Entretien

Catherine Lemorton : « L’Etat doit mettre son nez dans la PDS »

Publié le 04/06/2015
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Crédit photo : S. Toubon

LE QUOTIDIEN : On a un peu le sentiment que vous avez ménagé les libéraux dans ce rapport *…

CATHERINE LEMORTON : Je ne les ménage pas, mais je reste dans la ligne voulue par le président de la République et la ministre de la Santé, qui est de ne rien imposer, et ne rien rendre obligatoire pour les médecins.

C’est valable pour le volontariat ? Il ne faut pas le remettre en cause ?

Exactement. Dans le rapport, ce n’est pas mon avis que je donne, je reste dans la ligne politique de la majorité à laquelle j’appartiens.

Vous décrivez sans concession certains travers de la PDS, mais à vous lire, les libéraux sont loin d’être responsables de tout..

Bien sûr ! Un médecin a déjà du mérite d’être venu s’installer dans un territoire isolé et d’y rester. On lui demande en plus d’assurer des gardes, alors que le laboratoire d’analyse est fermé, la radiologie aussi, et l’hôpital est éloigné. Ce ne sont pas des conditions d’exercice très confortables et sécurisantes. C’est un peu la double peine.

Vous décrivez aussi une PDS en pilotage automatique, sans réel patron et sans évaluation..

C’est exactement ça. C’est à l’Etat de réguler l’accès aux soins. Mais quand cet accès repose sur le volontariat, il y a des initiatives territoriales qui sont bonnes et économiquement viables, et d’autres qui coûtent très cher sans efficience. C’est tout ce gloubi-boulga qu’on n’arrive pas à analyser, faute de pilotage national. Il nous faut des outils d’évaluation car la PDS ambulatoire coûte très cher.

Dans certains territoires, entre 20h et 24 heures, un médecin touche 450 euros sans se déplacer, pour le remercier d’être volontaire. Ce sont des rémunérations dignes d’un Etat riche, ce qui n’est pas le cas. Il faut donc aussi des évaluations de terrain. Malheureusement, leministère de la Santé de ne procède pas lui-même à ce pilotage national. Or, il faut que l’Etat mette son nez là-dedans.

Quelle autre mesure vous paraît importante ?

Il faut permettre aux aux médecins remplaçants de participer à la PDS. Certains le voudraient mais ne peuvent pas, car le médecin titulaire n’est pas volontaire. C’est quand même idiot !

Par ailleurs, je pense que le tiers payant peut inciter les gens à se rendre dans une MMG et à non plus à l’hôpital. Avec les majorations de PDS, la consultation à 73 euros la nuit, il y a des gens pour qui c’est beaucoup trop cher.

Pensez-vous, comme beaucoup de libéraux, que le fait que l’accès aux urgences ne soit pas régulé est un facteur de désaffection de la PDS ?

Non, je ne crois pas. C’est plutôt l’introduction du volontariat dans la PDS qui a désorganisé le dispositif. Selon les chiffres de la FHF, le recours aux urgences a augmenté de 30 % depuis 2003, date de l’introduction du volontariat dans la PDS. On ne peut pas ne pas faire le lien.

Propos recueillis par H.S.R.

* Rapport des députés Jean-Pierre Door (UMP) et Catherine Lemorton (PS) sur l’organisation de la PDS. À lire : « PDS : l’État défaillant, les médecins libéraux ménagés »



Source : Le Quotidien du Médecin: 9417