Anne Hidalgo bouge les lignes avec son projet de camp humanitaire dans Paris

Par
Publié le 01/06/2016

« Il est de notre responsabilité d'agir. » Anne Hidalgo a annoncé ainsi, mardi 31 mai, la création d'un nouveau lieu d'accueil et d'hébergement pour les personnes migrantes. Soit un camp humanitaire dans Paris, aux normes de l'ONU et du Haut Commissariat pour les réfugiés (HCR). « Nous ne pouvons plus accepter la situation humanitaire et sanitaire », a lancé la maire de Paris. L'idée étant que « nous ne voyions plus ces campements indignes », a-t-elle ajouté évoquant des sites tels celui des Jardins d'Eole, (19e) où 800 personnes ont planté leur tente. Avec les pluies diluviennes de ces derniers jours, les conditions sanitaires se sont fortement dégradées sur ce campement, dernier en date d'une longue série de squats installés puis démantelés dans la capitale depuis un an. Paris connaît en effet un afflux de migrants en transit, notamment vers Calais, qui contribue à engorger la demande d'asile et à saturer les structures d'hébergement.

Sur le modèle de Grande-Synthe

Dans cette démarche, le modèle revendiqué est clairement celui de Grande-Synthe (Nord), où la municipalité et Médecins sans frontières avaient ouvert leur propre camp de réfugiés en mars, malgré les réticences des pouvoirs publics. « Aujourd'hui, l'État accompagne sa démarche et s'est joint à lui », a souligné Anne Hidalgo, alors que les ministres de l'Intérieur et du Logement viennent tout juste d'acter, la reprise par l'État de la gestion de ce camp.

Les associations impliquées dans l'accueil des migrants, qui avaient appelé à un « plan d'urgence » début mai, ont salué cette annonce. « C'est une initiative positive. La mairie donne l'impulsion, il faut que l'État s'empare du sujet car l'accueil des réfugiés est sa responsabilité », a déclaré Florent Gueguen, directeur général de la Fédération nationale des associations de réinsertion sociale (Fnars).

La nouvelle a toutefois été accueillie avec une certaine surprise par Médecins sans frontières (MSF). « Nous n'avons pas du tout été contactés par la mairie de Paris, confie Andé Jincq, responsable de coordination des migrants à MSF, au « Quotidien ». Mais cette initiative montre que les autorités ont compris que la création de camps sanitaires est actuellement la meilleure solution pour offrir à ces personnes de dignes conditions d'hygiène, d'intimité et de confort. » Il rappelle qu'une vingtaine d'évacuations de sites insalubres ont eu lieu en un an dans la capitale. « Toutefois, le camp doit rester une solution provisoire, ajoute-t-il. Pour que ces sites d'accueil se vident, il faut pouvoir mieux accompagner et orienter ceux qui en sortent. »

Le gouvernement attend de se prononcer

L'annonce a aussi décontenancé le ministère de l'Intérieur. « L'État se prononcera quand il aura pu prendre connaissance de ses objectifs, de son articulation avec le droit au séjour et avec les dispositifs nationaux d'hébergement et d'asile », y a-t-on indiqué, précisant que l'initiative « relève de la libre administration des collectivités locales ».

« C'est un problème de jeu politique à l'intérieur de la gauche pour prendre un leadership politique sur une partie de la gauche, manifestement », a dénoncé, quant à elle, Nathalie Kosciusko-Morizet (Les Républicains), candidate à la primaire pour 2017, sur France Info. « C'est vrai que si on veut sincèrement avancer sur la question des réfugiés, ça se fait de concert naturellement avec le ministère de l'Intérieur. »

Le président (LR) de l’Association des maires de France (AMF), François Baroin, a, lui, adopté une tout autre tonalité, rendant notamment hommage à Mme Hidalgo pour son soutien à l'AMF dans son combat contre la baisse des dotations de l'État aux collectivités. Concernant l'accueil des réfugiés, le sénateur-maire de Troyes a estimé qu'« un maire peut beaucoup à la condition que l'État respecte les missions qui sont les siennes ». Il a souligné que « Mme la maire de Calais (Natacha Bouchart, LR) a été exemplaire dans son accompagnement au moment où l’État était absent ».

Betty Mamane

Source : lequotidiendumedecin.fr