santé. A à ce stade, le HCSP exclu toute prescription dans la population générale ou pour des formes non sévères.    

* Article mis à jour à 19h40


Source : lequotidiendumedecin.fr