LA RÉFORME de l’assurance-maladie de 2004 avait prévu la mise en place de conditionnements de trois mois pour le traitement d’un certain nombre d’affections de longue durée (ALD). La mesure devait, selon les pouvoirs publics, permettre à l’assurance-maladie de réaliser une économie d’une centaine de millions d’euros par an. Instaurés à la fin de 2005, les gros conditionnements ont augmenté leur part de marché à partir du début de l’année 2008, à la faveur de la mise en place des franchises. En effet, celles-ci s’appliquant au nombre de boîtes, indépendamment de leur prix, beaucoup de patients chroniques ont jugé plus économique de se faire prescrire des boîtes de trois mois de traitement plutôt que trois boîtes d’un mois. Selon Gilles Bonnefond, président de l’USPO (Union des syndicats de pharmaciens d’officine), les gros conditionnements représenteraient 20 à 25 % du nombre total de traitements vendus, pour ceux bien sûr qui sont proposés à la vente à la fois en boîtes normales et en gros conditionnements. Un relatif succès qui n’empêche pas l’USPO de sonner la charge contre ces grosses boîtes, accusées de tous les maux.
Gaspillage.
Principal reproche : la faiblesse de l’économie réalisée. Gilles Bonnefond l’évalue à 10 ou 12 % maximum par rapport au prix de vente en conditionnement normal. « Mais cette économie ne fonctionne que si le patient va jusqu’au bout de son traitement », précise-t-il. Selon lui, dans le cas d’une ALD, « les modifications et adaptations de traitements sont fréquentes, et il suffit que 12 % des patients ayant opté pour les gros conditionnements ne finissent pas leur traitement pour que l’économie escomptée se transforme en gaspillage ». Gilles Bonnefond reconnaît également que les pharmaciens d’officine font moins de margesur ces gros conditionnements que sur les boîtes habituelles, ce qui ne fait pas leur affaire. Enfin, le patron de l’USPO reproche aux grands conditionnements d’aboutir à espacer les visites de patients chez le médecin et le pharmacien « alors que la loi HPST confie conjointement à ces deux professionnels une mission de suivi thérapeutique des patients ».
L’USPO a lancé une enquête auprès de ses adhérents pour savoir ce qu’ils pensaient de ce dispositif. Selon Gilles Bonnefond, les premiers résultats feraient état d’un « certain gâchis dans la classe des antihypertenseurs où les changements de traitements sont fréquents, amenant les patients à ne pas finir des traitements déjà remboursés par l’Assurance-maladie et à s’en faire prescrire de nouveaux ». Ce qui fait dire sans détours à Gilles Bonnefond que « la première mesure d’économies… serait de supprimer les grands conditionnements ».
Cette position fait vivement réagir le CISS (Collectif interassociatif sur la Santé). Son président, Christian Saout, souligne qu’ « il serait souhaitable que ce syndicat avance des données chiffrées pour étayer ses affirmations ». Le président du CISS pour sa part « tout à fait favorable aux grands conditionnements » se montre un brin vachard : « il est évident que si les patients vont moins à la pharmacie, ils seront moins tentés d’acheter les produits d’hygiène bien présentés en tête de gondole. Quant au suivi des patients mis en avant par ce syndicat pour justifier sa volonté d’en finir avec les grands conditionnements, je n’en ai jamais vu à l’officine ».
Les résultats définitifs de l’enquête menée par l’USPO sur les grands conditionnements seront rendus publics le 13 octobre lors des rencontres annuelles que le syndicat organise à Paris.
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