À Bordeaux, les équipes de Médecins du Monde (MDM) multiplient les interventions dans les squats et bidonvilles auprès de populations vulnérables qui ont le sentiment d’être abandonnées face à la menace sanitaire, mais aussi alimentaire.
Masqués, une quinzaine de soignants bénévoles de la mission Squats de Médecins du Monde Bordeaux sont réunis en extérieur, ce mardi 7 avril, pour une formation au prélèvement Covid-19. Ces professionnels de santé, libéraux ou hospitaliers, consacrent une partie de leur temps à des interventions dans les squats et bidonvilles de l’agglomération.
En effet, l’élégante métropole bordelaise abrite, on le sait peu, plus de 150 bidonvilles et squats où vivent près de 2 500 personnes, pour la plupart allophones, dans une extrême précarité et promiscuité, souvent sans eau ni toilettes et, depuis le confinement, sans revenus. Des lieux qui peuvent rapidement dégénérer en foyer épidémique.
« La crise sanitaire témoigne de façon exacerbée des réalités auxquelles nous sommes confrontés », explique Anouk Chastand, médecin bénévole. Présents depuis des années auprès des populations vulnérables de Bordeaux, les 40 bénévoles de la Mission Squats MDM doivent composer avec le confinement d’une partie de l’équipe (âgés ou contaminés) et l’urgence de la situation. Mais en quelques jours, ils ont été rejoints par cinq nouveaux soignants, comme Flora, généraliste : « je connaissais le travail de l’association et son action auprès des populations qui n’ont pas accès aux soins. La crise sanitaire m’a poussée à m’engager ».
Face au Covid, MDM a recentré ses missions, constituant des équipes sanitaires mobiles (EQSAM) en partenariat avec l’ARS, le Samu social, la PASS mobile, et le soutien du Groupement d'intérêt public Bordeaux Métropole Médiation (GIP BMM). Chaque semaine, les équipes MDM rassemblant médecins, infirmiers et interprètes vont à la rencontre des habitants d’une douzaine de squats et bidonvilles.
Gestes barrières impossibles
Leur mission : informer sur la maladie, les symptômes et sensibiliser à des gestes barrières… souvent impossibles en l’absence de point d’eau, de savon, de gel hydroalcoolique (GHA). « Si menace il y a, elle est liée à l’insalubrité des conditions de vie de ces populations et à la défaillance des institutions, indique Morgan Garcia, coordinateur de la Mission Squats. Mais on note des avancées, la Métropole a entrepris l’installation de points d’eau, des kits sanitaires devraient être fournis. De notre côté, nous allons conditionner et distribuer 160 litres de GHA ».
« Il est aussi capital de tester ces populations », souligne Anouk Chastand. Mais les kits de test font défaut, des laboratoires de ville en ont fourni cinq, une dotation du CHU est attendue… De même, face aux cas suspects, les procédures longues et complexes contraignent à se faire tester hors du lieu de vie ou par une équipe inconnue, ce qui parfois décourage les patients. C'est pourquoi une simplification des procédures est prévue pour la réalisation des tests mais aussi pour l’orientation vers les centres de « desserrement » (72 places).
Urgence alimentaire
Confinées, les populations des bidonvilles sont désormais sans revenus et confrontées à la fermeture d’associations caritatives. D’où une tension alimentaire sans précédent. Face à ce nouveau défi de la faim, MDM a assuré la médiation auprès de plusieurs associations (Enfants de Coluche, Bienvenue, Secours populaire, Banque alimentaire…) qui ont démarré des distributions alimentaires. La plus spectaculaire a eu lieu le 1er avril dans le bidonville de la rue Lajaunie à Bordeaux, auprès de 350 personnes, des Roms de Bulgarie pour la plupart.
On le voit, la « débrouille » associative supplée au jour le jour un État bien silencieux ou débordé tandis que les collectivités locales commencent à se mobiliser. Pour les associatifs, la fragilité des populations des bidonvilles atteste d’années de lent abandon par les pouvoirs publics.
Pour l’heure, seuls quelques cas suspects (testés négatifs) ont été identifiés dans les squats et bidonvilles bordelais. Mais le danger persiste et le travail reste immense pour les bénévoles de Médecins du Monde déterminés, comme Lucile, infirmière : « Face à ces populations délaissées, nous devons prendre le relais, avec nos moyens ». Quitte parfois à utiliser des sacs-poubelles pour pallier le manque de surblouses.
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