Covid-19 : l’ivermectine inefficace, conclut une étude du Jama

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Publié le 05/03/2021
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Crédit photo : VOISIN/PHANIE

Bien qu'elle suscite un engouement important, notamment en Amérique latine, l'ivermectine peine à démontrer un éventuel bénéfice dans le Covid. En témoigne, la conclusion d’un essai clinique colombien, randomisé et en double aveugle, publié hier par le Journal of the American Medical Association (JAMA).

De précédentes études conduites in vitro ou sur des modèles animaux avaient suggéré que ce médicament antiparasitaire pouvait réduire la réplication du SARS-CoV-2 au sein des cellules humaines peu après la contamination. Cependant, aucun essai clinique bien mené n’a confirmé le potentiel curatif de l’ivermectine chez l’Homme. « La plupart des études cliniques (rendues publiques) récemment sur le sujet sont peu concluantes : la grande majorité sont soit des prépublications non validées par leurs pairs soit, […] des études [comportant] des biais méthodologiques rendant les résultats difficilement interprétables », expliquait la Société française de pharmacologie et de thérapeutique à l’AFP le mois dernier. Dans ce contexte, les auteurs de l’étude du JAMA ont proposé d’évaluer la capacité de l’ivermectine — administrée en phase précoce de la maladie — à accélérer le rétablissement des patients infectés par le SARS-CoV-2.

Pour cela, les chercheurs ont recruté et suivi, entre juillet et décembre 2020, 400 adultes positifs au SARS-CoV-2 en RT-PCR et présentant depuis moins de 7 jours des symptômes légers de covid-19. 200 ont alors reçu pendant 5 jours 300 μg/kg d’ivermectine par voie orale, quand 200 se sont vus administrer un placebo.

Pas de guérison accélérée avec l’ivermectine

Résultat : « l'ivermectine, comparée au placebo, n'a pas amélioré de manière significative le délai de résolution des symptômes », constatent les auteurs. Que ce soit dans le bras interventionnel ou dans le groupe contrôle de l’essai, 80 % environ des volontaires ne présentaient en effet plus de symptômes à j21.

En outre, le traitement testé ne s'est pas non plus avéré associé à une réduction de la proportion de complications de la maladie dans le groupe interventionnel. Quel que soit le bras de l’essai considéré, 2 à 3 % des patients ont en effet manifesté une détérioration de leur état clinique. De même, « il n'y avait pas de différence significative de la proportion de patients nécessitant une intensification des soins dans les 2 groupes de traitement », rapportent les chercheurs.

Des performances très décevantes donc, en fait plus ou moins prévisibles du point de vue des auteurs. D’après eux, ces résultats concordent en effet avec des modélisations pharmacocinétiques mettant en évidence la difficulté à atteindre, chez l’Homme, les concentrations jugées efficaces in vitro ; selon ces projections, les taux plasmatiques d’ivermectine totale n’attendraient pas, in vivo, la concentration de principe actif entraînant 50 % de l’inhibition virale, résument les auteurs. Et ce « même avec des doses 10 fois supérieures à la dose approuvée » pour les indications classiques du médicament – par ailleurs connu pour ses effets indésirables hépatiques.

Des études à mener chez des patients plus à risque de complications

Toutefois, on peut s’interroger quant à la prévalence anormalement basse des complications associées au covid-19 observée au sein de l’effectif recruté. Un phénomène que les auteurs expliquent à la fois par le jeune âge des volontaires – dont l’âge médian était de 37 ans – et par leur bon état de santé, marqué par de très rares comorbidités. « Par conséquent, la capacité de l'ivermectine à empêcher la progression du COVID-19 léger vers des stades plus sévères devrait être [à nouveau] évaluée dans [d’autres] essais de plus vaste ampleur », admettent les chercheurs.


Source : lequotidiendumedecin.fr