Près d'un tiers des morts prématurées pourrait être évité en France

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Publié le 14/05/2017
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Crédit photo : VOISIN/PHANIE

En France, si l’essentiel de la mortalité concerne les personnes âgées avec des espérances de vie à 65 ans de 23,5 ans pour la gent féminine et de 19,7 ans pour les hommes en 2015, le poids des décès prématurés avant 65 ans demeure élevé, représentant près d’un décès sur cinq. On constate d’ailleurs que la mortalité prématurée est deux fois plus importante chez les hommes. Ainsi, en 2013, 30 % des morts prématurées s’avéraient évitables et 3,3 fois plus d’hommes étaient concernés que de femmes. Toutes ces données proviennent du rapport 2017 sur l’état de santé de la population Française récemment publiée par la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DREES) et l'agence nationale Santé publique France.

Le poids des maladies chroniques et des troubles psychiques

La prévalence des maladies chroniques est en hausse. Or, si la cause principale reste l’augmentation de l’espérance de vie, d’autres facteurs y sont aussi pour beaucoup. Certains sont plutôt positifs comme l’amélioration des diagnostics, mais la sédentarité, l’inactivité physique, l’obésité, sont des facteurs délétères.

Par exemple, si le taux de mortalité par AVC ne cesse de diminuer depuis les années 2000, l’incidence des patients hospitalisés est en hausse chez les moins de 65 ans, et ce depuis 2002 alors qu’ elle tend à se stabiliser chez les personnes plus âgées depuis 2008. Cette augmentation chez des individus plus jeunes pourrait être liée à la prévalence en hausse de certains facteurs de risques (tabagisme). De même, les hospitalisations dues à des exacerbations de BPCO ont aussi augmenté entre 2000 et 2014 notamment chez les femmes. La prévalence de diabète traité pharmacologiquement est aussi en hausse passant de 4,4 % en 2010 à 4,7 % en 2013.

Ainsi, l’effet conjugué du vieillissement de la population et l’amélioration globale de survie en cas de pathologie chronique fait que de plus en plus de personnes sont concernées par ces maladies. Plus préoccupant : cet accroissement concerne aussi les moins de 65 ans et tout particulièrement la gent féminine.

Toutefois, ce sont les troubles mentaux qui demeurent les pathologies les plus inquiétantes. TOC, dépression, schizophrénie, troubles bipolaires, toutes réunies, elles s’avèrent responsables de la majorité des décès par suicide, d’incapacités ou de handicaps lourds ainsi que d’une qualité de vie détériorée pour les personnes atteintes. Par exemple, les taux d’hospitalisations pour tentative de suicide étaient de 159 pour 100 0000 habitants en 2014, les adolescents entre 15 et 19 ans représentant la majorité des cas.

Les enjeux déterminants de la prévention

Compte tenu de l’importance de la mortalité prématurée qui serait évitable en France, l’enjeu majeur reste d’identifier les comportements de la population qui y contribuent. À première vue, le tabac demeure l’ennemi public n° 1. Même si après une hausse remarquée entre 2005 et 2010, la prévalence du tabagisme est en légère diminution en 2014 passant de 29,7 % à 28,6 %.

L’alcool est lui aussi souvent pointé du doigt. Pourtant, on constate une réduction constante de la consommation, au point que le pays n’est plus en tête de peloton des pays les plus consommateurs. Petit bémol, la part de la population âgée entre 18 et 75 ans concernée par au moins « une alcoolisation ponctuelle importante » s’est accrue allant de 36 % à 38 % entre 2010 et 2014. Cette évolution est surtout marquée chez les jeunes de 18 à 25 ans. Apparemment, la quantité d’alcool pure mise à disposition des consommateurs en 2012 correspond à 2,6 verres standards par jour et par habitant de 15 ans et plus.

La pollution reste un problème car malgré les réductions d’émissions nationales, les concentrations mesurées dans l’air ambiant de nombreux polluants atmosphériques comme le NO2 ou O3 demeurent stables et dépassent souvent les limites fixées par l’OMS et les valeurs réglementaires européennes. D’après les estimations, les particules fines PM2.5 seraient à l’origine d’au moins 78 000 décès prématurés par an dans l’Hexagone (soit 9 % de la mortalité du pays).

Point positif, la France reste un peu épargnée au niveau du surpoids et de l’obésité. Néanmoins, un adulte sur six est obèse et la moitié de la population serait en surpoids.

Inégalités obligent

Les conditions de travail peuvent également impacter la santé, notamment au niveau des expositions professionnelles telles que la présence d’agents mutagènes ou reprotoxiques (pesticides). La pénibilité, un environnement agressif (bruit ou température extrême) ou des facteurs de risques psychosociaux (pression, manque de reconnaissance) ont aussi des conséquences sur la santé mentale et physique des personnes. D’ailleurs, en 2010, 40 % des salariés en France métropolitaine étaient exposés à au moins un facteur de pénibilité et 12 % au moins à un agent cancérogène. Sans surprise, ces risques restent inégalement répartis selon les catégories socioprofessionnelles, et maintiennent les inégalités sociales de santé. Notamment les maladies en lien avec la souffrance psychique sont plus souvent signalées chez les cadres et les professions intermédiaires, alors que les maladies à caractère physique sont plus fréquentes chez les ouvriers et les employés.

En outre, les disparités sociales de santé sont aussi territoriales. Ces situations sont fréquemment accentuées par le contexte économique et la disponibilité locale des services (sanitaires ou médico-sociaux). Par exemple, l’espérance de vie en moyenne est plus élevée dans la partie sud de la France, et en île de France. La proportion de « buveurs quotidiens » de boissons alcoolisés est nettement plus importante en Occitanie (18 % contre 11 % de la moyenne nationale). Au niveau du tabagisme, la région Grand-Est affiche le nombre le plus notable de fumeurs. Enfin, le taux de prévalence de diabète traité s’élève à 5,8 % dans les Hauts-de-France contre 4,7 % au niveau national.


Source : lequotidiendumedecin.fr