Éditorial

Cacophonie

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Publié le 02/07/2018
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Les usagers de la santé ? Ils sont omniprésents sur les ondes, sur le net ou dans la rue. Malades de la thyroïde, victimes de maltraitance médicale, militants de la maladie de Lyme, ligues anti-vaccinales… Depuis peu, des générations spontanées de groupes de patients, dont on n’avait guère entendu parler avant, donnent de la voix, saisissent les tribunaux, voire sollicitent les institutions publiques pour obtenir gain de cause, à rebours souvent des affirmations scientifiques. Par leur vigueur et parfois leur agressivité, ces mouvements ne facilitent pas la tâche des soignants et des pouvoirs publics. Mais ce nouvel avatar du populisme dans le domaine de la santé ne laisse pas indifférentes les autorités : en témoigne la sortie fin juin de recos de la HAS sur la maladie de Lyme que les infectiologues ont refusé d’avaliser ou la récente publication d'un rapport du Haut Conseil à l’Egalité appelant le corps médical à une « prise de conscience » sur les « violences obstétricales »...

On dira ce qu’on voudra de cette effervescence. Mais, quoi qu’on puisse en penser, c’est le symptôme d’une démocratie sanitaire en panne, faute de canaux pour s’exprimer efficacement. Seize ans après la loi Kouchner sur les droits des malades, celle-ci aurait-elle besoin d’un second souffle ? Les principaux porte-voix du secteur que le « Quotidien » a interrogés ne sont pas loin de le penser. Les relais pourtant ne manquent pas. Année après année, chaque ministre a eu à cœur de rajouter instituts, comités ou strapontins pour que les patients puissent avoir droit de cité. Mais dans cette cacophonie, qui est entendu au final ? Les récents chantiers du monde de la santé attestent de la difficulté de prendre en compte les usagers. Car la représentation collective des malades ne se décrète pas. Et, même si l’on s’en gargarise, elle reste à réinventer…


Source : Le Quotidien du médecin: 9678