Aux états généraux, les spécialistes libéraux étrillent une loi « délétère et dogmatique »

Publié le 11/12/2014
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« Le top départ du mouvement est donné », a lancé le Dr Patrick Gasser, président de l’UMESPE (branche spécialiste de la CSMF), en clôture des premiers états généraux de la médecine spécialisée réunis à Bagnolet, aux portes de Paris.

Devant les représentants de 30 « verticalités » affiliées au syndicat (pédiatres, radiologues, cardiologues...), le Dr Gasser a exhorté ses troupes à la mobilisation générale pour que l’appel à la fermeture des cabinets médicaux de fin décembre (et à l’absence de permanence des soins) soit massivement suivi sur le terrain par les spécialistes libéraux.

Jouer collectif

De fait, au-delà des revendications catégorielles, le mot d’ordre est désormais à l’union sacrée contre le projet de loi de santé. « Notre force, c’est d’être tous ensemble, il faut jouer collectif », a insisté le Dr Jean-Paul Ortiz, président de la CSMF. « Le mouvement du 24 au 31 décembre doit être quelque chose de fort. Si on n’arrive pas à mobiliser tous les médecins, nous aurons beaucoup de difficultés à l’avenir », a-t-il prévenu. « La mobilisation peut être longue et dure », a renchéri le Dr Gasser appelant les cadres à « descendre sur le terrain » pour « aller au-devant des collègues ».

Malgré les signes d’ouverture de Marisol Touraine (sur le service public hospitalier ou l’organisation territoriale), les spécialistes ont affiché leur détermination. « Ce que nous voulons, ce sont des écrits officiels, pas des paroles ou des "PowerPoint" », a ironisé le Dr Gasser.

Lors des états généraux, bon nombre de responsables syndicaux ont dénoncé les « attaques » contre les fondements de la médecine spécialisée libérale, relayant l’exaspération que soulève une loi jugée « délétère et dogmatique ». Principaux griefs : le tiers payant généralisé obligatoire, les modalités du nouveau service public hospitalier, la main mise de l’État sur le soin en région ou encore la « destruction » des métiers.

L’hôpital public en a pris pour son grade. « L’hospitalocentrisme, nous le subissons depuis quatre ans en cancérologie avec les plateformes de génétique moléculaire exclusivement hospitalières », témoigne le Dr Élisabeth Russ, présidente du syndicat des médecins pathologistes français (SMPF). « Aujourd’hui, les libéraux ont besoin d’avoir accès à l’innovation. Avec ce projet de loi, ça ne sera possible en aucun cas », regrette-t-elle.

Idéologie

« Uniquement par idéologie et dogmatisme, on veut nous imposer un modèle hospitalier, sous le signe du transfert de tâches et du rationnement », accuse encore le Dr Christian-Michel Arnaud, président du Syndicat national des anesthésistes réanimateurs de France (SNARF). Pour le Dr Patrice Papin, président du syndicat des chirurgiens orthopédistes (SNCO), « le but ultime de ce projet de loi est de construire un parcours de santé "non-médecin centré" ». Le Dr Georges de Korvin, président du syndicat français de médecine physique et réadaptation (SYFMER) va dans le même sens : « On ressent un déni de notre valeur professionnelle. Il n’y a dans cette loi aucune perspective sur la place de la médecine spécialisée dans le système de soins ».

Un cahier de doléances de la médecine spécialisée libérale est en voie de finalisation. Objectif : élaborer un socle commun de propositions et forcer le gouvernement à réécrire son texte.

Internes et FHP dans la boucle

Des représentants extérieurs à la CSMF ont pris la parole lors des états généraux, autre signe de la volonté collégiale de peser. Le Dr Jean-Paul Hamon, président de la Fédération des médecins de France (FMF), a rappelé le mot d’ordre : « Pas de négociation tant que la loi n’est pas retirée ! ».

Également convié, le nouveau président de l’intersyndicat des internes (INSI), Mickael Benzaqui, a apporté son soutien aux praticiens libéraux, sans toutefois appeler à la grève des internes pour le moment.

Un soutien « à 200 % » également affiché par les représentants de la Fédération de l’hospitalisation privée (FHP), qui a programmé de son côté un mouvement de grève des cliniques à compter du 5 janvier, pour une durée illimitée. Pour de nombreux responsables, il aurait d’ailleurs été préférable que les établissements privés et les blocs opératoires rejoignent le mouvement des médecins de ville... dès le 23 décembre.

SAMUEL SPADONE

Source : Le Quotidien du Médecin: 9373