Santé publique, épidémiologie, ou télémédecine

Cinquantenaire, SOS médecins porte l'innovation au lit des patients

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Publié le 06/06/2016
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Crédit photo : AFP

« Vous voyez des patients à domicile qu'on voit peu, vous êtes au cœur du 1er recours, vous allez chez les gens ! », s'exclame, devant un parterre de membres de SOS médecins la Pr Frédérique Noël, responsable du département de médecine générale de Paris Descartes. Au-delà de sa mission de soins évidente, la place singulière de SOS Médecins lui confère un rôle crucial en épidémiologie, en produisant des données de santé inédites. 

Depuis 10 ans, SOS médecins est ainsi engagé dans un partenariat avec l'ex Institut national de veille sanitaire (InVS), aujourd'hui Santé publique France (SPF), en faisant remonter au système SurSaUD (qui agrège aussi les chiffres des urgences et de la mortalité) les données de ses 10 000 visites quotidiennes. 

Chikungunya, canicule, grippe, bronchiolite, etc. 

Le Dr Céline Caserio-Schönemann (SPF) a souligné l'implication grandissante des associations dans le système de surveillance : au nombre de 29 en 2006, elles sont aujourd'hui 61 (sur 63), réparties sur tout le territoire (à raison d'au moins deux par régions, exception faite de la Corse). « Il faut saluer la qualité des données, élément essentiel pour l'épidémiologie », souligne la médecin, alors que 93 % des diagnostics SOS sont codés (contre 60 % en 2010). Ce partenariat fructueux a ainsi donné naissance à 440 bulletins hebdomadaires depuis 2006. Mais aussi à une surveillance pointue dans différents champs attendus (grippe, gastro-entérite, bronchiolite, canicule, événements sportifs), en jetant la lumière sur les jeunes adultes et les enfants peu vus aux urgences, et inattendus (chikungunya, dengue, rougeole, inondations, attentats). 

Big Data

À l'avenir, SOS Médecins pourrait même investir davantage les pathologies émergentes et chroniques, à l’égard desquelles le réseau peut diffuser des messages de recommandation, suggère le Dr Caserio-Schönemann. 

« Du vrai big data », c'est aussi l'aventure dans laquelle le chercheur Laurent Toubiana (Inserm/UPMC Paris VI) s'est lancé grâce aux données de SOS Médecins. « Dès 2000, je me suis rendu compte que les SOS étaient des geeks : ils avaient déjà tous un blackberry », sourit-il. L'Institut de recherche pour la valorisation des données de santé (IRSAN) s'empare depuis sa création en 2012 des 23,7 millions d'actes codés annuels pour nourrir des études. Parmi les projets en cours : des thèses sur les liens entre pollution et santé, les AVC-AIT, la laryngite, et la grippe. 

Télémédecine et humain

Les innovations de SOS Médecins ne s'arrêtent pas aux données : l'association est aussi le creuset de la télémédecine, incontournable pour rencontrer les populations isolées, dans un contexte de baisse de la démographie médicale, a souligné le Dr Pierre Simon, de la Société Française de télémédecine. « Nous entrons dans une nouvelle ère » a-t-il exhorté, en décrivant un système de santé bouleversé par le numérique, et l'avènement d'une médecine des 5 P : « prédictive, préventive, personnalisée, participative et... prouvée ! » énumère-t-il. Une manière de dire que dans une médecine bouleversée par « la révolution transhumaniste », telle qu'a pu la décrire Luc Ferry, les SOS Médecins seront toujours indispensables pour palper les patients et les écouter à leur chevet.

* événement organisé par le « Quotidien du médecin »

Coline Garré

Source : Le Quotidien du médecin: 9502