E-Nephro

Une évaluation de la télésurveillance 

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Publié le 13/04/2017
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En France, 3 millions de patients ont une maladie rénale chronique (MRC), souvent asymptomatique au stade précoce. Au stade ultime de la maladie, 80 000 reçoivent un traitement de suppléance : 45 000 sont dialysés et 35 000 sont porteurs d’un greffon rénal fonctionnel.

L’optimisation de leur prise en charge est soumise à plusieurs conditions : obtenir la participation active des patients et faciliter la communication entre patients et professionnels de santé et entre les différents professionnels intervenant dans la prise en charge.

Parmi les solutions, la télémédecine a reçu ce jour relativement peu d’attention. Ses applications potentielles sont pourtant multiples et parmi elles la télésurveillance offre des possibilités prometteuses : amélioration de l’autonomie des patients, renforcement de leur suivi, détection rapide et précoce des signes annonciateurs de détérioration de l’état de santé, diminution du nombre de complications aiguës et d’hospitalisations, réduction du nombre de venues dans un établissement de santé et donc moindres coûts pour le système de santé. Mais le problème crucial de la télésurveillance médicale réside dans la grande quantité d’informations générées par l’acquisition des données des patients, nécessitant du temps et une expertise médicale pour identifier les données suspectes. Les systèmes experts sont des outils d’aide à l’interprétation de grandes quantités de données permettant ainsi au médecin de se focaliser sur les cas anormaux.

En néphrologie, des effets bénéfiques de la télémédecine ont été montrés chez les patients en dialyse péritonéale avec une réduction des hospitalisations. En France, la télémédecine peut également être utilisée dans les unités de dialyse médicalisées. Mais, il existe peu de données sur les effets de la télémédecine en transplantation rénale et aucune concernant la MRC au stade 3-4.

Dans le cadre des investissements d’avenir, l’État français a lancé un appel à projet e-santé destiné à faire émerger des modèles économiques proposant un ensemble de services et reposant sur un large partenariat. C’est dans ce cadre que le projet E-Nephro a été sélectionné avec un promoteur industriel : Pharmagest Interactive. Il s’agit d’une étude scientifique médico-économique randomisée visant à comparer suivi habituel et télésurveillance. Le système comporte un dossier médical informatisé, des systèmes experts adapté à 3 types de patients, des patients atteints de MC stades 3 et 4, des dialysés hors centre et des transplantés, ainsi qu’une messagerie sécurisée. Ce dossier est partagé par le patient, son néphrologue, son médecin généraliste et son pharmacien d’officine. Le patient devient ainsi acteur de sa prise en charge à son domicile en enregistrant ses données cliniques ; ses données biologiques sont recueillies auprès des laboratoires de biologie. Le système permet également de gérer les programmes d’éducation thérapeutique.

Dans trois régions

Le projet a été mis en œuvre dans 3 régions: Lorraine, Hauts-de-France, Nouvelle Aquitaine. Depuis novembre 2015, 324 patients ont été inclus et l’étude devrait être terminée fin 2018. Ses points forts sont la coconstruction du système par un industriel de l’informatique en santé et des experts médicaux, l’apport des systèmes experts indispensables pour traiter et analyser les données, et les aspects organisationnels avec l’intervention d’une infirmière de coordination qui devient l’interlocutrice principale du patient et un relais indispensable entre le patient et ses médecins.

CHU de Nancy

Pr Michèle Kessler

Source : Bilan Spécialiste