Entretien avec le président de l'Institut national de la e-santé

Pr Fabrice Denis : « Aider les médecins à faire le tri dans les applis »

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Publié le 27/05/2022
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L’Institut national de la e-santé (INeS) a été lancé début mai au Mans. Son président, le Pr Fabrice Denis, oncologue et créateur d’applis, veut former les médecins et labelliser les solutions pertinentes, à l'heure où la santé numérique explose. Beaucoup reste à faire !

Crédit photo : DR

LE QUOTIDIEN : Pourquoi avoir eu l'idée de créer cet Institut national de la e-santé ?

Pr FABRICE DENIS : La e-santé est un domaine très récent, en fort développement depuis trois ou quatre ans, avec de nouvelles solutions proposées par les éditeurs aux médecins. Mais aujourd’hui, ils ne disposent pas d’éléments suffisants pour faire le tri : Sur quels critères choisir une appli ? Laquelle prescrire à tel patient dans telle pathologie ?

Parallèlement, la formation des médecins est très insuffisante, de même que l’offre de formation. Seules quelques facultés de médecine y consacrent quelques heures d’enseignement initial et il y a très peu de DU (Paris-Cité, Lille notamment). La pandémie a joué un rôle d’accélérateur, avec le développement des téléconsultations et des télé-prescriptions. Les médecins ont été obligés de se lancer, assez brutalement, et les patients se sont appropriés les applis en lien avec le Covid-19. 

Que proposerez-vous concrètement aux médecins ?

L’Institut va les accompagner sur deux axes : les former à la e-santé et les guider dans leur choix de solutions évaluées et labellisées. Voici quelques exemples de modules de formation : téléconsultation et télésurveillance, avec des informations sur les outils ; intelligence artificielle (les applis en médecine et leurs limites) ; méthodologie d’études cliniques en e-santé ; aspects réglementaires ; développement d'une application, depuis l’idée au remboursement.

En pratique, comment l’enseignement sera-t-il assuré, et par qui ?

Les inscrits peuvent choisir une formation de 30H ou 60H/an, qui délivrera deux diplômes distincts – certificat ou master exécutif. Nous avons des agréments de DPC, les médecins seront donc pris en charge dans le cadre de leur formation continue. Pour ceux qui n’ont pas l’intention d’être diplômé, il est possible de « piocher » parmi les cours, sans suivre la totalité du cursus.

Pour l’instant, les cours sont en distanciel et asynchrones, ce qui correspond à la demande majoritaire. L’enseignement est délivré par plus de 40 experts. Nous sommes 22 fondateurs – médecins, enseignants, chercheurs, industriels, etc. – parmi lesquels des pointures comme le Pr Patrick Callier, le Dr Maxime Elbaz, le Pr Olivier Bonnot ou encore le Pr Olivier Guérin, pour n’en citer que quelques-uns. Et nous avons 24 enseignants supplémentaires.

Avez-vous mené de premières évaluations des solutions de e-santé ?

Nous rendrons nos premières évaluations en décembre. Nous disposons déjà d’une évaluation préliminaire menée sur 130 outils de e-santé variés en télésurveillance, télémédecine ou suivi du diabète et la note médiane est de… 11/20 sur la base des principaux critères : qualités techniques, niveau de preuve clinique, pertinence clinique. Je précise qu'une solution évaluée sur deux était un outil de télésurveillance. Il y a donc une nette marge d’amélioration ! En revanche, les solutions de téléconsultation françaises sont plutôt bien fichues. 

Propos recueillis par Sophie Cousin

Source : Le Quotidien du médecin