Alors que le gouvernement doit présenter un projet de loi d'ici au 21 septembre, préparé par Agnès Firmin Le Bodo, les divergences autour de l'aide active à mourir persistent au sein de la classe politique. Les parlementaires LR, qui auront à discuter le texte gouvernemental en faveur d'une ouverture, ont notamment manifesté, par anticipation, leur désaccord, rejoignant les positions de la Société française d’accompagnement et de soins palliatifs (Sfap) ou d'Alliance Vita.
Un rapport de la commission des Affaires sociales du Sénat, à dominante LR, remis ce 28 juin, conclut ainsi qu'autoriser l'aide active à mourir en France serait une voie « inappropriée et dangereuse », une position partagée par deux des trois autrices, tandis que la sénatrice socialiste Michelle Meunier plaide pour l'ouverture tant de l'assistance au suicide que de l'euthanasie.
Jugeant la demande sociale « diffuse et équivoque », les sénatrices LR Corinne Imbert et Christine Bonfanti-Dossat estiment que « l'ouverture d'une aide active à mourir est périlleuse à de nombreux égards », faisant d'un changement législatif « une gageure », qui porterait en lui le risque « d'une banalisation de nature à brouiller quelques repères sociaux fondamentaux ».
Elles pointent notamment la complexité de définir des critères d'une aide active à mourir, et les difficultés propres au suicide assisté (capacité notamment à s'auto-administrer le produit létal) et à l'euthanasie (rôle des soignants, etc.). Elles invoquent certains exemples étrangers pour alerter sur « un encadrement a posteriori extrêmement difficile » ou sur une « offre (qui) crée sa propre demande ».
Défense des soins palliatifs
Invitant à « privilégier la sollicitude au nihilisme », les sénatrices LR proposent de renforcer l'application de la loi Leonetti-Claeys de 2016, argumentant que si elle était pleinement effective, « les soins palliatifs seraient en capacité de répondre aux souffrances de patients et à la prise en charge nécessaire en fin de vie ».
Sur la même ligne, ce même 28 juin à la chambre basse, 58 députés LR, au premier rang desquels figurent le Pr Philippe Juvin et Patrick Hetzel, ont déposé une proposition de résolution pour « rendre effectifs les soins palliatifs sur tout le territoire ». Le texte vise à garantir leur accès « à tout citoyen qui en fait la demande », ou sa famille ou ses proches, par la création d'« au moins une unité de soins palliatifs et une équipe mobile de soins palliatifs par département ».
« Si le droit d'accéder aux soins palliatifs a été consacré en 1999 et réaffirmé en 2016, l'accès aux soins palliatifs demeure insatisfaisant, notamment en raison de disparités territoriales. Peut-on accepter qu'il y ait encore vingt et un départements totalement dépourvus d'unités de soins palliatifs à la fin 2021 ? », s'interrogent les députés dans l'exposé des motifs. Et d'appeler à mettre en œuvre de telles mesures avant toute modification de la loi de 2016.
Des ministres en ordre dispersé
Le gouvernement par la voix d'Agnès Firmin Le Bodo entend, lui, aller plus loin qu'un simple renforcement de la loi Leonetti-Claeys et ouvrir « un nouveau droit pour les Français », selon les mots de la ministre déléguée chargée des professions de santé. Elle s'exprimait ce 28 juin, en clôture des assises de l'Association pour le droit de mourir dans la dignité. L'ADMD est favorable à la légalisation de l'euthanasie et du suicide assisté, « sans obligation pour quiconque, y compris les soignants ».
Comme lors du congrès de la Sfap il y a deux semaines, Agnès Firmin Le Bodo s'est dite « particulièrement attachée à trouver un équilibre entre l'ouverture de ce nouveau droit pour les Français (et les) préoccupations légitimes des professionnels ».
« La profondeur de l'orientation de la société française vers une évolution de la loi visant à élargir les droits des malades sur leur fin de vie s'est confirmée au-delà de la perception du législateur », a-t-elle déclaré, faisant référence à la convention citoyenne et au Comité consultatif national d'éthique (CCNE).
Selon son cabinet, l'heure n'est plus au débat sur les principes (ouvrir ou non l'aide active à mourir), mais sur les modalités d'exercice de ce nouveau droit, qui font l'objet d'une réflexion de la part de deux groupes de travail, l'un réunissant les professionnels de santé, l'autre des parlementaires. Il s'agit par exemple de définir les conditions d'éligibilité : si l'exclusion des mineurs semble acquise, tout comme la clause de conscience spécifique pour les soignants (réponse à ceux qui considèrent que « donner la mort n'est pas un soin »), la définition d'une affection engageant le pronostic vital à moyen terme fait débat (6 à 12 mois ?), tout comme la notion de discernement. Plusieurs réunions sont encore prévues jusqu'au mois de juillet, puis le 7 septembre sur ce projet de loi en préparation, qui doit aussi aborder les droits des patients et l'accompagnement du deuil, et les soins palliatifs, qui font, eux, en parallèle, l'objet d'une stratégie décennale à venir.
Mais l'unité du gouvernement sur le sujet de la fin de vie n'est que de façade. Le ministre de la Santé, François Braun, s'est notamment montré réservé sur une loi qui « changerait profondément notre société et notre rapport à la mort ». Attention à « un message implicite » dangereux pour les « personnes vulnérables », a renchéri Jean-Christophe Combe, ministre des Solidarités.
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