La négociation sur les assistants médicaux, futur casse-tête ?

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Publié le 24/01/2019
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negos assistants

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Crédit photo : SEBASTIEN TOUBON

La tâche est ardue, mais l'enjeu est de taille : gagner du temps médical.

Aujourd'hui débute la négociation conventionnelle sur les assistants médicaux, entre le directeur général de l'assurance-maladie (CNAM) Nicolas Revel et les syndicats de médecins libéraux. La liste des sujets sur lesquels les partenaires doivent s'accorder peut faire pâlir. Outre les missions de ces assistants, dont 4 000 sont attendus d'ici à 2022, il faudra définir les conditions d’éligibilité des praticiens à l'aide financière, le niveau de financement de l’assurance-maladie, les contreparties mesurables et les modalités d’évaluation de ce dispositif. De quoi donner du fil à retordre pour les deux mois qui viennent.

Profil infirmier

Quelles seront les tâches dévolues à l'assistant médical ? Le conseil de l'Union nationale des caisses d'assurance-maladie (UNCAM) a élaboré plusieurs pistes (administratives et médicales) en se fondant sur les exemples du secteur dentaire et à l'étranger (encadré). Avant la consultation, il s'agirait de récupérer les résultats d'examens, prendre les constantes, mettre à jour le dossier patient ou préremplir les certificats médicaux. Après la consultation, l'assistant devrait organiser la prise en charge du patient, faire le lien avec les établissements et donner des conseils de prévention, de dépistage et de vaccination. « Cela nécessite de préciser les profils et les professions pouvant remplir ces tâches », indique l'UNCAM, qui vise les infirmières et aides-soignantes.

La question de l'éligibilité sera un des points durs. À ce stade, la participation financière de la CNAM pour l'embauche d'un assistant par les généralistes et certains spécialistes (en tension) serait conditionnée au travail en cabinet de groupe, à l'exercice coordonné et à l'augmentation de la patientèle suivie, a cadré le ministère. Mais certaines dérogations pourraient être accordées en zones sous-denses.

Le montant de l'enveloppe octroyée et son évolution sur la durée sont également à déterminer. La CNAM et la ministre envisagent une aide dégressive « compensée par l'accroissement de la file active des médecins ». Si ce point n'est pas respecté, les aides seraient remises en cause. Dans son discours de septembre 2018 lançant le plan santé 2022, Emmanuel Macron espérait que le déploiement de 4 000 assistants médicaux représenterait un gain de temps médical équivalent à « près de 2 000 médecins supplémentaires »

Course à l'acte ?

Ces orientations risquent de se heurter aux revendications des syndicats médicaux, qui se préparent à une négociation « difficile » sur le financement des assistants. Tous rejettent le prérequis d'une augmentation de l'activité ou de la productivité. « C'est contradictoire avec le discours de la ministre sur la pertinence des actes », observe le Dr Jean-Paul Ortiz, président de la CSMF. Même analyse au SML, qui juge pas « supportable » que de telles contreparties soient exigées. « Imposer une course à l'acte est un non-sens », indique le syndicat du Dr Philippe Vermesch.

MG France estime également que financement et augmentation de l'activité ne peuvent « en aucun cas » être liés. La FMF abonde en ce sens : « Prendre plus de patients, ça va être compliqué, les généralistes sont déjà surchargés. C'est une méconnaissance complète de la médecine libérale ! », s'agace son président Jean-Paul Hamon.

L'expertise des spécialités de bloc

D'autres jalons sont posés. MG France comme le SML exigent un financement « pérenne ». La CSMF souhaite de son côté que « toutes les spécialités » soient éligibles au principe d'un assistant par médecin, notamment celles en difficulté.

Les spécialités sur plateaux techniques portent un regard plus « éloigné » sur le sujet. Eux travaillent déjà avec des « assistants » dans les blocs opératoires (infirmiers-anesthésistes, instrumentistes, aides opératoires). « Nous allons pouvoir apporter notre expérience, indique le Dr Philippe Cuq, coprésident du syndicat Le BLOC. Mais n'oublions pas le fond du débat, qui est la carence de rémunération des médecins. Si leurs honoraires le permettaient, les généralistes auraient déjà chacun une secrétaire et un assistant ! »

Marie Foult

Source : Le Quotidien du médecin: 9718