Épilation : les dermatologues pointent les dangers potentiels de la lumière pulsée

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Publié le 16/09/2021
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Crédit photo : BURGER/ PHANIE

Après l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), la Société française de Dermatologie (SFD) et son groupe Société Française des Lasers en Dermatologie (SFLD) pointent à leur tour les dangers potentiels de l’épilation par lumière intense pulsée (IPL) et plaident pour un meilleur encadrement de cet « acte médical ».

Depuis le début des années 2000, les appareils d’épilation par IPL, qui permettent la destruction du poil et du bulbe pileux par effet thermique, connaissent un essor important. Si bien qu’à l’heure actuelle, la lumière pulsée serait utilisée non seulement par des dermatologues et médecins professionnels de l’esthétique, mais aussi par des employés de salons d’esthétique à la formation parfois inadaptée, voire par des particuliers. Or, bien que les appareils d’épilation à la lumière pulsée aient « la réputation d'être moins efficaces que les « vrais » lasers, [ils] exposent, du fait de leur moindre sélectivité, à plus d'incidents, et sont plus difficiles à utiliser qu'un laser », rappelle la SFD.

Un risque de dénaturation de lésions potentiellement cancéreuses

En fait, la lumière émise par l’appareil cible la mélanine présente dans le follicule pileux, tout en minimisant autant que possible l’énergie déposée dans les tissus proches. Cependant, comme le précise l'Anses, « les quantités d’énergie déposées respectivement dans les poils et la peau dépendent non seulement des caractéristiques de l’appareil, mais aussi de celles de la personne épilée (couleur de peau, contraste entre la couleur de la peau et des poils, sensibilité particulière, etc.) ». Ainsi des facteurs matériels et individuels, tissulaires, peuvent-ils rapidement exposer à divers risques parfois « conséquents ».

Au-delà de douleurs et d’érythèmes, la SFD évoque l’apparition « de cloques, de croûtes, de brûlures cutanées, de troubles de la dépigmentation (dyschromie secondaire) pouvant laisser des cicatrices et des dépigmentations durables ». Elle met aussi en garde contre des lésions oculaires « sévères » susceptibles de survenir lors d’une utilisation trop proche des yeux, notamment au cours de l’épilation des sourcils. Mais surtout, la société savante fait état d'un risque de retard de diagnostic des cancers de la peau en traitant "involontairement" des lésions cutanées non diagnostiquées telle un mélanome présent dans le champ d’épilation. « L’épilation par IPL peut être responsable, au minimum de modifications de ces lésions alors plus difficiles à surveiller, et au maximum de craintes pour leurs évolutions futures », estime la SFD.

Mieux informer les consommateurs

Ainsi l’Anses recommande-t-elle « aux fabricants d’appareils IPL destinés aux particuliers de mieux informer ces derniers des contre-indications » : âge inférieur à 15 ans, grossesse et allaitement, présence de lésion ou de relief cutanée, antécédent de maladie dermatologique, couleur de peau ou nature de poil non adaptées (dépigmentation, duvet, etc.), exposition récente aux UV, tatouages et application locale de tout produit sur la zone à épiler (y compris médicaments anesthésiques), médicaments photo-sensibilisants, anticoagulants ou modifiant la pilosité.

Autres points sur lesquels l’Anses recommande une meilleure communication : les « précautions à prendre avant toute épilation » par IPL, à savoir porter des lunettes de protection, ne pas épiler les zones proches des yeux, raser préalablement la zone d’épilation, ne pas exposer une même zone plusieurs fois au cours d’une même séance, espacer les séances d’un mois.

Revoir le statut des épilateurs à lumière pulsée

Mais surtout, les deux instances prônent une meilleure formation des professionnels de l’esthétique. « Aujourd’hui, les niveaux de formation des professionnels amenés à utiliser ces appareils dans le milieu de l’esthétique sont hétérogènes », aucune obligation et aucun socle commun n’étant établis à l’heure actuelle, déplore l’Anses. Principal enjeu : faciliter l'identification des situations dans lesquelles un diagnostic dermatologique préalable est requis.

Le statut des appareils de lumière pulsée est aussi en question. Jusqu’à présent, ils n’étaient soumis à aucune réglementation spécifique, d’où l’impossibilité de réserver leur utilisation aux médecins et « l'existence de différents types d'appareils d'IPL qui ne sont pas conformes en termes de puissances maximales autorisées, de respects des normes de sécurité et de maintenance alors qu'ils sont accessibles par le grand public », déplore la SFD. L’entrée en vigueur du nouveau règlement européen relatif aux dispositifs médicaux pourrait changer la donne, cette nouvelle mouture couvrant les dispositifs esthétiques sans finalité médicale.


Source : lequotidiendumedecin.fr